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Tout ce que vous avez toujours voulu savoir sur…  La reprise des concessions funéraires…

 

 

I - Est-il vrai que les concessions temporaires obéissent à un régime de reprise simplifié ?

Oui
Les concessions temporaires d’une durée de quinze au plus ainsi que les trentenaires et les cinquantenaires sont infiniment plus simples à reprendre que les concessions en état d’abandon. En effet, ces concessions peuvent être renouvelées dans les deux années qui suivent leur échéance par le concessionnaire ou ses ayants droit (L. 2223-14 du CGCT). Si aucun renouvellement n’intervient, la commune pourra donc, passé ce délai, par un simple arrêté, opérer leur reprise. Le terrain fait ainsi retour à la commune sans aucune formalité, aucune publicité, et ce, quel que soit son état général à la fin de la durée de la concession (CE 26 juillet 1985, M. Lefèvre et autres ; Rec. CE tables p. 524 ; CE 20 janvier 1988, Mme Chemin-Leblond c/ Ville de Paris : Dr. adm. 1988, comm n° 128). Il est intéressant donc, pour les communes en manque de place dans le cimetière, d’identifier et de récupérer en priorité ces sépultures. Pratiquement, toutes les communes, alors que ce n’est en aucun cas une obligation, cherchent à prendre contact avec le titulaire de la concession.

II – Faut-il considérer que l’absence de titre de concession empêche la reprise ?

Non
Il peut parfaitement advenir qu’aucun titre de concession ne soit retrouvé par la commune. Deux possibilités sont alors envisageables : la première est qu’il est de notoriété publique que la sépulture soit une concession ; dans cette hypothèse, le Code prévoit que le maire puisse dresser un certificat de notoriété attestant l’existence d’une concession. La seconde est tout simplement qu’un tel titre n’ait jamais existé, et que l’on se soit fourvoyé sur la nature juridique de ce qui est en fait une sépulture en terrain commun, sépulture dont il faut rappeler qu’elle ne donne lieu à aucune délivrance de titre. Il est tout a fait possible qu’une telle sépulture se soit vue, au fil du temps, recevoir un monument et un caveau, et que plusieurs inhumations y aient été faites. Le juge estime alors que l’on est en présence d’une occupation sans titre du domaine public, régularisable pour la délivrance d’un titre de concession (CAA Nancy, 28 septembre 2006, n° 05NC00285, Consorts V).

III - Toutes les concessions peuvent-elles faire l’objet d’une reprise en état d’abandon ?

Non
L’art. L. 2223-17 du CGCT dispose que : "Lorsque, après une période de trente ans, une concession a cessé d’être entretenue, le maire peut constater cet état d’abandon par procès-verbal porté à la connaissance du public et des familles." L’art. R. 2223-12 du CGCT énonce lui que : "La procédure prévue… ne peut être engagée que dix ans après la dernière inhumation faite dans le terrain concédé." C’est donc une procédure cumulative, ces deux éléments doivent être réunis. La procédure ne peut intervenir avant un délai de cinquante ans décompté à partir de la date d’inhumation, pour les concessions centenaires ou perpétuelles dont l’acte de décès porte la mention "mort pour la France" en application des articles L. 488 et L. 489 du Code des pensions militaires (R. 2223-22 du CGCT). Enfin, lorsqu’une concession centenaire ou perpétuelle est entretenue en exécution d’une disposition testamentaire ou d’une donation, le recours à la procédure d’abandon est impossible (R. 2223-23 du CGCT).

IV – Existe-t-il une définition de l’état d’abandon ?

Non
Il est à noter que le terme abandon ne connaît pas de définition juridique, c’est à peine si la jurisprudence fait mention de "signes extérieurs" tels qu’envahissement par les plantes, mauvais état général. Selon la circulaire n° 62-188 du 22 mars 1962, l’abandon résulterait donc, par interprétation littérale de l’art. L. 2223-17 du CGCT, d’un défaut d’entretien constaté trente années après que la concession a été constituée. On ne mentionne aucunement la constatation d’un état de ruine quelconque, mais simplement des signes extérieurs, qui seraient nuisibles au bon ordre et à la décence du cimetière. Quand le concessionnaire ne fait plus face à cette obligation d’entretien, le contrat peut être alors rompu par la commune. En effet, la concession n’a été constituée que sous réserve de cet entretien, qui est un engagement du concessionnaire.

V – Doit-on respecter un certain formalisme pour initier la procédure ?

Oui
Il faut constater l’état d’abandon, ce qui se fait grâce à un procès-verbal dressé en présence du maire ou de son délégué (sauf à Paris où c’est le conservateur du cimetière). Les descendants et successeurs du titulaire seront prévenus par lettre recommandée avec accusé de réception de cette démarche. Cette lettre doit les inviter à être présents ce jour ou à s’y faire représenter. La lettre doit être adressée un mois avant. Dans le cas courant où les adresses ne sont pas connues, il pourra être remplacé par un affichage à la mairie ainsi qu’à la porte du cimetière, précisant date et heure de cette visite (CE 6 mai 1995, Commune d’Arques c/ Mme Dupuis-Matton, req. n° 111720). Le jour dit, un procès-verbal est établi. Il doit contenir les mentions suivantes :
- emplacement exact de la concession,
- description la plus précise possible de l’état de la concession (le juge refuse les formules trop vagues ; CAA Nancy 3 novembre 1994, M. Gaunet, req. n° 93NC00482),
- date de l’acte de concession, nom des parties à cet acte, noms de leurs ayants droit ou des défunt inhumés dans la concession si connus,
- au bout d’un délai de trois ans, un second procès-verbal est établi, confirmant ainsi par sa description l’absence d’entretien à trois ans d’intervalle.

VI - Y a-t-il un formalisme spécifique pour la publication du procès-verbal ?

Oui
Une copie du procès-verbal doit être notifiée sous huit jours aux descendants, successeurs ainsi qu’une mise en demeure de remise en état de la concession par lettre recommandée avec accusé de réception. Des extraits du procès-verbal seront affichés, et des affiches posées en mairie ainsi qu’au cimetière. Ces affiches seront renouvelées au bout de quinze jours deux fois de suite. Le maire devra dresser un certificat de l’accomplissement de cet acte annexé au procès-verbal. Il y aura donc au total trois affichages d’un mois, entrecoupés par deux quinzaines sans affichage (Rép. Min. n° 33615 JOAN Q, 4 octobre 1999, p. 5783).

Résumé d’un cycle d’affichage
- 1er PV : affichage un mois,
- 15 jours où il n’y a pas d’affichage,
- 1er renouvellement (qui correspond en fait à un deuxième affichage), les affiches sont apposées pendant un mois,
- 15 jours où, de nouveau, il n’y a pas d’affichage,
- 2nd renouvellement (qui correspond en fait à un troisième affichage), les affiches sont apposées pendant un mois.

VII - Est-il nécessaire d’effectuer une main levée de la procédure si un entretien a été constaté ?

Oui
Si on a constaté un acte pouvant être qualifié d’entretien de la concession lorsqu’est effectuée la deuxième visite du cimetière trois ans après la première, on doit alors suspendre la procédure de reprise pour encore trois ans. Une troisième visite aura donc lieu dans les mêmes conditions que la précédente. Si l’entretien est confirmé, on sortira la concession concernée de la procédure de reprise par un arrêté de main levée, sinon, on reprendra la procédure là où la deuxième visite l’avait laissée.

VIII - La saisine du conseil municipal est-elle obligatoire ?

Non
Un mois après la notification du second procès-verbal, le maire peut saisir le conseil municipal, qui doit alors se prononcer sur la reprise. Cette saisine n’a pas lieu d’être si le conseil municipal avait délégué au maire le pouvoir de reprendre les concessions (L. 2122-22-8° du CGCT). Le maire devra alors publier et notifier cet arrêté. Cette publication devra faire l’objet d’un certificat de publicité certifié par le maire. Le juge est exigeant sur ces formalités (CE 6 mai 1995, Commune d’Arques c/ Mme Dupuis-Matton, précité).

IX - Les exhumations des corps devront-elles systématiquement avoir lieu ?

Non
L’exhumation des corps n’est pas obligatoire, néanmoins, le plus souvent, elle est la raison d’être de cette procédure. Dans ce cas, il convient de noter qu’ici la présence de la famille n’est pas requise et que le personnel chargé de cette mission n’a pas à être habilité. Il suffira que des fonctionnaires surveillent l’opération (R.  2223-51 du CGCT). La chambre criminelle de la Cour de cassation a rappelé qu’au cours de ces travaux de reprise matérielle, le corps et la sépulture sont toujours protégés par le délit d’atteinte à l’intégrité du cadavre et de violation de sépulture visés à l’art. 225-17 du Code pénal (Cass. crim. 25 octobre 2000, X…, pourvoi n° 00-82.152). Les restes exhumés seront reinhumés dans l’ossuaire, sauf si le maire décide d’une crémation, en l’absence d’opposition connue ou attestée, et d’une dispersion dans le lieu aménagé à cet effet du cimetière. S’il n’existe aucun ossuaire, il est possible de décider d’un transfert dans un autre cimetière communal, voire d’une structure intercommunale dont la commune est membre (R. 2223-6 du CGCT). Les noms des personnes ainsi exhumées et inhumées derechef dans un ossuaire seront consignés dans un registre tenu à cet effet et pourront être gravés au-dessus de l’ossuaire, sur un matériau durable.

X - La commune est-elle propriétaire des constructions présentes sur la concession ?

Oui
La commune a une totale liberté pour détruire, utiliser, revendre ces monuments et caveaux de reprise (circulaire n° 93-28 28 janvier 1993, reprenant avis du Conseil d’État, 4 février 1992, EDCE, 1992, p. 409). L’art. R. 2223-20 du CGCT dispose en effet que : "Trente jours après la publication et la notification de l’arrêté, le maire peut faire enlever les matériaux des monuments et emblèmes funéraires restés sur la concession." Ces biens repris feront partie du domaine privé de la commune, qui en disposera comme elle le souhaite. Il convient d’attirer l’attention sur le fait que, si ces monuments demeurent en place à l’issue de la reprise, tout dommage causé par eux, du fait de leur mauvais état, engagerait la responsabilité de la commune qui en est devenue propriétaire.

Philippe Dupuis
Formateur en droit funéraire pour les fonctionnaires territoriaux au sein des délégations du CNFPT

Résonance n°111 - Juin 2015

 

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