L’Association NAtionale des PErsonnels de Cimetière (A.NA.PE.C.) est très souvent sollicitée sur la question des reprises de concessions, qu’elles soient administratives ou consécutives d’une procédure d’abandon.

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Georges Martinez,
président de l’A.NA.PE.C.

Dans un cas comme dans l’autre, une fois tous les délais expirés et les diverses procédures régulièrement exécutées, les concessions reviennent au domaine public et, plus précisément, il revient au maire de la commune ou au président de l’EPCI en charge du cimetière d’entamer les travaux de reprise.

Par reprise, il s’entend d’une part le traitement du monument, de la semelle et du caveau, et d’autre part la destination donnée aux restes des corps exhumés. Pour ce qui est des monuments et semelles, il faut rappeler que l’habilitation funéraire prévue à l’art. L. 2223-23 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) n’est pas requise pour des travaux de maçonnerie et de marbrerie funéraire en vertu de l’art. L. 2223-19 du CGCT. Ainsi, certaines communes ont jugé bon de faire enlever en régie, ou par une entreprise locale, tous les monuments de surface à l’abandon ou en situation de péril, tout en laissant les corps inhumés.

Cette situation n’est récusée par aucun texte, mais l’esprit de la loi, telle qu’on veut bien l’interpréter dans son éthique et sa volonté d’honorer les défunts, va à l’encontre de ce type de décision. En effet, la loi 2008-1350 du 19 décembre 2008 et les modifications qui s’en sont suivies ont clairement exprimé l’obligation de respect et de dignité dus aux restes exhumés. La première chose étant de bannir toute fosse commune au bénéfice d’une affectation nominative de chaque défunt jusque dans la suite donnée à ses restes.

Si le maire maintient sa décision de ne pas retirer les corps inhumés sous le prétexte qu’il ne souhaite pas réattribuer de terrain pour concessions, il met la commune et les maires qui viendront après lui dans une grande difficulté. En effet, nul ne peut présager ce qu’il adviendra de la surface en question. Certes, la présence de corps ou de cendres rend le lieu inaliénable, mais l’information va se perdre au fil des ans, et un jour ou l’autre, la nécropole risque de refaire surface sans aucune autre solution que de la laisser en l’état. Sans compter, bien sûr, les familles qui voudraient, malgré l’acceptation de la reprise de la concession de leurs aïeux, s’enquérir du lieu où se trouvent leurs restes. Même au regard de l’économie réalisée dans l’instant, cette solution est vraiment à proscrire.

Amis, fidèles de Résonance et/ou adhérents à l’A.NA.PE.C, dites bien à vos élus qu’une bonne gestion funéraire passe par les reprises de concessions, et non par l’extension foncière. De nombreux maires sont très frileux dès lors qu’il s’agit de toucher aux morts. Pourtant, la loi est claire et explicite, et les doutes ont été levés quant à la crémation des restes exhumés.
La loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d’amélioration de la qualité du droit a modifié l’art. L. 2223-4 du CGCT en remplaçant, les mots "attestée ou présumée" par "attestée". Ainsi, depuis l’entrée en vigueur de ce dispositif, l’art. L. 2223-4 du CGCT vient préciser que : "Un arrêté du maire affecte à perpétuité, dans le cimetière, un ossuaire aménagé où les restes exhumés sont aussitôt réinhumés. Le maire peut également faire procéder à la crémation des restes exhumés en l’absence d’opposition connue ou attestée du défunt. Les restes des personnes qui avaient manifesté leur opposition à la crémation sont distingués au sein de l’ossuaire."

Toutes les communes de plus de 2 000 habitants ont désormais l’obligation de posséder un ossuaire, mais aucun texte ne définit de normes constructives en la matière. La seule chose requise, c’est que l’ossuaire est défini par arrêté du maire et qu’il doit être "aménagé" et "perpétuel". Certaines communes disposent d’un local affecté à l’ossuaire suffisamment spacieux pour permettre la dépose de plusieurs centaines de boîtes à ossements, mais la plupart se trouvent dans le devoir de construire.

De plus, la prévision de la volumétrie doit pouvoir s’estimer sur une durée de plusieurs décennies si l’on ne veut pas affronter une saturation précoce, sachant qu’à une question (no 18110) posée en 2013 au Sénat par Mme Chantal Guittet (Socialiste, républicain et citoyen – Finistère), le ministre de l’Intérieur répondait : "Le terrain affecté à l’ossuaire bénéficie d’une affectation définitive et perpétuelle. Il n’apparaît donc pas possible de procéder au retrait des ossements d’un ossuaire pour libérer de la place dans celui-ci, d’autant que ce retrait pourrait, sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, constituer un manquement au respect dû aux morts. La commune pourrait alors se trouver dans l’obligation d’agrandir l’ossuaire ou d’en créer un autre."

Il est donc important de déterminer au préalable de l’affectation d’un ossuaire, les modalités de gestion du cimetière et en particulier de la suite que l’on voudra bien donner aux restes exhumés. Nous l’avons dit plus haut : tout ce qui relève de l’extension foncière et de surcroît de bâti supplémentaire ne relève pas d’une bonne gestion funéraire. Il n’y a donc pas de logique à remplir un ossuaire et à en construire indéfiniment d’autres. La priorité doit donc être donnée à la crémation, et l’ossuaire doit être réservé aux restes ne pouvant bénéficier d’une crémation.

Qui sont-ils ?

Tout d’abord ceux pour qui l’opposition à la crémation est connue ou attestée. Il convient ici de rappeler aux services d’état civil ou de cimetières qu’il est fortement conseillé de prévoir dans les imprimés de demande d’inhumation une case spécifiant le choix du défunt en matière de crémation des restes exhumés. Le législateur a ôté en 2011 la notion de présomption, ce qui met à l’abri la responsabilité du maire dès lors qu’un document écrit ne vient pas attester de la volonté contraire du défunt à la crémation.
Dans les faits, la connaissance relève principalement de la religion clairement affichée sur la sépulture du défunt ou lors de l’inhumation. Sans vouloir prétendre à exégèse des religions, il est établi que les musulmans et les juifs s’opposent à la crémation. Encore une fois, même si aucun document n’atteste l’opposition du défunt à la crémation et que de ce fait le maire ne pourrait être attaqué sur le fond, il est recommandé, au titre de la chose connue, de ne pas mettre en crémation les restes des défunts affichant sur leur sépulture un signe manifeste de ces religions.

Sont également distingués, au sein de l’ossuaire, les restes que l’on ne peut identifier et qui de fait ne peuvent donc pas être traités par la crémation. Il s’agit alors de les enregistrer dans l’ossuaire par leur provenance ou par toute information ou tout indice. Rappelons qu’il est fortement conseillé de ne pas indiquer directement sur les boîtes à ossements déposées dans les ossuaires les noms des défunts ou des familles. Il est préférable d’y apposer une plaque d’identification comme l’indique la loi avec un numéro ou un code qui, traité par le gestionnaire du cimetière, lui permettra le cas échéant de retrouver toutes les informations nécessaires ; ceci afin d’éviter que la violation du lieu permette à quelque individu mal intentionné de pouvoir récupérer les restes de ses aïeux ou proches.
Mais si l’ossuaire est obligatoire, rien n’oblige à une construction. Le plus rentable est donc de récupérer un bâti existant, d’y ôter toute trace de gravure ou d’identification, et éventuellement d’y apposer le mot "ossuaire", ce qui n’est pas une obligation. Ainsi, le maire, par arrêté, définit comme "ossuaires" le ou les lieux concernés. Les grands caveaux dont la concession n’est pas renouvelée sont en particulier d’excellents choix. D’anciennes chapelles également, mais celles-ci sont rarement abandonnées. Dans l’hypothèse des reprises par crémation, on peut également affecter un caveau d’une ou deux places à la dispersion des cendres. Ce dernier est également identifié comme ossuaire pour un usage dédié, différent de celui du jardin du souvenir.

Pour ces deux ossuaires aménagés à partir de caveaux désaffectés, il est prudent de penser à la fréquence d’ouverture et fermeture, qui diffère des inhumations traditionnelles. Un marbrier peut tout à fait effectuer un aménagement tel qu’une trappe à ouverture facile pour la dispersion des cendres.
Nous avons énoncé ici certains principes, et l’important est de ne pas déroger à la loi, et la volonté de l’A.NA.PE.C. est de toujours se référer aux édits législatifs. Le partage d’expériences entre les adhérents du réseau A.NA.PE.C. permet de se sortir de situations délicates, car l’activité de nos cimetières fait apparaître de nombreux us et coutumes parfois prohibés dans la méconnaissance des textes par les élus ou le personnel. Pour le meilleur des conseils de proximité, adhérez et faites adhérer à
l’A.NA.PE.C.

Georges Martinez

Résonance n°115 - Novembre 2015

 

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