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À l’occasion du dernier salon FUNÉRAIRE PARIS, nous présentions le premier ouvrage de Xavier Anonin consacré à la formation des conseillers funéraires. Dans la perspective de sa réédition en 2021, ainsi que de la parution du tome 2 consacré à la législation funéraire et du tome 3 dédié à la marbrerie, Résonance présente ce mois-ci un extrait du tome 1 qui constitue le cœur du sujet de l’ouvrage : le rôle du conseiller funéraire et la prise en charge des familles dans l’organisation des obsèques.


I - Le rôle du conseiller funéraire

Par facilité, on pourrait être tenté de définir le rôle du conseiller funéraire par analogie avec d’autres métiers mieux connus : chef d’orchestre, logisticien, commercial, vendeur, psychologue, etc. Cependant, le métier de conseiller funéraire n’est pas la somme d’une succession de "morceaux" puisés dans d’autres professions. Il a une existence et une définition propres. La principale difficulté pour le définir réside dans le caractère multitâche du métier et dans la polyvalence de son exercice.

L’expression "conseiller funéraire" s’est imposée au cours de la dernière décennie, remplaçant ainsi progressivement les termes "assistant funéraire" ou "régleur" (bien que ces expressions n’aient pas totalement disparu du langage courant de la profession). 

L’expression "conseiller funéraire" est aujourd’hui présente dans le Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) dans ses articles relatifs aux diplômes et capacités professionnels. Sur le plan réglementaire, le conseiller funéraire se caractérise au premier chef par le fait qu’il est "chargé de déterminer directement avec les familles l’organisation et les conditions de la prestation funéraire" (art. D. 2223-55-2 du CGCT). Le contenu de la formation recouvre également celui relatif au poste de maître de cérémonie ("coordination du déroulement des diverses cérémonies qui ont lieu de la mise en bière jusqu’à l’inhumation ou la crémation d’un défunt"). 

Le Répertoire Opérationnel des MÉtiers (ROME), développé par Pôle emploi en partenariat avec les branches professionnelles et les représentants des principales entreprises, présente les savoir-faire de base du métier de "conseil en services funéraires" (code : K2602) de la façon suivante :

- Informer et conseiller la personne, la famille sur le choix des prestations funéraires ; 
- Déterminer avec la famille l’organisation et les conditions de la prestation funéraire (jour, choix du cercueil, ornements...) ; 
- Encaisser le montant d’une vente ; 
- Vérifier la conformité de la livraison ; 
- Ordonnancer des obsèques ; 
- Aménager une salle funéraire ; 
- Coordonner une équipe d’intervenants ; 
- Organiser des démarches administratives post-mortem ; 
- Vérifier les conditions d’inhumation ; 
- Renseigner les supports administratifs relatifs à l’admission en chambre funéraire, l’inhumation, la crémation ; 
- Accompagner et guider des personnes, la famille, le cortège le jour des obsèques ; 
- Réaliser la cérémonie funéraire et contrôler la conformité de son déroulement.

Les savoirs théoriques permettant l’acquisition de ces savoir-faire sont définis à l’art. D. 2223-55-4 du CGCT. Ils composent le programme de la formation théorique, d’une durée minimum de 140 heures :
- Hygiène, sécurité et ergonomie ; 
- Législation et réglementation funéraires ; 
- Psychologie et sociologie du deuil ; 
- Pratiques et rites funéraires ; 
- Conception et animation d’une cérémonie ; 
- Encadrement d’une équipe ; 
- Produits, services et conseil à la vente ; 
- Réglementation commerciale. 

Cette formation théorique est complétée par une formation pratique d’une durée minimale de 140 heures (art. D. 2223-55-5 du CGCT), visant à l’acquisition des savoir-faire pratiques. L’ensemble de la formation est enfin sanctionné par un examen à l’issue duquel est délivré le diplôme de conseiller funéraire. 

On peut néanmoins regretter que deux aspects du métier de conseiller funéraire ne soient pas spécifiquement contenus dans la composition de la formation (et de la fiche métier) : la marbrerie funéraire et la prévoyance obsèques. Ces deux activités sont pourtant particulièrement techniques, et mériteraient d’être largement développées. 

La notion de marbrerie funéraire recouvre non seulement la vente de monuments, mais également l’ensemble des travaux de cimetière. Le plus souvent, ils engagent la famille sur de très longues périodes (plusieurs décennies) en raison de la durée des concessions funéraires. De plus, lorsqu’un monument est posé, il n’a, a priori, pas vocation à être changé, et se transmettra d’une génération à l’autre. Le rôle d’accompagnement du conseiller funéraire est donc primordial lorsqu’une famille choisit de lui confier son projet de monument. En outre, le conseiller funéraire est l’interlocuteur privilégié dans l’assistance des familles à la gestion de leurs concessions.

On le voit donc, le métier de conseiller funéraire requiert l’acquisition de nombreux savoirs et savoir-faire interdépendants sur des registres très divers. Si son cœur de métier demeure la relation commerciale avec les familles et l’organisation des obsèques, la réussite de celles-ci implique nécessairement une capacité à mettre en œuvre les prestations proposées. Pour y arriver, le conseiller funéraire devra être capable d’entretenir des relations privilégiées avec les nombreux acteurs intervenant dans la réalisation des opérations funéraires : chambres mortuaires et funéraires, mairies, conservations des cimetières et crématoriums, mais également avec ses fournisseurs et sous-traitants.

Le développement très important de la sous-traitance fait en quelque sorte "perdre la main" sur la réalisation des prestations vendues par le conseiller funéraire. Le suivi de la qualité avec les acteurs de sous-traitance est donc primordial, et la présence régulière sur le terrain largement souhaitable. 

De par son rôle central dans les activités funéraires et sa relation commerciale directe avec les familles, le conseiller funéraire doit se positionner comme l’acteur principal de l’évolution du marché, et non comme un simple figurant reclus dans son agence. Qu’il soit dirigeant ou salarié, il doit être à l’écoute de l’évolution des attentes des familles, se tenir informé des innovations, et être attentif aux actions commerciales de la concurrence.

Les PF Tome 1 Couv

II - La prise en charge des familles dans l’organisation des obsèques

L’accueil et la prise en charge d’une famille

Le quotidien du conseiller funéraire est fortement rythmé par la fluctuation des décès. Ainsi, la charge de travail du conseiller peut être très irrégulière dans le temps, en passant de longues périodes d’activité très réduite à des périodes de reprise d’activité très intenses. Le conseiller doit donc être capable de pouvoir se mobiliser à tout moment pour prendre en charge une ou plusieurs familles, parfois dans des intervalles de temps très restreints, tout en s’assurant du bon déroulement de convois d’obsèques en cours et en répondant présent aux sollicitations de clients relatives à des prestations moins urgentes (articles funéraires, monuments, prévoyance obsèques, etc.).

L’accueil d’une famille doit être adapté

En effet, quel qu’en soit le motif, on ne passe pas la porte pour entrer dans une agence de pompes funèbres comme on la passe dans un commerce quelconque. C’est ainsi que l’accueil de la famille ne doit pas être précipité si le conseiller funéraire est occupé par d’autres tâches. Pendant le temps de réception d’une famille, le conseiller doit faire en sorte de pouvoir s’y consacrer à 100 % en limitant les interruptions pour traiter d’autres sujets. Cette exclusivité d’attention est la clé de la mise en place de la relation de confiance qui doit impérativement s’établir entre le conseiller funéraire et la famille.

La définition des priorités et le traitement des urgences

Dans la première partie de l’entretien avec la famille, le conseiller funéraire va devoir définir les priorités et les urgences pour pouvoir les expliquer à la famille et prendre les premières décisions. Cette phase constitue pour la famille la première étape concrète de l’organisation des obsèques. Elle doit soulager (sentiment de prise en charge) et non provoquer un stress supplémentaire pour la famille (sentiment d’oppression).

Cependant, certaines décisions devront être prises rapidement, notamment s’il y a lieu de transporter le corps dans une chambre funéraire. Pour autant, les premières mesures ne peuvent être appréhendées seules, mais doivent au contraire s’inscrire dans l’organisation globale des obsèques. C’est la raison pour laquelle le scénario du convoi doit, au moins dans ses grandes lignes, être défini le plus tôt possible. Il donnera notamment un cadre à l’élaboration du devis.

Le scénario des obsèques

Il s’agit de définir avec la famille ce qu’elle envisage pour le déroulement des obsèques, mais également de s’assurer que sa demande est conforme aux dernières volontés du défunt (l’existence éventuelle d’un contrat de prévoyance obsèques pourra également renseigner sur ce point). On définira les différentes stations du convoi : lieu de mise en bière (avec ou sans transport en chambre funéraire), type et lieu de cérémonie (civile ou religieuse), mode et lieu de sépulture (inhumation ou crémation) et, le cas échéant, destination des cendres.

Il est également important de s’assurer qu’il n’y a pas de désaccord au sein de la famille et, s’il y a lieu, d’animer et de guider le débat entre les membres de la famille (possibilités, avantages, inconvénients et éventuelle complexité d’organisation de telle ou telle option, surcoût, etc.). Les grandes lignes du scénario étant posées, le conseiller funéraire devra ensuite en étudier la faisabilité.

Étude de la faisabilité du scénario

II y a souvent un décalage entre les souhaits de la famille et leur faisabilité. Cela nécessitera un travail de compromis entre l’entreprise (qui devra s’efforcer de satisfaire au mieux les souhaits de la famille) et la famille elle-même, qui devra être accompagnée dans les adaptations de son projet (sans générer de frustration). Les contraintes peuvent être multiples : impossibilité administrative d’obtenir une concession dans le cimetière souhaité, impossibilité d’inhumer dans la sépulture souhaitée, indisponibilité des équipes opérationnelles, de l’église ou du crématorium aux dates et heures souhaitées par la famille, budget de la famille insuffisant, etc.

Dans tous les cas, le conseiller funéraire devra s’efforcer d’être à l’écoute de la famille pour "coller" au plus près de ses souhaits en proposant des alternatives. Cette étape est avant tout pédagogique. Elle a vocation à définir un scénario réalisable et à permettre à la famille de se l’approprier.

L’établissement du devis de base

Outre son caractère obligatoire (et normé), l’établissement du devis est un moment crucial à plus d’un titre. D’abord, il pose la relation commerciale qui va s’établir entre la famille et le conseiller funéraire. Ensuite, par l’écrit, elle donne un caractère concret à l’organisation des obsèques. Enfin, elle constitue la première étape du choix définitif des prestations. La discussion autour du devis est en quelque sorte un moment de synthèse qui permet au conseiller funéraire de récapituler formellement les échanges qu’il vient d’avoir avec la famille.

En outre, il permet de s’assurer de ses choix et de ce qu’ils impliquent en termes d’organisation et de budget à prévoir. Souvent, quelques modifications devront être apportées au devis, et parfois, la famille sollicitera plusieurs devis comparatifs pour faire son choix (inhumation vs crémation, construction de caveau vs inhumation en pleine terre, etc.).

Pour pouvoir mettre en œuvre les premières prestations, le devis signé par la famille doit obligatoirement être suivi de l’établissement d’un bon de commande. Outre les prestations à réaliser le jour des obsèques, ce bon de commande reprend également les premières mesures plus urgentes qui seront mises en œuvre par l’entreprise de pompes funèbres à la demande de la famille, telles que le transport de corps avant mise en bière, la préparation du corps (toilette ou soins de conservation) ou encore les frais de séjour en chambre funéraire.

La détermination de la date des obsèques

Elle est cruciale, et nécessite que l’on s’y attarde. S’il est généralement admis que le travail de deuil commence réellement après les obsèques, il serait erroné de croire que les obsèques doivent être réalisées au plus vite. Et ce n’est d’ailleurs pas ce que souhaitent les familles en général lorsque l’on prend le temps de les écouter. Les obsèques doivent donc être réalisées au bon moment, et ce moment se détermine dans l’échange avec la famille.

Souvent, il y a des contraintes liées à des membres de la famille habitant loin et venant spécialement pour assister aux obsèques. Parfois, la famille a besoin d’un peu de temps pour reprendre ses esprits après l’annonce du décès. Il n’y a donc pas forcément lieu de précipiter l’organisation, ni de craindre que la famille déciderait de recourir à une autre entreprise si les délais proposés paraissent un peu longs. Mais le choix de la date (et de l’heure) peut se trouver imposé par les intervenants extérieurs – indisponibilité du prêtre, indisponibilité du crématorium – ou bien encore par les délais de construction d’un caveau. 

En tout état de cause, il conviendra de définir la date des obsèques en fonction des souhaits réels de la famille, et non supposés. Le conseiller funéraire devra également tenir compte des tâches et démarches à réaliser pour en assurer l’organisation dans de bonnes conditions (démarches administratives, livraison du cercueil et de l’urne, etc.). Des obsèques réalisées à la hâte (sans marge de sécurité) exposent à des risques d’incidents évitables : caveau non terminé à temps, erreur dans la livraison du cercueil, etc. 

Le financement des obsèques 

Si le sujet peut apparaître délicat, l’entreprise de pompes funèbres est une entreprise comme les autres, et ne bénéficie à aucun titre d’avantages sociaux ou fiscaux (à l’exception d’un taux de TVA de 10 % sur le transport de corps). De plus, les entreprises sont soumises à un contexte concurrentiel parfois très tendu sur certains secteurs géographiques. Il est donc indispensable, lors de l’organisation d’obsèques, de s’assurer de la solvabilité de la famille, mais également de délais de paiement raisonnables. 

Les sources de financement des obsèques peuvent être multiples. Les plus courantes sont le paiement direct de la facture par les proches du défunt, mais les entreprises de pompes funèbres peuvent également prélever (avec l’accord de la famille) une somme maximale de 5 000 € sur un compte bancaire personnel du défunt. Ce dernier mode de paiement, très courant en pratique, présente cependant un risque : l’insuffisance de provision. 

Lorsque le défunt avait souscrit un contrat de prévoyance obsèques, la facture sera réglée par l’assureur (à concurrence du capital assuré revalorisé), de même si le défunt disposait d’un contrat d’assurance-décès prévoyant le paiement direct de la facture aux pompes funèbres. Si le défunt était encore en activité professionnelle, ses proches pourront également percevoir le capital-décès versé par l’assurance-maladie (3 472 E depuis le 1er avril 2020, si le défunt était salarié). Enfin, il faut éviter le règlement de la facture par le notaire en charge de la succession en raison des délais très longs de règlement (de l’ordre de plusieurs mois). 

Il convient de rappeler pour conclure que les frais d’obsèques constituent une dette alimentaire. Il en résulte que les ascendants et descendants du défunt seront tenus de procéder au règlement des obsèques, même s’ils ont refusé la succession. Pour les personnes dépourvues de ressources, les frais d’obsèques seront pris en charge par la commune de décès. 

Xavier Anonin
Docteur en droit

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations