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Dans notre dernier éditorial, nous nous interrogions quant à une éventuelle réflexion à mener sur le régime juridique de la traçabilité des cendres. Un fait divers affligeant vient nous rappeler l’opportunité d’un tel débat.

 

En effet, on peut lire dans les colonnes du journal Le Parisien en date du 14 juillet dernier (http://www.leparisien.fr/faits-divers/caen-il-en-appelle-a-ses-cambrioleurs-pour-retrouver-l-urne-funeraire-de-sa-mere-14-07-2016-5967297.php, qu’un médecin du Centre hospitalier de Caen a vu sa demeure cambriolée ; jusque-là rien que de très banal, malheureusement pour lui. Là où ceci commence à nous intéresser plus particulièrement, c’est lorsqu’on apprend que les cambrioleurs ont emporté l’urne contenant les cendres funéraires de sa mère.
Dans ce journal, le médecin en appelle à l’humanité des voleurs : "Je fais tout pour diffuser l’information et si les malfaiteurs ont un brin de cœur, de religiosité, de savoir-vivre, peut-être la rapporteront-ils, quand ils s’apercevront qu’il n’y a aucun trésor caché dans cette urne, mais qu’il n’y a que les cendres de ma mère, qui représentent un grand trésor pour nous", et ce pauvre homme de renchérir : "Comment annoncer (le vol) au reste de la famille ? L’inhumation est prévue en septembre. Ma mère, d’origine vietnamienne, d’une famille de neuf enfants, qui a travaillé 40 ans en Côte d’Ivoire, ne méritait pas ce triste sort".
On comprend alors que les cendres étaient déposées à son domicile en attendant l’inhumation prévue pour le mois de septembre. Il est patent que ce dépôt était illégal, mais nous avions déjà rappelé qu’en fait aucune traçabilité n’existe et que le gouvernement dispense de toute obligation les opérateurs funéraires sur ce point : "La loi précitée n’a pas confié de pouvoir de police aux gestionnaires de crématorium ou aux opérateurs funéraires : leur obligation se limite donc à l’information des familles sur les destinations possibles, lors de la remise de l’urne à la personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles. Cette dernière doit se conformer aux volontés émises par le défunt, dans le respect du cadre fixé par la loi". (Rep. Min 44538 JO AN Q 10/11 2009).
Ainsi, en dépit de l’interdiction de garder les urnes chez un particulier, en dépit de la possibilité de les conserver temporairement au crématorium pendant une année, de telles situations peuvent néanmoins se produire pour diverses raisons qui à défaut d’être légales, peuvent se comprendre en pratique. Ne faudrait-il pas revenir sur ce régime trop libéral ?

Philippe Dupuis
Consultant au Cridon, chargé de cours à l’université de Valenciennes, formateur en droit funéraire pour les fonctionnaires territoriaux au sein des délégations du CNFPT.

Résonance n°123 - Septembre 2016

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