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Le funéraire est-il inflationniste ? C’est la question posée au regard d’enquêtes croisées sur les tarifications diverses constatées auprès des opérateurs funéraires mais également des indépendants du funéraire. Lilian Delaveau, fondateur et CEO de la plateforme digitale "life-obsèques.fr", fait office, par la nature de son activité, d’observatoire attentif des tendances du marché, une évolution dont les résultats sont partagés ou notamment le dernier rapport de la Banque Centrale Européenne (BCE). Explications…
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Nous vivons un monde de crises, et celles-ci se multiplient au rythme d’une cadence sans précédent. À peine le temps de souffler et de se dire que le pire est derrière nous, que déjà se profile à l’horizon un autre événement qui impacte lourdement l’activité économique, sanitaire, diplomatique ou sociale de notre nation. Ces soubresauts à répétition ont des conséquences majeures sur nos vies, à commencer par l’activité des entreprises. Le segment funéraire n’est pas épargné. La façon, et surtout le traitement accordé aux personnes défuntes, sont des excellents marqueurs du monde des vivants, et de ce point de vue, le constat est saisissant.

L’inflation, question de valeurs

L’inflation, tout le monde sait de quoi il s’agit, ou plutôt nous sommes tous avec une vision particulière du sujet, mais pas nécessairement parallèle. Dans une économie de marché, les prix des biens et des services varient. Certains augmentent, d’autres diminuent. On parle d’inflation lorsque les prix augmentent globalement, et non uniquement les prix de quelques biens et services. Quand tel est le cas, avec le temps, chaque euro permet d’acheter moins de produits. La valeur de l’argent est donc le centre du problème, et engendre des effets pernicieux, souvent à retardement. Pour ce qui est du monde funéraire, les opérateurs sont pris en étau entre la hausse des prix des matières premières et la chute réelle du pouvoir d’achat des familles. Bien que de nombreuses initiatives de la profession soient mises en œuvre, c’est bien le modèle français funéraire qui semble menacé.

Analyser toutes les données pour bien comprendre

L’élaboration du sens en domaine contextuel, comme celui de la crise par exemple, commence par un recueil de données auprès des entités représentatives du marché. "Ces entités sont de tailles variables, afin d’affiner la recherche et de bien cerner qui est impacté, comment et à quel niveau", souligne Lilian Delaveau, CEO de "life-obsèques.fr" et d’ajouter : "Nous avons axé notre observation sur trois axes : les coûts, les prix et l’évolution du rapport avec les familles". 83 réponses qualifiées ont été obtenues pour ce qui est de l’enquête quantitative. Les dirigeants d’entreprises de pompes funèbres ont été sollicités notamment par le réseau LinkedIn. Sur ce volet quantitatif, 23 témoignages écrits sont venus compléter les données recueillies.

Globalement, les opérateurs ont immédiatement compris que la priorité était de protéger les familles et, ce faisant, leur activité par rebond. Le dernier choc économique récent a été d’importance, et s’est traduit par l’augmentation significative des matières premières, de l’énergie et du transport. Au début de la crise et possiblement par vision optimiste, la tendance générale était que "ça n’allait pas durer". Or, les enseignements des crises précédentes nous apprennent que ce que nous avons tendance à imaginer du domaine conjoncturel se traduit en réalité par un bouleversement structurel inévitable avec lequel il va falloir repenser le modèle économique des structures du secteur.

Flux et reflux, la crise s’installe

Pour imager le propos, faisons-nous une représentation de la crise comme une succession de vagues qui vont et viennent à vitesses différentes en touchant différentes parties de la société. Bien que la BCE, dans ses prévisions, annonce une baisse progressive des coûts des matières premières à l’aube de 2024, il faut également considérer qu’il faudra plusieurs mois pour résorber les produits réalisés à des tarifs supérieurs par les fabricants, en suivant la chaîne de distribution puis des revendeurs. La conséquence directe de ce phénomène aura bien évidemment des effets nocifs sur le pouvoir d’achat, mais également des investissements. L’onde de choc s’étant installée, elle se fera ressentir durablement, à n’en pas douter. C’est le sentiment d’une grande majorité d’opérateurs funéraires, plutôt réalistes dans leurs analyses.

La résilience des opérateurs funéraires en jeu

L’enquête menée démontre la grande empathie des opérateurs envers leurs familles. Il y a un réel attachement et une preuve supplémentaire de leur responsabilité sociétale envers la mission funéraire de service aux populations. Le choix de la profession a été globalement de réduire ses marges en ne répercutant pas, ou que partiellement, les augmentations subies afin de préserver les familles. Cette action connaît toutefois ses limites du fait de la longueur de la situation de crise. L’impact de celle-ci sur les entreprises fait que ce constat d’absorption ne peut être que de court terme, la réalité économique s’impose aux opérateurs avec son cortège de devoirs, dont le premier est de faire face à ses propres engagements d’entreprise vis-à-vis des tiers bancaires et/ou institutionnels. Il est donc évident que l’on se dirige à brève échéance vers un partage de la hausse des coûts entre familles et opérateurs, c’est en tout cas l’avis de 69 % des réponses à l’enquête.

Savoir faire des choix dans le respect des familles, une nécessité

S’adapter à un monde en crise qui impacte durablement les populations a des conséquences immédiates et accrues. Les familles se sont transformées en véritables consommateurs du funéraire, n’hésitant pas à demander des remises, à faire jouer la concurrence au centime d’euro près, et, bien souvent, exigent des paiements échelonnés. La conclusion de cette investigation démontre clairement que le domaine funéraire ne s’est pas affranchi des effets de la crise, bien au contraire. Inflation = négociation. Il est à l’honneur de la profession funéraire de constater que celle-ci s’est montrée réactive et résiliente, agissant avec humanité et empathie afin que le temps des obsèques reste celui de la dignité, accessible à toutes et tous. Ceci passe par l’émergence de nouveaux produits et services. "L’heure est donc à la créativité efficiente dans le respect des intérêts matériels et moraux des familles qui font appel aux opérateurs, petits ou grands, enseignes ou indépendants, sachant faire preuve une fois de plus de solidarité et de partage dans les temps mauvais", conclut Lilian Delaveau.
 


Résonance n° 197 - Novembre 2023

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations