La commune et le Solitaire

Le goût macabre des gazettes pour les faits divers liés à la mort ne se dément pas, tout particulièrement d’ailleurs lorsque l’incurie supposée de l’Administration peut être mise en exergue. Un article récemment paru dans La Voix du Nord du mercredi 11 mai dernier ne déroge pas à cette règle et nous gratifie d’un titre choc : "Enterré dans le carré des indigents sans que sa famille soit prévenue". Tout est dit !

Rappelons tout d’abord que, juridiquement, il n’existe pas de carré des indigents, mais un terrain commun qui est le seul service public obligatoire, réservé à ceux qui remplissent certaines conditions fixées par le Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT), et que si, en pratique, les plus démunis y reposent le plus souvent, il ne leur est pas expressément réservé. Quels sont les faits : un homme, retraité de La Poste, est décédé subitement à Lille début février, il ne lui reste qu’une sœur, mais qui vit en Normandie. La commune de Lille, au bout de quinze jours, l’inhume en terrain commun. La commune aurait-elle commis une faute ?
Il est tout d’abord possible de constater que les services administratifs ont sollicité un délai dérogatoire pour procéder à cette inhumation, puisque, indubitablement, un tel délai excède celui donné afin d’organiser les funérailles.

De surcroît, il n’existe aucune obligation pour la commune de se livrer à des enquêtes. En effet, l’art. L. 2213-7 du CGCT énonce que : "Le maire ou, à défaut, le représentant de l’État dans le département pourvoit d’urgence à ce que toute personne décédée soit ensevelie et inhumée décemment sans distinction de culte ni de croyance." La formulation de cet article nous permet de rappeler que, juridiquement, si les familles ont normalement l’obligation de payer les frais des funérailles, elles n’ont aucunement l’obligation de pourvoir à ces mêmes funérailles. Enfin, l’art. L. 2223-27 du CGCT précise que : "Le service est gratuit pour les personnes dépourvues de ressources suffisantes. Lorsque la mission de service public définie à l’art. L. 2223-19 n’est pas assurée par la commune, celle-ci prend à sa charge les frais d’obsèques de ces personnes. Elle choisit l’organisme qui assurera ces obsèques." Le Code monétaire et financier (art. 72 de la loi no 2013-672) a donc été complété par un art. L. 312-1-4 selon lequel : "La personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles du défunt peut obtenir, sur présentation de la facture des obsèques, le débit sur les comptes de paiement du défunt, dans la limite du solde créditeur de ces comptes, des sommes nécessaires au paiement de tout ou partie des frais funéraires, auprès des banques teneuses desdits comptes".

La commune est donc en dernier ressort l’ordinatrice des funérailles et, on le sait bien, n’a que peu de moyens d’investigation pour retrouver : renseignements obtenus auprès de la commune de naissance du défunt, de sa ville de résidence… Paradoxalement, si une faute pouvait être retenue contre la ville de Lille, c’est à la limite celle de ne pas avoir essayé de trouver ces fonds, et encore, en l’absence de toute volonté présumée du défunt, qu’aurait-elle pu faire d’autre que de l’inhumer dans le terrain commun. Rien !

Évidemment, la détresse de la sœur se comprend, mais il existera toujours des hypothèses marginales où, dans le bref délai donné pour l’organisation des funérailles, aucun proche ne peut être retrouvé…

Maud Batut
Rédactrice en chef

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