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Comme il est de coutume au début du printemps, le SIFUREP(1) organisait le 18 avril dernier à Paris son colloque annuel, avec, pour thème, pour cette nouvelle édition, la restauration du patrimoine sépulcral et de l’art funéraire. Étaient conviées un panel de personnalités connues pour leur expertise dans ces domaines à s’exprimer. Différents aspects de la thématique furent abordés, apportant notamment des réponses juridiques et financières…
SIFUREP 1

… Furent également partagés des exemples de rénovations réussies, des témoignages donnant un éclairage constructif sur ce type de chantier, et des avis d’experts mettant en avant l’importance de la préservation de ce patrimoine et la nécessaire transmission aux générations futures.

Pour alimenter les exposés et les échanges de cette matinée studieuse – animée par Sarah Dumont (fondatrice de Happy End) –, étaient donc présents : Me Marie-Hélène Pachen-Lefèvre,  avocate spécialiste du droit public au sein du Cabinet SEBAN ; Hervé Lancelot, délégué Île-de-France de la Fondation du Patrimoine ; Yves Messier, consultant auprès des collectivités locales et formateur ; Isabelle Prigent, conservatrice du cimetière de Levallois-Perret et présidente de l’Association Nationale des Personnels de Cimetière (A.NA.PE.C.) ; Arnaud Shoonheere, chef de la cellule patrimoine au Service des cimetières de la Ville de Paris.

Au départ sont les concessions échues ou abandonnées

Mais, en préambule, il y eut d’abord l’allocution de Jacques Kossowski, président du SIFUREP. Celui-ci apprécia à sa juste valeur l’arrivée de nouveaux adhérents, et donna un rapide éclairage sur les raisons du choix de la thématique "Restauration du patrimoine sépulcral et de l’art funéraire" qui se trouve être en toute logique dans la continuité du précédent colloque intitulé "Penser les cimetières", celui-ci ayant eu lieu début juin, l’année dernière.

S’ensuivit l’intervention instructive de Me Marie-Hélène Pachen-Lefèvre sur les aspects réglementaires, apportant, entre autres, de nombreuses réponses juridiques. Elle rappela que les concessions échues ou abandonnées peuvent être reprises par la commune si trois critères se vérifient en même temps : avoir plus de trente ans d’existence, que la dernière inhumation date de plus de dix ans et que des signes extérieurs d’abandon, de défaut d’entretien, soient visibles. Ces reprises se font alors dans le cadre d’une procédure bien encadrée répondant à un processus réglementaire strict (voir notamment Résonance nos 176 et 179).

DSC 3225 INTERVENANTS

Donner une seconde vie aux monuments et objets funéraires

Dans le cadre de ces reprises de concessions est évoquée ensuite la récupération de monuments funéraires ou cinéraires dont une partie entre aujourd’hui sur le marché de l’occasion. En effet, acquérir une pierre tombale peut s’avérer coûteux. C’est l’une des raisons pour lesquelles une start-up nantaise, Memorio, a décidé de s’engouffrer dans ce secteur économique. Créée en 2021, cette jeune entreprise, qui en augure sans doute d’autres dans les prochains mois, a développé une plateforme d’e-commerce proposant des monuments et des objets funéraires revalorisés.

L’objectif est de mettre à la disposition des mairies et des professionnels un système organisé – avec des services complémentaires adaptés aux besoins des familles (personnalisation, remontage, livraison, etc.) – offrant une seconde vie à leurs monuments funéraires ; et de permettre aux acheteurs d’identifier un moyen d’acquérir un monument à un prix plus abordable, cela répondant bien sûr à des préoccupations économiques. La problématique écologique trouve également ici sa place, l’empreinte carbone étant notamment plus faible dans la revente, du fait que les éléments en granit ne viennent pas, pour cette réutilisation, de l’autre bout du monde.

Une fondation pour soutenir et valoriser le patrimoine

Si l’on considère que le funéraire est patrimonial, la Fondation du Patrimoine a évidemment toute sa place dans la conservation et la restauration de ses composantes les plus remarquables. Hervé Lancelot a expliqué en détail, à l’assemblée attentive, le principe de la collecte de dons, mode d’action privilégié de la Fondation. Ce dispositif collaboratif populaire contribue à réduire la part d’autofinancement du maître d’ouvrage pouvant aller jusqu’à 15 % du montant total. Cela s’adresse aux collectivités locales, aux organismes publics, aux associations, ainsi qu’aux particuliers sous certaines conditions.

Venant compléter ce dispositif, le "label" de la Fondation (attribué pour cinq ans) est destiné aux propriétaires privés et permet à ceux-ci de bénéficier de subventions et d’aides sous forme de déductions fiscales pour des travaux de restauration de patrimoine, comme ceux pour une chapelle ou un monument funéraire. En effet, le label reconnaît l’intérêt patrimonial d’un immeuble privé non protégé au titre des Monuments Historiques, bâti ou non bâti (parcs, jardins, cimetières), situé dans les zones rurales, bourgs et "petites" villes de moins de 20 000 habitants… ou en site patrimonial remarquable (SPR).

Vous trouverez les informations complètes (critères d’éligibilité, avantages, méthodes de soumission de projet, etc.) sur le site "www.fondation-patrimoine.org". Au moment de la rédaction de cet article, plus d’une dizaine de projets avec appel aux dons sont à découvrir sur ce site, allant de la chapelle du cimetière de Sainte-Adresse (76) à l’alignement Koechlin n° 2 au cimetière de Mulhouse (68) en passant par le Calvaire de Lestiala situé à Plomeur (29) ou encore la tombe d’un officier napoléonien à Selles-sur-Cher (41).

Des aides à la fois pécuniaires et humaines au service de l’art

D’autres soutiens peuvent accompagner les rénovations d’œuvres funéraires. D’une part, la Fondation pour la Sauvegarde de l’Art Français, reconnue d’utilité publique, qui apporte aux propriétaires d’édifices ou d’objets d’art en péril, publics ou privés, l’aide d’une expertise reconnue et des concours financiers sous forme de don, de legs ou de mécénat. Cela concerne tout particulièrement les monuments construits avant 1800 et non classés, accessibles à tous et gratuitement. Les demandes s’effectuent sur le site "www.sauvegardeartfrancais.fr/".

D’autre part, l’association "Les Appels d’Orphée" (à but non lucratif) qui forme annuellement des stagiaires à la sauvegarde du patrimoine funéraire. Fondée en 1977, son action – récompensée en 1995 par le prix national de la Caisse nationale des monuments historiques – vise à protéger le patrimoine funéraire du XIXe siècle et à le faire mieux connaître du public. Encadrés par des restaurateurs professionnels, les bénévoles s’initient à la restauration de la pierre et à la déontologie de la "conservation restauration" des monuments. Les Appels d’Orphée organisent chaque année (depuis 1987) des stages de restauration de monuments funéraires dans les cimetières de Paris. Réalisations à découvrir et informations sur "www.appels-orphee.org".

Rendre possibles ces chantiers pour une transmission réussie du patrimoine

Démonstration concrète de l’utilisation de ces appuis financiers et techniques, sont ensuite effectués des partages d’expériences et présentés des exemples de rénovations réussies ou en cours. Chantiers notables à retenir (liste bien sûr non exhaustive) :
- La chapelle sépulcrale de la comtesse Potocka (1845) dans le cimetière de Montmartre, du fait de son classement comme monument historique, a bénéficié pour 1/3 de subventions de l’État.
- La restauration de la chapelle avec vitraux de Sainte-Adresse est, quant à elle, issue d’un projet familial, la famille Riot l’ayant rachetée pour leur défunte fille Annabelle. Elle la rénove actuellement, et un appel aux dons a été mis en place sur le site de la Fondation du Patrimoine. Fin prévue en décembre 2023.
- Enfin, représentative de l’art funéraire contemporain, la chapelle Nahra, érigée en 2022 au Père-Lachaise, en hommage à Élias Nahra (homme d’affaires franco-libanais), a été conçue par l’équipe de la Maison Rebillon (Groupe FUNECAP), accompagnée du sculpteur Gérard Lartigue, et validée par l’architecte des Bâtiments de France et le conservateur du cimetière du Père-Lachaise. Celle-ci est à noter pour la preuve qu’elle représente de la persistance d’un véritable art funéraire français.

D’une manière générale, le colloque 2023 de la SIFUREP fut démonstratif et d’un apport riche d’enseignements pour l’ensemble des représentants de collectivités locales présentes, avec, sous-jacente, une réelle préoccupation de la transmission des monuments et de l’art funéraire dans le meilleur état possible aux générations futures.
 
Gil Chauveau
 
Nota :
(1) Syndicat Intercommunal Funéraire de la Région Parisienne.

Résonance n° 191 - Mai 2023

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations