Comme nous l’avions proposé dans de précédentes éditions, la Confédération des Professionnels du Funéraire et de la Marbrerie (CPFM) continue à faire partager aux lecteurs de Résonance des réponses qu’elle a déjà apportées à ses adhérents, sur différents points ou questions ayant trait aux problématiques du secteur funéraire.

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Richard Feret,
directeur général délégué
de CPFM

Dans ce numéro, nous abordons la notion de fosse en terrain commun

Il existe, dans l’imaginaire collectif français, une idée reçue qui affirme que la "fosse commune" est un dispositif réservé pour l’inhumation des "indigents". Or il n’en est rien. Et pourtant, lorsqu’une entreprise se trouve sollicitée pour organiser des funérailles d’une personne sans famille, mais pas nécessairement dépourvue de ressources, il est fréquent qu’elle s’entende dire qu’il faut acheter une concession, au moins temporaire, pour procéder à l’inhumation de cette personne.

Or juridiquement, l’inhumation dans une concession n’est pas la règle. C’est même l’exception… Bien que la généralisation des concessions dans les cimetières en France ait fait perdre de vue ce principe !

La législation fait obligation à chaque commune de France de se doter d’un cimetière, destiné à l’inhumation de toute personne décédée dans la commune (même si elle n’y était pas domiciliée). Il s’agit d’une mesure de salubrité publique afin qu’un défunt ne reste pas sans sépulture et ne soit la source d’un trouble à l’ordre et à la santé publics. Et ce, quelle que soit la nationalité de la personne décédée.

La commune est également tenue de donner suite à la demande d’inhumation d’une personne domiciliée sur la commune même si le décès est survenu dans une autre commune.

La commune devra aussi permettre l’inhumation d’une personne décédée ayant droit à être inhumée dans une concession de famille (a priori dans ladite concession, ce qui semble aller de soi… mais, si cette concession est pleine et ne permet pas matériellement d’y inhumer cette personne, cette disposition amènera la commune à autoriser l’inhumation de cette personne… dans une fosse individuelle en terrain commun).

Et, disposition récemment ajoutée (en 2008), la commune devra permettre l’inhumation, dans son cimetière, d’une personne décédée, de nationalité française mais non domiciliée en France, qui n’a pas de droit à être inhumée dans une concession de famille, à condition qu’elle soit inscrite sur les listes électorales de la commune (art. L.2223-3 du CGCT).

Ce texte, de portée générale, sur le droit à être inhumé dans le cimetière de la commune, ne précise rien quant à la nature de la sépulture. Il s’agit, par défaut de précision, d’une inhumation dans une fosse individuelle, en terrain commun.

L’art. L.2223-1 du CGCT, qui fait obligation à chaque commune de se doter d’un cimetière, est suivi de l’art.
L.2223-2, qui indique que l’étendue du cimetière doit être suffisante pour que puissent y être inhumés (en fosse individuelle) les défunts ayant droit à y être inhumés, suite aux décès survenus sur une période de cinq ans.

Ces fosses, individuelles, sont encadrées par les articles R.2223-3 et R.2223-4 du CGCT, qui indiquent qu’elles doivent avoir de 1,50 mètre à 2 mètres de profondeur, 80 cm de largeur (les textes ne fixent pas de dimension minimale de longueur) et qu’elles sont, après que le cercueil y a été déposé, remplies de terre bien foulée.
Il en découle que le cercueil sera enfoui sous une épaisseur de terre d’au moins un mètre, qui permettra de filtrer les gaz et les odeurs et évitera que des animaux ne soient tentés de "creuser" pour atteindre la dépouille inhumée. Cette obligation est à l’origine de la notion de "vide sanitaire".

La terre, quoique bien tassée, va cependant former un renflement à la surface, du fait de l’espace occupé par le cercueil dans la fosse. Pour mémoire, rappelons que ce renflement est à l’origine du mot "tombe" (tumere signifie "enfler" en latin).

Le fait d’être inhumé dans une fosse individuelle en terrain commun ne peut pas faire l’objet d’une contrepartie financière pour la commune. (Les textes ne le prévoient pas alors qu’ils sont explicites à ce sujet pour les concessions). Tout au plus, la commune peut instaurer une taxe liée à l’inhumation.

À l’issue d’une période de 5 ans, les fosses peuvent être ré-ouvertes à l’initiative de la commune, afin d’en exhumer les restes qui sont alors ré-inhumés dans un ossuaire (ou crématisés si le défunt n’avait pas manifesté d’opposition à la crémation). Les emplacements ainsi libérés pourront permettre l’inhumation de nouveaux défunts (art. L.2223-5 du CGCT).

En ce qui concerne la notion de concession, l’art. L.2223-13 du CGCT indique que "si l’étendue du cimetière le permet", la commune "peut" (et non pas "doit") concéder des terrains aux personnes qui désirent y fonder leur sépulture et celle de leurs descendants ou successeurs. L’attribution de concessions n’est donc pas une obligation pour une commune… même si la plupart (pour ne pas dire la totalité) des communes de France ont aménagé des cimetières suffisamment étendus pour pouvoir proposer des concessions.

Cette généralisation a eu tendance à marginaliser les fosses individuelles en terrain commun, qui, dès lors, se sont retrouvées réduites à accueillir les corps des personnes dépourvues de ressources, dont les funérailles sont prises en charge par la collectivité. De là vient l’idée (erronée) que la fosse individuelle en terrain commun serait réservée, de façon exclusive, aux seules personnes dépourvues de ressources.

Dans les cas de figure où survient le décès d’une personne sans famille (mais pas sans ressources), les funérailles peuvent être organisées à l’initiative d’un voisin ou d’un ami (c’est la personne qui signera le bon de commande) et être payées par un prélèvement sur le compte du défunt (en vertu de l’art. L.321-1-4 du Code monétaire et financier).

Les funérailles peuvent également être organisées à l’initiative du maire de la commune du lieu du décès (c’est même une obligation, au terme de l’art. L.2213-7 du CGCT) et, dans ce cas aussi, pourront être payées par un prélèvement sur le compte du défunt. Si le défunt n’avait pas pris de disposition pour acquérir une concession, il pourra être inhumé dans une fosse en terrain commun, soit dans le cimetière de la commune où il est décédé, soit dans le cimetière de la commune où il était domicilié. Le refus de la commune de donner droit à cette demande est illégal.

Et même si un défunt dispose d’une famille et de moyens suffisants mais que sa volonté est d’être inhumé dans une fosse "commune", il pourra être fait usage du droit prévu à l’art. L.2223-3 sans qu’il puisse lui être opposé qu’il ne présente pas des caractérisques d’indigence.

Une réponse ministérielle, publiée au JOSN du 10 octobre 2013, est venue rappeler, de façon assez claire, ces dispositions (Question N° 07663 – JO Sénat du 10/10/2013 page 2979).

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Pierre Larribe

 

Conditions d'octroi d'une concession funéraire

14e législature

Question écrite n° 07663 de M. Joël Billard (Eure-et-Loir – UMP) publiée dans le JO Sénat du 01/08/2013 – page 2242

M. Joël Billard appelle l'attention de M. le ministre de l'Intérieur sur la législation relative à l'octroi de concessions dans les cimetières communaux, notamment les dispositions de l'art. L. 2223-13 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT). Celui-ci dispose que, lorsque l'étendue des cimetières le permet, il peut être concédé des terrains aux personnes qui désirent y fonder leur sépulture et celle de leurs enfants ou successeurs. Cet article, même s'il est précisé par la jurisprudence, semble ouvrir la possibilité à toute personne de fonder une sépulture dans un cimetière dont la capacité le permet, sans qu'il soit nécessaire à cette personne d'avoir un lien avec la commune.

Il souhaiterait donc savoir s'il est possible de préciser cet article afin de mieux encadrer l'octroi des concessions funéraires.

Réponse du ministère de l'Intérieur publiée dans le JO Sénat du 10/10/2013 – page 2979

En application de l'art. L. 2223-13 du CGCT, les communes ont la faculté de concéder des sépultures dans leurs cimetières "aux personnes qui désirent y fonder leur sépulture et celles de leurs enfants ou successeurs, en y inhumant cercueils ou urnes". L'octroi de ces concessions relève de la compétence des conseils municipaux qui, conformément à l'art. L. 2122-22 du Code précité, choisissent fréquemment de déléguer cette compétence au maire. L'art. L. 2223-3 du CGCT relatif au droit à l'inhumation prévoit que "la sépulture dans un cimetière d'une commune est due :
1° Aux personnes décédées sur son territoire, quel que soit leur domicile ;
2° Aux personnes domiciliées sur son territoire, alors même qu'elles seraient décédées dans une autre commune ;
3° Aux personnes non domiciliées dans la commune, mais qui y ont droit à une sépulture de famille ;
4° Aux Français établis hors de France n'ayant pas une sépulture de famille dans la commune et qui sont inscrits sur la liste électorale de celle-ci".

Compte tenu de ces dispositions, il importe de ne pas confondre le droit à être inhumé dans un cimetière et le droit à y obtenir une concession. Le CGCT distingue, en effet, le droit d'être inhumé dans une commune et la faculté pour la commune d'accorder des concessions dans son cimetière. L'art. L. 2223-13 du CGCT relatif à la délivrance des concessions n'indique pas en effet les personnes auxquelles cette possibilité est ouverte.

La décision de concéder des sépultures et celle de les octroyer relèvent de la politique de gestion du cimetière. Plusieurs cas de figure peuvent se présenter.
Lorsqu'une personne relève de l'un des quatre cas énumérés par l'art. L. 2223-3 précité et dispose donc du droit d'être inhumée, le maire de la commune concernée a l'obligation de délivrer l'autorisation d'inhumation. Le défunt est inhumé soit en pleine terre, c'est-à-dire en terrain commun, soit dans une concession.

La commune a l'obligation de fournir, gratuitement, une sépulture en terrain commun, pour une durée minimale de 5 ans (art. R. 2223-5 du CGCT). En revanche, l'institution de concessions dans son cimetière étant une faculté pour la commune, elle n'est pas tenue d'en délivrer. Cependant, si la commune en a institué, elle en accorde généralement aux personnes disposant d'un droit d'être inhumées dans son cimetière. Lorsqu'une personne ne dispose pas du droit d'être inhumée, la commune est libre, au moment du décès, d'accepter ou non l'inhumation de cette personne dans son cimetière. Elle n'est donc pas obligée de fournir une sépulture en terrain commun ou de délivrer une concession.

Certaines personnes souhaitent porter une sépulture de leur vivant et acquérir une concession dans une commune. La fondation de la concession est alors nécessairement déconnectée du droit à l'inhumation, et son cadre juridique a été précisé par la jurisprudence. Le Conseil d'État ne semble ainsi considérer comme motifs valables de refus d'octroi de la concession (nonobstant le droit d'y être inhumé) que le manque de place disponible dans le cimetière (CE, sect., 5 déc. 1997, Commune Bachy c/ Saluden-Laniel) ou les contraintes résultant du plan d'aménagement du cimetière ou d'une "bonne gestion du cimetière".

Dans la mesure où la jurisprudence est venue apporter des précisions en matière de délivrance des concessions funéraires, il n'apparaît pas nécessaire de modifier la réglementation en vigueur.

 

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations