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Dans les circonstances actuelles de pandémie, nous nous permettons de rappeler quelques principes fondamentaux d’une procédure inusuelle, la réquisition…

 

Principe de la réquisition en matière de pompes funèbres


La réquisition est le droit pour une autorité administrative de contraindre une personne physique ou morale à concourir à une mission de service public. Dans le cadre précis des pompes funébres, ce pouvoir de réquisition trouvera son origine dans les dispositions de l’art. L.2121-2 Code Général de Collectivités Territoriales (CGCT), qui énonce que "la police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques". Tandis que plus particuliérement le cinquiéme alinéa de cet article dispose parmi ces attributions : "le soin de prévenir, par des précautions convenables, et faire cesser, par la distribution des secours nécessaires, les accidents et les fléaux calamiteux ainsi que les pollutions de toute nature… les maladies épidémiques ou contagieuses… de pourvoir d’urgence à toutes les mesures d’assistance et de secours et s’il y a lieu de provoquer l’intervention de l’Administration supérieure". 

Ici donc, la réquisition aura pour but, par exemple, d’enlever le plus rapidement possible un corps, que ce soit sur la voie publique ou bien en cas de découverte de corps, voire de mort violente. Il se pourrait également qu’elle concerne des véhicules de transport, des chambres funéraires ou n’importe quels autres équipements ou personnels. 

Pour qu’il y ait réquisition, le juge exigera trois paramètres : 

  • le premier est l’urgence (la situation ne permettait pas de passer par les voies normales), 
  • le second paramètre est le caractère exceptionnel de la procédure (la réquisition ne doit pas être un moyen d’administration), 
  • enfin, le troisième est l’existence d’un trouble à l’ordre public.

Le plus souvent, ce sera le maire qui procédera à la réquisition ; néanmoins, il existe des hypothèses où le préfet se substituera au maire. Ces cas sont ceux où la réquisition couvrira plusieurs communes, et même, dès que le périmètre de l’action administrative est supérieur aux limites communales, le préfet est la seule autorité pouvant procéder aux réquisitions (L. 2215-3° du CGCT). Le représentant de l’État possède aussi le pouvoir de se substituer au maire lorsque celui-ci n’a pas voulu procéder à une réquisition jugée nécessaire, il faudra alors une mise en demeure préalable du magistrat municipal.


Fondement de la compétence du préfet en matière de réquisition


C’est l’art. 3 de la loi 2003-239 du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure, modifié par l’art. 29 de la loi 2007-297 du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance, qui confirme explicitement que, dans l’exercice de son pouvoir de police générale, dans le cadre du département, le préfet peut faire exercice d’un pouvoir général de réquisition de biens, de services et de personnes. 

Dans sa décision de contrôle de constitutionnalité de cette loi (Conseil constitutionnel, 13 mars 2003, décision n° 2003-467), le Conseil constitutionnel énonce que ces nouvelles dispositions ont uniquement pour effet de "préciser et compléter les pouvoirs de police administrative appartenant d’ores et déjà à l’autorité préfectorale en cas d’urgence lorsque le rétablissement de l’ordre public exige des mesures de réquisition". 

Il est donc donné un fondement textuel à ce pouvoir qui jusque-là existait sans fondement. Désormais, l’art. L. 2215-1-4° énonce que : "En cas d’urgence, lorsque l’atteinte constatée ou prévisible au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques l’exige et que les moyens dont dispose le préfet ne permettent plus de poursuivre les objectifs pour lesquels il détient des pouvoirs de police, celui-ci peut, par arrêté motivé, pour toutes les communes du département ou plusieurs ou une seule d’entre elles, réquisitionner tout bien ou service, requérir toute personne nécessaire au fonctionnement de ce service ou à l’usage de ce bien et prescrire toute mesure utile jusqu’à ce que l’atteinte à l’ordre public ait pris fin ou que les conditions de son maintien soient assurées."

Les conditions de fond de la réquisition

  • Un arrêté est nécessaire : il faut donc un écrit ; exceptionnellement, il peut arriver que l’urgence permette néanmoins d’agir sans un écrit ;
  • Cet arrêté doit être motivé : usuellement, tout acte administratif défavorable doit l’être. Néanmoins, échappent à cette obligation les cas où l’urgence absolue est avérée ;
  • Enfin, l’arrêté doit indiquer la nature des prestations requises, la durée de la mesure de réquisition, ainsi que les modalités de son application.


Les conditions de forme de la réquisition

  • Nécessité d’une urgence concernant bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques ;
  • Nécessité que les moyens traditionnels à disposition du préfet ne lui permettent pas d’obtenir le rétablissement des objectifs de police. 

À partir du moment où toutes ces conditions sont remplies, le préfet peut, pour toutes les communes du département ou plusieurs ou une seule d’entre elles, réquisitionner tout bien ou service, requérir toute personne nécessaire au fonctionnement de ce service ou à l’usage de ce bien, et prescrire toute mesure utile jusqu’à ce que l’atteinte à l’ordre public ait pris fin ou que les conditions de son maintien soient assurées.


Les effets de la réquisition


La réquisition entraîne l’obligation pour ceux désignés par l’arrêté de mettre à la disposition du préfet, tant leur personne, que leurs biens ; s’ils n’obtempèrent pas, trois conséquences :

  • Le refus d’exécuter les mesures prescrites par le requérant est un délit puni de six mois d’emprisonnement et de 10 000 € d’amende (L. 2215-1-4° du CGCT) ;
  • Dérogation au principe de l’impossibilité pour l’Administration d’exécuter de façon forcée sa décision. Le préfet pourra donc faire exécuter d’office les mesures prescrites par l’arrêté ;
  • L’art. L. 2215-1 du CGCT prévoit enfin la possibilité pour le juge administratif de prononcer une astreinte dans les conditions prévues par l’art. L. 911-8 du Code de justice administrative) à l’encontre du requis en cas d’inexécution volontaire de la réquisition.

Les compensations liées à la réquisition

L’État devra rétribuer la personne requise pour les frais matériels, directs et certains résultant de la réquisition. L’autorité requérante est responsable. Les dommages matériels ou à la sécurité des personnes survenant pendant la réquisition seront donc à sa charge, tout particulièrement si l’autorité administrative a autorisé la violation de la législation en vigueur.

Dans le cas d’une réquisition adressée à une entreprise, lorsque la prestation requise est de la même nature que celles habituellement fournies à la clientèle, le montant de la rétribution est calculé d’après le prix commercial normal et licite de la prestation. Le juge administratif, dans les conditions prévues par le CJA, peut, dans les quarante-huit heures de la publication ou de la notification de l’arrêté, à la demande de la personne requise, accorder une provision représentant tout ou partie de l’indemnité précitée lorsque l’existence et la réalité de cette indemnité ne sont pas sérieusement contestables.

Philippe Dupuis

Consultant au Cridon,

chargé de cours à l’université de Valenciennes,

formateur en droit funéraire pour les fonctionnaires

territoriaux au sein des délégations du CNFPT

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations