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Des funérailles républicaines : oui… mais pas pour tout le monde !

 

L’Assemblée nationale a adopté (texte 846, 30 novembre 2016) une proposition de loi instituant des funérailles républicaines et ne comportant qu’un article : "Art. L. 2223-52 : Chaque commune, dès lors qu’elle dispose d’une salle municipale adaptable, met celle-ci à disposition des familles qui le demandent et garantit ainsi l’organisation de funérailles républicaines qui leur permettront de se recueillir".

Par dérogation au premier alinéa de l’art. L. 2125-1 du Code général de la propriété des personnes publiques, cette mise à disposition est gratuite. À la demande de la famille du défunt, un officier de l’état civil de la commune peut procéder à une cérémonie civile. "Le premier alinéa du présent article s’applique aux familles des personnes visées à l’art. L. 2223-3 du présent Code."

Cette mesure, louable sur le principe, nous permet de rappeler que, dans son article au journal "Le Monde" du 29 octobre 2012, François Michaud-Nérard attirait déjà l’attention sur le fait que "de toute évidence, cela ne peut être seulement le rôle des entreprises commerciales de suppléer les religions ou la République pour donner du sens au moment de la mort d’un proche" et que "chacun devrait avoir le droit de bénéficier d’une cérémonie d’obsèques signifiante, ne serait-ce qu’au nom de la laïcité qui, pour le coup, ne doit pas permettre une distorsion au détriment des non-croyants".

Si nous ne pouvons que le rejoindre dans cette appréciation, encore faudrait-il, mais le travail législatif n’en n’est qu’à ses débuts, que le législateur vienne tout d’abord nous expliquer ce que signifiera une salle "adaptable", surtout, à la lumière de l’emploi du verbe "met", qui implique que, dès lors qu’une famille peut identifier une telle salle, la commune sera obligée de lui octroyer (le présent de l’indicatif valant en droit impératif).

Enfin et surtout, ces funérailles républicaines ne seraient accessibles qu’aux personnes remplissant les conditions de l’art.L. 2223-3 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT), c’est-à-dire uniquement celles remplissant les conditions du droit à inhumation, qui ne sont pas toujours celles pouvant disposer de concessions.

Ainsi, ce service public, facultatif, ne sera pas applicable à ceux qui auront obtenu une sépulture dans une autre commune que celle répertoriée dans cet article. Le diable (apparemment, il peut être laïc) se cachant dans les détails, va-t-on devoir obliger à un transport de corps après mise en bière (dispendieux) ceux qui auront obtenu une concession dans une commune où ils ne disposent pas du droit à inhumation et donc où ils ne pourront revendiquer une cérémonie laïque et républicaine ?

Philippe DupuisDupuis Philippe fmt
Consultant au Cridon, chargé de cours à l’université de Valenciennes, formateur en droit funéraire pour les fonctionnaires territoriaux au sein des délégations du CNFPT.

 

Résonance n°126 - Janvier 2017

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