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Acteur dynamique au sein de la Chambre Syndicale Nationale de l’Art Funéraire (CSNAF) et entrepreneur aux convictions fortes, Sylvestre Olgiati nous parle de son métier, du marché des plaques funéraires, avec quelques premières impressions d’après-salon, et un regard toujours aussi pertinent sur le devenir du cimetière et des objets du souvenir. Rencontre avec un homme audacieux et impliqué dans les problématiques de sa profession.

 

SYLVESTRE OLGIATI 2019Résonance : FUNÉRAIRE PARIS 2019 a fermé ses portes il y a à peine un mois... Peut-on dégager quelques grandes lignes, sans parler de bilan, bien sûr, ce serait prématuré, tout d’abord en tant que membre du conseil d’administration de la CSNAF, organisatrice de l’évènement ?

Sylvestre Olgiati : Nous n’avons pas encore les retours définitifs(1), ni l’enquête exposant, ni tous les chiffres de fréquentation et autres. Mais ce que l’on peut noter, se dégageant de la "perception" générale, c’est que ce fut une très bonne édition. Le choix de nouveaux jours dans la semaine, du mercredi au vendredi(2), ne semble pas avoir perturbé le niveau de visites, peut-être même que cela a été bénéfique. Il s’avère déjà qu’il y ait eu plus de régularité au fil de ces journées. C’est très important, cette continuité confirme que nos clients viennent sur des jours professionnels pour travailler ; avec des pompes funèbres qui arrivent tôt, le vendredi, par exemple. On gagne en amplitude sur la journée. Les contacts ont été riches, intenses, et, globalement, apparaissent meilleurs qu’il y a deux ans, avec des prises de commandes identiques voire supérieures.

R : Maintenant, en tant que fabricant, distributeur et dirigeant du groupe Funépro…

SO : À titre personnel, pour mes entreprises – en l'occurence France Funéraire et Mémograv –, j’ai eu l’impression d’avoir été occupé en permanence sur nos stands, plus qu’en 2017, d’avoir eu moins d’occasion de faire le tour du salon, de moins passer de temps avec les confrères. Pour ce qui nous concerne, c’est sûr, nous avons mieux travaillé. Je relève deux éléments nouveaux. D’une part, nous avons constaté que de nombreuses pompes funèbres (quelle que soit leur taille) sont venues en groupe, avec des collaborateurs, et cela plus que lors des précédentes éditions. Cela vient, à mon sens, du choix des mercredi, jeudi et vendredi, les employés étant peut-être moins enclins à se déplacer le samedi.

D’autre part, ce que nous dénotons aussi, c’est que nous avons eu affaire à une clientèle positive, qui a des projets, des budgets, dont l’activité est importante, et que, dans l’ensemble, le moral était au beau fixe… dans une vision de perspectives économiques plutôt favorables. Et cela est valable tant pour les plaques funéraires, les urnes, etc., que pour des investissements plus importants (type gros matériel). Tous les échanges que nous avons eus allaient dans ce sens.

R : Votre présence sur le salon cette année a été marquée par la prise d’une surface plus importante, par une installation innovante avec deux espaces bien distincts pour deux de vos sociétés, Mémograv (dont le périmètre intégrait aussi certains de vos produits en distribution(3)) et France Funéraire, et la présentation sur le stand de cette dernière de 100 % de nouveautés. Quelles ont été les réactions de vos clients, actuels ou futurs, sur ces choix différenciant bien vos différentes activités ?

SO : Nous avons eu de nombreux retours, très positifs, des opérateurs funéraires en visite sur nos espaces. Ils ont notamment fait des compliments sur notre manière d’exposer nos fabrications, avec clarté et pertinence pour bien dissocier les gammes selon leurs caractéristiques, leur design, d’organiser les circulations, de permettre des déplacements faciles entre les étagères où se trouvaient les multiples collections d’articles (95 références pour plus de 440 plaques exposées). Certains nous ont même rappelés une semaine après uniquement pour nous renouveler leur satisfaction.

De ce fait, nos acheteurs n’ont pas eu de mal à se repérer dans la variété de nos univers, à suivre le parcours "client" pour découvrir l’intégralité de l’offre, plus aisée, plus simple et agréable à appréhender dans l’agencement choisi. Pour les commerciaux aussi, car chaque chose était à sa place. C’est quelque chose que nous allons développer à l’avenir. Le principe du "parcours" permet d’être sûr, a priori, que le visiteur n’a rien loupé, et cela dans une position de découverte confortable pour lui.

D’une façon générale, tout a bien fonctionné, et je suis très fier de mon équipe. C’est la première fois que je peux me dire : "Super, tout s’est déroulé comme on l’avait imaginé sur le papier !" Bien sûr, nous pourrons encore apporter des améliorations pour la prochaine édition, déployer de nouveaux axes, notamment vers les urnes Pludra, que nous distribuons en exclusivité en France.

R : Le "100 % nouveautés" était à l’honneur et clairement identifié. Comment cela a-t-il été ressenti ?

SO : Tous les choix que nous avons faits en matière de création pour les plaques funéraires, la pertinence des options retenues, du plus simple au plus complexe (couleurs, matériaux naturels ou pas, associations de textures et de matières, 2D ou 3D, mobilité de certaines pièces, etc.), ont été perçus de manière extrêmement positive. Ce qui est bien avec un salon, c’est qu’il permet des commentaires en direct. Tous nos modèles, même ceux qui auraient pu paraître trop originaux, trop audacieux, ont été bien accueillis. Je dirais même que ce sont les propositions les plus créatives, notamment certaines pièces en inox, d’autres avec des grandes fleurs en céramique, des photogravures en gros plan, etc., qui ont le mieux marché. L’intérêt de notre concept "nouveauté et créativité", c’est de pouvoir aller dans plein de directions différentes.

R : La présence de Marion, peintre et collaboratrice de Mémograv, réalisant sur le stand des peintures artistiques durant les trois jours, a-t-elle eu un impact ?

SO : Oui. Et elle avait deux objectifs. Tout d’abord, celui de mettre en avant nos savoir-faire dans le domaine de la peinture sur gravure et en matière de personnalisation. Et Marion, notre collaboratrice présente, a un vrai talent artistique et créatif. L’autre était de passer un message, de dire que personnaliser un article, c’est aussi ça. Ce qui est exceptionnel pour une agence de pompes funèbres – qui fait réaliser une plaque en peinture artistique une fois tous les deux ans – est habituel, quasi quotidien, pour nous. Aujourd’hui, cela fait partie de ces pratiques singulières que nous réalisons tous les jours, et les montrer ainsi, c’est aussi dévoiler l’entreprise en plein salon, faire entrer le client au cœur de l’atelier. C’est le côté "Bienvenue chez nous" !

R : À la fois fabricant et distributeur, vous êtes au centre d’un marché du souvenir en pleine évolution. Abordons donc maintenant, si vous le voulez bien, ce qu’est pour vous le devenir du cimetière dans une société où la mémoire se digitalise, où les représentations de l’hommage peuvent devenir virtuelles…

SO : Pour moi – et cela doit être notre ambition –, nous devons agir pour que le cimetière évolue au même rythme que la société. Trop souvent, quand on visite un cimetière, on ne voit que de vieux objets du souvenir. Notre aspiration, ce qui nous motive, c’est que "la famille n’ait pas la même plaque que la tombe d’à côté". Mon souhait, c’est que le cimetière reflète la vie d’aujourd’hui, avec ses tendances. On constate souvent un fossé entre la vision qu'ont les gens des articles funéraires et leur réaction quand ils visitent nos ateliers et découvrent nos produits… s'étonnant en conséquence de ne pas voir plus de plaques originales, créatives sur les tombes.

En fait, le temps que ça arrive et que ça soit visible dans les cimetières peut être de l’ordre de plusieurs années. C’est pourquoi, grâce à notre travail, nous devons arriver à ce que le cimetière soit le reflet de notre vie actuelle. Cela passe par nos plaques funéraires, nos articles du souvenir, chez nous et chez nos confrères.

La réserve que j’émettrais dans cette modernisation, cette évolution nécessaire, c’est le cimetière digital. Il y a quelques années, tout le monde parlait de "QR code", cela suscitait l’intérêt de tous. Nous avons joué le jeu et fabriqué des plaques avec cette empreinte numérique dès 2012. Mais qu'en est-il aujourd'hui ? Il n'en reste quasiment rien, les offres de l’époque ont disparu. Il y a encore quelques expériences digitales dans ce domaine chez des nouveaux venus… à suivre peut-être… Mais il faudra un jour faire l’analyse de la vie et la mort du projet des QR codes dans les cimetières…

Le cimetière, c’est le domaine du temps long, des choses qui durent. Les nouvelles technologies, c’est du temps court. Une innovation chasse l’autre. On s’aperçoit qu’elles se périment vite. La digitalisation, c’est du vivant, c’est donc antinomique avec le cimetière. Je pense que la modernité de l’espace funéraire ne passe pas par la technique, mais par une contemporanéité venant du design, de la création, de l’originalité et de la personnalisation des produits que nous réalisons.

R : Ce temps long que vous évoquez est jalonné par les objets émotionnels que sont notamment les plaques funéraires. Ne sont-elles pas un repère concret dans la démarche du deuil ?

SO : En effet, le besoin impérieux de nos articles est bien réel pour les familles. Rappelons que le cimetière a sa place comme lieu, espace funéraire, endroit de recueillement, géographiquement précis, ritualisé. Celui-ci est important, et nos produits le sont aussi car ils sont porteurs d’une émotion, d’un souvenir, d’un hommage qui s’inscrit dans une temporalité quasi sans limite. Ils permettent, pour un nombre important de personnes, d’exprimer un sentiment, un attachement, un manque. Cela participe au processus du deuil. C’est aussi le passage d’une étape, un jalon, dans celui-ci. Les articles du souvenir sont ainsi de véritables objets transactionnels... pouvant présupposer une relation intime entre l’objet et la valeur de mémoire qu’on lui attache, qu’on lui attribue.

Gil Chauveau

Nota :
(1) Au 5 décembre, date de l’entretien.
(2) Pour rappel, il y a deux ans, le salon se déroulait du jeudi au samedi, et non du mercredi au vendredi.
(3) CUBIX, Bijoux Les Empreintes, bougies, entre autres.

Résonance numéro spécial n°9 - Décembre 2019

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