À Brétigny-sur-Orge, commune de l’Essonne de quelque 23 000 habitants, le cimetière est entretenu sans pesticides. Avec ses trois zones distinctes – minérale, arborée, engazonnée –, il offre un exemple de gestion "zéro phyto" différenciée selon les profils de cimetières. Retour d’expérience.

Même dans beaucoup de villes déjà converties à une gestion des espaces verts sans produits phytosanitaires, le cimetière fait souvent de la résistance. À Brétigny, la ville est passée en intégralité au zéro pesticide, et le cimetière de quatre hectares n’y échappe pas – ou devrait-on dire "les cimetières" ? Ce lieu d’inhumation comprend en effet trois zones très différentes.
La première est dite "minérale" par les gestionnaires. Il s’agit de l’ancien cimetière traditionnel, à la française, avec des concessions jointes et des allées en cailloux ou goudronnées. Les allées sont petites, les tombes très alignées.
La deuxième est arborée : les tombes se trouvent sous des feuillus, l’alignement est plus espacé, les concessions suivent le terrain (déclivité, présence d’arbres et de bosquets). Les allées sont en terre et gravillons.
La troisième est dite "engazonnée". Les pierres tombales y sont entourées de gazon, tel qu’il existait avant que cette ancienne prairie ait été reprise par la ville pour étendre son cimetière. Les allées sont en asphalte.

cimetiere de Bretigny

Une gestion "zéro phyto" a été mise en œuvre sur les trois zones
du cimetière de Brétigny-sur-Orge. Au programme : brûlage,
binage, grattage, ramassage et abattage.
Photo : © Thibault d'Argent 2012.

Coûteux brûlage

Deux gardiens travaillent sur le cimetière, consacrant entre 80 et 90 % de leur temps à l’entretien. S’y ajoutent des interventions des agents des espaces verts pour tous les gros travaux comme la tonte, l’élagage, la coupe des haies…

Le cimetière historique et classique est situé en haut d’une petite colline. Lui succèdent, au fur et à mesure que l’on descend la pente, la zone arborée puis la partie engazonnée. Le haut du cimetière doit être entretenu surtout au printemps et en été, pour éliminer les plantes qui poussent entre les tombes et dans les allées "minérales". "Nous utilisons deux techniques : le brûlage et l’arrachage à la binette", explique Mathieu Galéa, responsable du Pôle accueil population à la mairie de Brétigny-sur-Orge.
Le brûlage est réalisé avec un brûleur à gaz tenu à la main, la bonbonne de 50 litres de gaz étant posée sur un petit diable à roulettes. "En une journée, il n’est pas rare que soient vidées deux bouteilles de gaz, et l’on monte parfois à quatre bouteilles", fait remarquer Mathieu Galéa. En 2014, la commune a dépensé 3 000 € pour l’achat du seul gaz. Il faut ajouter à cela le temps et les frais de déplacement jusqu’à Étampes, à une trentaine de kilomètres de Brétigny, où les gardiens s’approvisionnent. Les plantes les plus grosses, quant à elles, sont binées, ce qui coûte moins cher en matières premières mais est aussi chronophage.
"Nous allons prochainement tester une solution d’arrachage mécanique : une tête qui s’adapte à la débroussailleuse à dos actuellement utilisée pour les finitions lors des tontes. Cette tête est censée entrer dans le sol, tourner et couper les racines. Cela pourrait être efficace dans les allées des cimetières, au sol meuble. Le fabricant doit bientôt venir faire une démonstration aux équipes des espaces verts et de l’entretien du cimetière. Si nous sommes convaincus par son fonctionnement et le résultat obtenu, nous investirons", explique Olivier Vignaud, chef du service environnement de Brétigny-sur-Orge. Un tel outil pourrait permettre de réduire la consommation de gaz du cimetière, sachant toutefois que les gardiens ne disposent pas pour l’instant de débroussailleuse ; cette dernière fait plutôt partie de l’équipement des agents des espaces verts.

Abattage non controversé

Le brûlage n’est pas vraiment utilisé sur les autres parties du cimetière. "Sur les espaces arboré et engazonné, la pousse de végétaux est moins gênante", note Mathieu Galéa. Sous les arbres, les interventions sont surtout réservées au ramassage de branches et au soufflage des feuilles. C’est une activité elle aussi très consommatrice en temps.
"Nous avons eu beaucoup de remarques d’usagers comme quoi les arbres salissaient les sépultures. Nous avons donc abattu 160 arbres sur cet espace", expliquait en outre Olivier Vignaud lors d’une visite de terrain organisée par Phyt’Eaux Cités en juin 2015. En raison des pratiques "zéro phyto" de la commune, les souches n’ont pas été dévitalisées. Elles ont été barrées d’une grande croix pour que pénètre l’eau et qu’elles pourrissent. "L’abattage n’a posé aucun problème pour les habitants, c’était au contraire une demande de leur part… Les exigences sont différentes sur le cimetière et sur la voirie, par exemple, où couper un arbre soulève des oppositions", poursuit Olivier Vignaud.
Le cimetière, zone de sensibilités particulières ? Mathieu Galéa en témoigne : "en période de pousse tout au début du printemps et en automne, nous recevons une à deux plaintes par jour. Même les personnes à sensibilité écologique veulent que le cimetière soit entretenu, et peu importe la manière dont on s’y prend. C’est encore plus vrai après une inhumation, pendant les premiers mois du deuil".

Gazon et fleurs, un bon ménage

Finalement, la zone la plus simple à entretenir en "zéro phyto", mais aussi d’une manière générale, est la zone engazonnée. Elle possède quelques allées. Sur celles qui sont goudronnées, les adventices sont traitées par brûlage et grattage. Quant aux nouvelles allées en gravillons, désormais des toiles en polypropylène sont installées sous le cheminement pour limiter la pousse des vivaces et ainsi l’entretien. Le reste de la zone est juste tondu. "Il n’y pousse pas de ronces ou de chardons. Quant aux fleurs qui y apparaissent, elles ne sont pas gênantes", explique le chef de service environnement. Mathieu Galéa va dans le même sens : "l’herbe fait passer beaucoup de choses. D’une manière générale, il est beaucoup plus facile de traiter les parties engazonnées, que nous sommes en train d’aménager au vu des connaissances actuelles. Nous laissons par exemple une marge entre la fin des concessions et la haie pour faciliter le passage des machines. Alors que dans le cimetière du haut, ancien et classique, nous n’avons qu’une vingtaine de centimètres entre deux concessions, ce qui n’est absolument pas adapté aux machines. Il faut donc beaucoup de travail manuel pour maintenir le cimetière dans un état de propreté".

Caroline Kim
Publié avec l'aimable autorisation de reproduction de
Techni.Cités. Article paru dans le n° 288 de décembre 2015.

 

L’essentiel

  • Un cimetière minéral géré en "zéro phyto" exige beaucoup d’entretien manuel.
  • Des innovations technologiques peuvent faire baisser la facture de l’entretien.
  • Les zones engazonnées sont les plus simples à gérer.

Qu’est-ce que c’est ?

Phyt’Eaux Cités : propose depuis 2007 aux services communaux de voirie et espaces verts des bassins de la Seine, l’Orge et l’Yvette un audit de leurs pratiques phytosanitaires, des formations, un plan d’action pour réduire l’usage de pesticides.

De 2020 à 2017

La loi visant à mieux encadrer l’utilisation des produits phytosanitaires sur le territoire national, publiée au Journal officiel le 8 février 2014, interdit l’usage de pesticides par l’État, les collectivités locales et établissements publics pour l’entretien des espaces verts et des forêts. Cette interdiction devait entrer en vigueur le 1er janvier 2020. Dans la loi de transition énergétique de 2015, les députés l’ont toutefois avancée de trois ans, la fixant désormais au 1er janvier 2017.
À cette date, seuls les produits de bio-contrôle figurant sur une liste établie par l’autorité administrative, ceux qualifiés "à faible risque" par les règlements européens et les produits autorisés dans le cadre de l’agriculture biologique pourront être utilisés.

Pour en savoir plus :

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations