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Cette question posée par un lecteur de Résonance aborde plusieurs sujets distincts bien qu’ayant en commun l’implantation et la gestion de divers équipements nécessaires au bon fonctionnement et à l’utilisation du cimetière.


La question

Dans ma commune, nous avons transformé un caveau récupéré par la mairie en dépositoire ou caveau provisoire, peut-il également servir d’ossuaire pour y déposer les reliquaires des autres concessions abandonnées récupérées par la mairie ? Nous envisageons également d’aménager l’intérieur de petites chapelles mortuaires à restaurer en columbariums.

Réponse

Plusieurs précisions terminologiques s’imposent avant de répondre point par point aux différents sujets abordés.

1 - Le caveau provisoire, un équipement à usage collectif et temporaire dans l’attente de l’inhumation définitive 

L’organisation des obsèques se heurte parfois à des difficultés nécessitant une solution provisoire en attendant de pouvoir procéder à l’inhumation définitive du cercueil (ou de l’urne). Les raisons peuvent être multiples : lieu d’inhumation non fixé, caveau de famille complet nécessitant de procéder à des réductions de corps ou à des travaux, construction de caveau qui a pris du retard, obstacles administratifs à la reconnaissance d’ayants droit sur une concession, etc.

Le caveau provisoire a donc vocation à accueillir les cercueils dans l’attente de leur inhumation définitive dans des conditions de salubrité adéquates. Si de nombreuses communes disposent d’un caveau provisoire dédié et spécialement aménagé permettant d’accueillir un ou plusieurs cercueils et offrant une certaine facilité de manutention des cercueils, leur usage n’est pas exclusif, et une commune pourra parfaitement utiliser, à titre de caveau provisoire, un caveau implanté sur une ancienne concession reprise pour défaut de renouvellement ou en état d’abandon.

Père Lachaise

2 - Le dépositoire, quand le droit se heurte à la pratique

Contrairement au caveau provisoire qui se situe au-dessous du niveau du sol, le dépositoire se situe, lui, au-dessus du niveau du sol. Il présente bien entendu l’inconvénient de risques en termes de salubrité publique. C’est donc dans ce contexte que le décret du 28 janvier 2011 l’avait fait disparaître des dispositions de l’art. R. 2213-29 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) qui dresse la liste des lieux dans lesquels un cercueil peut être déposé de façon provisoire dans l’attente de son inhumation définitive (ou de sa crémation)(1).

De nombreuses communes, en particulier rurales, étaient cependant équipées de dépositoires, parfois au prix d’importants investissements, de sorte qu’à l’occasion de plusieurs réponses ministérielles, les dépositoires ont pu être néanmoins assimilés à des caveaux provisoires pour autant qu’ils étaient situés dans l’enceinte du cimetière(2).

La pratique de certaines communes consistant à continuer d’utiliser leurs dépositoires situés dans l’enceinte des cimetières, malgré l’entrée en vigueur du décret de 2011 et la récente crise sanitaire, ont abouti au décret du 27 mars 2020 qui a fait réapparaître le terme "dépositoire" dans les dispositions de l’art. R. 2213-29 du CGCT(3). Cependant, au regard des risques sanitaires évidents que pourrait faire peser l’utilisation de dépositoires, par définition "hors-sol", il apparaît grandement souhaitable que les pouvoirs publics s’emparent du sujet en fixant des normes techniques spécifiques, aujourd’hui inexistantes, quant à l’implantation et à l’usage des dépositoires.

Rappelons enfin qu’aux termes de l’art. R. 2213-29 du CGCT, "l’autorisation du dépôt est donnée par le maire de la commune du lieu du dépôt […]. Le dépôt [en caveau provisoire] ne peut excéder six mois. À l’expiration de ce délai, le corps est inhumé ou fait l’objet d’une crémation […]" ; et qu’aux termes de l’art. R. 2213-26, "le corps est placé dans un cercueil hermétique […] en cas de dépôt du corps […] soit dans un dépositoire ou dans un caveau provisoire, pour une durée excédant six jours."

3 - L’ossuaire, un équipement à caractère perpétuel

L’ossuaire se différencie radicalement du caveau provisoire et du dépositoire par son caractère perpétuel. Ainsi qu’en dispose l’art. L. 2223-4 du CGCT : "Un arrêté du maire affecte à perpétuité, dans le cimetière, un ossuaire aménagé où les restes exhumés sont aussitôt réinhumés". Ainsi que le constatent certains auteurs, "aucun texte ne précise les caractéristiques techniques de l’ossuaire"(4).

Néanmoins, il découle de l’interprétation des dispositions des articles L. 2223-4 et R. 2223-6 du CGCT que celui-ci a, a priori, vocation à être enterré. Ainsi, rien ne semble devoir s’opposer à l’utilisation de caveaux, pour autant que ces derniers présentent des caractéristiques de solidité conformes à leur caractère perpétuel.

Précisons en outre que l’art. L. 2223-4 du CGCT dispose dans sa version en vigueur issue de la loi du 17 mai 2011 que "le maire peut également faire procéder à la crémation des restes exhumés en l’absence d’opposition connue ou attestée du défunt" et que "les restes des personnes qui avaient manifesté leur opposition à la crémation sont distingués au sein de l’ossuaire". Ces dispositions permettent ainsi de pallier la saturation fréquente des ossuaires au fil des reprises successives opérées dans les cimetières.

4 - L’aménagement de chapelles mortuaires restaurées en columbariums

Les chapelles funéraires ont connu leur heure de gloire au XIXe siècle auprès des familles les plus fortunées. Les générations qui leur ont succédé se sont souvent heurtées au coût très important de leur entretien, et nombreuses sont les chapelles aujourd’hui abandonnées, condamnées à la démolition faute de restauration. Pourtant, ces chapelles constituent une véritable richesse du patrimoine funéraire français, qu’il convient de préserver. Alternative à leur démolition, certaines communes, à l'instar la Ville de Paris, mènent depuis plusieurs années une politique de restauration financée par leur réaménagement en cases de columbariums(5).

Ainsi, les sommes perçues au titre des concessions de cases financent le coût des travaux. Rappelons en effet qu’à l’issue d’une procédure de reprise de concession, les constructions deviennent propriété de la commune qui peut dès lors en disposer librement. On ne peut que se réjouir de ce type d’initiative qui présente le double intérêt de préserver le patrimoine et de proposer une solution originale à la saturation croissante des columbariums engendrée par la croissance exponentielle de la crémation au cours des dernières décennies.

Nota :
(1) D. Dutrieux, La disparition du dépositoire et l'inhumation de l'urne en propriété privée : d'utiles précisions ! - Résonance funéraire n° 74, octobre 2011.
(2) Rép. ministérielle, QE n° 18779, JO Sénat 22 mars 2012 ; Rép. ministérielle, QE n° 101820, JOAN 23 août 2011.
(3) P. Dupuis, Dépositoire, caveau provisoire et Covid-19, Résonance funéraire, n° 160, mai 2020.
(4) E. Aubin - I. Savarit-Bourgeois, Cimetières, sites cinéraires et opérations funéraires, 9e éd., Berger-Levrault, n° 674, p. 355.
(5) Les vieilles chapelles transformées en colombariums, Le Parisien, 1er novembre 2012 ; E. Le Mitouard, Paris : la nouvelle vie des chapelles abandonnées du Père-Lachaise, Le Parisien, 23 novembre 2020.

Xavier Anonin
Docteur en droit

Résonance n° 171 - Juin 2021

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