Le Service Funéraire de l’agglomération lyonnaise, la valorisation de l’éthique et du savoir-faire

Le Service Funéraire de l’agglomération lyonnaise a derrière lui une longue tradition de 119 ans au service des familles en deuil. Respectivement créés en 1906 et 1925, les services municipaux de Lyon et de Villeurbanne ont évolué avec le temps pour donner naissance en 2006 aux Pompes Funèbres Intercommunales (PFI).

En 2016, un nouveau périmètre juridique, sous forme de Société Publique Locale (SPL), permet d’accueillir de nouvelles communes de la métropole, et ainsi de couvrir de nouveaux territoires. Présentes avec des agences à Lyon Berthelot, Croix-Rousse, Grange-Blanche, mais aussi à Bron, Villeurbanne, Corbas, Oullins-Pierre-Bénite et Tassin-la-Demi-Lune, Le Service Funéraire couvre un vaste bassin de population.

Aujourd’hui, 15 communes sont membres du Service Funéraire, une nouvelle appellation qui réaffirme sa mission de service public et de dignité pour tous. Laurent Bosetti, président du Service Funéraire, ne cache pas sa volonté de "visibiliser" le funéraire.

"C’est vrai que le premier étonnement pour un nouvel élu, et non des moindres, c’est l’invisibilisation du funéraire aujourd’hui. Pourquoi le politique ne s’empare-t-il pas de ce secteur, qui est un secteur aujourd’hui délaissé en fait dans le débat public ? D’ailleurs, vous ne trouvez pas beaucoup d’élus qui ont de l’appétence pour être adjoint aux cimetières ou adjoint au funéraire.

Souvent, la fonction n’existe pas. Or les attentes des populations sont nombreuses, notamment le volet humain du deuil, des obsèques, l’accompagnement des familles ; pour prendre un exemple sur la question des cimetières, nous nous sommes interrogés à la Ville de Lyon sur le coût des concessions funéraires, et nous avons mis en place la première tarification sociale et progressive de France sur l’achat de concessions dans les cimetières, souligne Laurent Bosetti, et d’ajouter : "Il y a la question aussi des carrés confessionnels, il y a également la question des personnes dépourvues de ressources suffisantes, il y a beaucoup de sujets, on va dire sociétaux, sociaux, et la question de la transition écologique sur laquelle on a aussi investi le débat politique. Voilà mon premier rapport d’étonnement, c’est donc de visibiliser le funéraire et de le politiser, c’est-à-dire de le réintroduire dans le débat de la sphère publique.

Ensuite, il y a la problématique, la stratégie, justement, en tant que politique, quand on regarde le "marché de la mort", je vais l’appeler comme ça, parce que c’est devenu un authentique marché aujourd’hui, un marché commercial avec des concurrents, des grands groupes, des enseignes familiales, des opérateurs publics comme nous.

Sur ce point, il y a un constat qui est mis en avant par la Cour des comptes dans un rapport de 2019 : les prix du secteur funéraire se sont envolés depuis sa libéralisation en 1993, ce qui n’était pas le but initial du législateur. L’esprit du texte était notamment de pouvoir réduire les prix par le jeu de la concurrence ; ce ne fut hélas pas le cas. Se pose alors la question des familles devenues pour un temps vulnérables et parfois soumises à des pressions qu’elles ne gèrent pas au mieux de leurs intérêts matériels et moraux compte tenu des événements qu’elles traversent.

En tant que service funéraire public, nous avons en réponse une éthique, un devoir de dignité essentiel qui se traduit par un accompagnement loyal. Quand on est élu et quand on est un service public, il y a cette exigence primordiale d’être le plus transparent possible, de proposer ainsi des tarifs qui soient les plus justes possibles, parce que, comme nous n’avons pas d’actionnaires ni de fonds de pension à rémunérer – et je le dis d’ailleurs sans agressivité aucune –, du coup, il n’y a pas de surintérêt lucratif.

Certes, il y a un intérêt général à défendre, des établissements publics à moderniser, à investir sur les salariés, mais ce n’est pas tout. Répondre aux justes besoins, au juste prix, c’est une garantie, une protection pour l’usager et un engagement évidemment pour nous, élus, à proposer un service funéraire digne et transparent en termes de tarifs, c’est notre mission", conclut Laurent Bosetti, président du Service Funéraire.

Sous la conduite de Grégory Feler, chargé des relations externes du Service Funéraire, en compagnie de Julia Dardilhac, responsable des chambres funéraires (Lyon, Villeurbanne, Corbas, Écully), Yves Pijew, responsable du service convoi, Margaux Lavalette, responsable du service fossoyage, Izzedine Fridhar, responsable du crématorium de Lyon, ce sont plus de 80 participants à cette Journée Portes Ouvertes qui découvrirent les parties publiques et professionnelles de la chambre funéraire de Lyon Berthelot, mais également du crématorium situé à quelques minutes de l’équipement public au cœur du cimetière de la Guillotière, sans oublier les moyens logistiques utilisés quotidiennement pour la réalisation des transports de corps et des obsèques.

Techniciens et agents s’étaient mobilisés pour répondre aux nombreuses questions, tant de gestion que de maintenance de ces équipements publics. L’après-midi fut consacré à des thématiques variées et d’actualité, et se distingua par de très nombreuses interventions d’une assistance particulièrement intéressée non seulement par les sujets, mais également par le traitement présenté par les conférenciers.

Animée par Me Xavier Anonin, avocat au barreau de Paris, cette session s’attacha à définir les origines des crises vécues par la profession funéraire dans un passé récent, mais également à en tirer les leçons d’un point de vue de l’organisation des services, mais aussi par les réponses appelées d’un point de vue législatif et réglementaire.

Des canicules de 1976 et de 2003 à la pandémie de la Covid en 2020 et 2021, les services et les populations furent soumis à rude épreuve. Une présentation chronologique des événements mit en valeur la montée en puissance dramatique des détresses et failles humaines et d’organisation, mais surtout les leçons à en tirer.

Les apports de l’expérience sur ces différentes crises mettent désormais en valeur 3 types de normes : des règles dérogatoires conjoncturelles provisoires, des règles dérogatoires structurelles pérennisées dans l’après-crise et des règles structurelles postérieures pour mieux armer le droit face aux crises futures.

Anticiper les crises, un devoir des collectivités locales de transposition des règles nationales au niveau de leur périmètre, une exigence sociale, humaine et de dignité trop souvent absente lors de ces événements. Me Xavier Anonin, très au fait de cette problématique, sut captiver son auditoire, comme en témoignent les nombreuses questions qui découlèrent de son exposé.

Me Antoine Carle, avocat associé au sein du cabinet Novlaw à Lyon, est spécialiste en droit public des affaires, en droit des collectivités territoriales et en droit funéraire. Sa présentation s’attacha à définir les droits et devoirs en matière de concessions funéraires, une législation ancienne puisqu’elle remonte à l’Empire, même si d’autres textes viennent actualiser ces dispositions.

Quelle nature juridique, quelles conditions d’octroi, mais également la transmission familiale des concessions funéraires ab intestat ou par legs, donation, rétrocession à la commune ? … Un véritable maquis juridique pour le non-initié qui imposait une explication claire et détaillée.

Dans ce cadre, quelles sont les pratiques possibles, et surtout quelles sont les évolutions ? Autant de questions soulevées par les participants à cette table ronde, où Me Antoine Carles fit la démonstration de sa parfaite maîtrise de ce sujet "perpétuel".

Il fallait bien un expert comme Edlecio Moreno, psychologue exerçant à Vénissieux/Vernaison, pour aborder ce sujet délicat et sensible du deuil des enfants. Tous les professionnels présents étaient particulièrement attentifs et sensibilisés à cette thématique particulièrement douloureuse où l’accompagnement et le juste conseil prennent tout leur sens. Quelles sont les différentes phases du deuil et quels moyens de reconstruction proposer à la personne en souffrance ?

La courbe de Kübler-Ross renseigne précisément les différentes étapes de ce voyage au pays de la perte. Du choc au déni, de la colère à la tristesse, de la résignation à l’acceptation, se profile enfin la reconstruction. Le trajet est toujours délicat pour un adulte, que dire d’un jeune enfant… Mesurer l’approche et les réponses à apporter à chaque personnalité a sa capacité d’absorption de cet épisode, qui ne comporte pas de recettes toutes faites, mais bien d’une écoute profonde, individuelle et empathique, de douceur et de parole.

Martin Julier-Costes est docteur en sociologie de l’Université de Strasbourg et chercheur associé à l’Université de Bourgogne. Il est formateur à l’Institut de Formation en Travail Social (IFTS) d’Échirolles, en Isère. Ses axes de recherche se concentrent en grande partie sur l’univers funéraire. Sa présentation à Lyon fit l’état de l’art en matière funéraire, tant au niveau des pratiques, que des modes de transport ou encore des soins de conservation, dont on sait la nature particulière des produits de conservation temporaire d’un défunt(e) en attente de funérailles.

Un regard fut porté sur les nouvelles initiatives de traitement des corps et mode de sépulture. La terramation, ou humusation, développée notamment en Belgique, fut analysée. Pratiques, conséquences environnementales, polémiques, acceptation de la part du public, autant de questions qui se posent chaque fois qu’un nouveau mode de sépulture autre que l’inhumation pleine terre ou en caveau, ou la crémation, se présente. De toute évidence, le chemin sera long pour ces nouvelles pratiques.

S’ensuit un panorama des habitus funéraires qui varient d’un pays à l’autre de l’espace européen, tant dans les modes de sépulture que par la gestion des cimetières ou des crématoriums. La gestion des rejets atmosphériques étant désormais maîtrisée et encadrée du point de vue législatif et réglementaire, il reste donc à faire évoluer les mentalités pour de nouvelles solutions respectueuses de l’environnement… ce qui se révélera le plus délicat et de long terme.

Les services funéraires de l’agglomération lyonnaise, sous l’appellation "Le Service Funéraire", s’inscrivent résolument dans la dynamique de l’esprit public. Intérêt général, bien commun, éthique et transparence, respect et loyauté, la découverte (ou redécouverte) de ce service funéraire démontre que le service public bien compris a non seulement toute sa place dans le schéma funéraire économique national, mais qu’il occupe avec intelligence et vision le territoire des exigences des populations.

Retenons en conclusion les propos du président Laurent Bosetti, qui vient tordre le cou aux images souvent péjoratives du funéraire : "La rémunération variable de nos conseillers funéraires ne s’effectue pas sur le volume de vente, mais uniquement sur la satisfaction de l’usager." C’est cela, l’éthique du service public, et c’est bien compris des familles.