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Cette fiche n° 13596 est issue du service documentaire "Pratique des opérations funéraires" des Éditions WEKA, supervisé par Marie-Christine Monfort, forte de 20 ans d’expérience dans le domaine funéraire au sein de la Ville de Lille et de la Métropole Européenne de Lille. Mis à jour en permanence, ce service offre une veille juridique et réglementaire et des conseils opérationnels pour tous les professionnels pratiquant le droit funéraire.


Prévotaux Julien 2021 1En 2020, 52 % des Français déclarent posséder un animal de compagnie, dont pour la majorité un ou plusieurs chats (Statista Research Department, août 2020). Suivant les mêmes observateurs, 70 % des sondés affirment considérer leur animal domestique comme un membre de la famille à part entière.

Conséquence logique de ce qui précède, depuis plusieurs années, nombreux sont les gestionnaires de cimetières ou les maires qui sont sollicités par des familles pour permettre l’inhumation d’un défunt en compagnie des cendres de son compagnon à 4 pattes ou d’un autre animal. En effet, l’attachement des maîtres est parfois sans limite pour leurs animaux de compagnie, et ce, quel que soit le pays. Il semble utile de faire le point sur la réglementation applicable lors du décès d’un animal familier. C’est le but de cette fiche.

Un peu d’histoire

Chacun se souvient de l’affaire du chien Félix. Au décès de leur chien le 1er février 1959, ses maîtres, monsieur et madame Blois, ont demandé au maire l’autorisation de procéder à son inhumation dans le caveau familial. L’édile a permis verbalement l’inhumation, à laquelle seuls les maîtres et le fossoyeur ont assisté. La discrétion fut inutile, puisque 2 camps s’élevèrent rapidement dans le village autour du sujet de l’inhumation du chien. Le maire, pris au dépourvu, fut contraint de refuser officiellement l’opération, et par arrêté intima à son maître l’ordre de faire procéder à l’exhumation de Félix.

Monsieur Blois ayant refusé de se soumettre, il fut déféré au tribunal de police et l’affaire fut portée jusqu’au Conseil d’État, créant la "jurisprudence Félix" (CE, 17 avr. 1963, Blois : l’interdiction est faite à un concessionnaire de se faire inhumer dans sa concession avec son chien en se fondant sur la notion de dignité des morts, laquelle implique de séparer strictement les espaces dédiés à l’inhumation des hommes et à celle des animaux de compagnie).

Le décès

Quelles sont les prescriptions qui sont applicables dès lors qu’un animal familier décède ? C’est le Code rural et de la pêche maritime qui traite du devenir des dépouilles animales. Les articles L. 226-1 à L. 226-9 disposent que les cadavres d’animaux ainsi que les matières animales (qualifiés de sous-produits animaux) doivent être collectés, transformés, voire éliminés, dans des conditions précisées par le règlement CE n° 1774/2002 du Parlement européen et du Conseil du 3 octobre 2002, autrement dit l’équarrissage.

Il est donc fait obligation aux propriétaires de tous cadavres d’animaux de confier ces derniers à un établissement agréé en vue de leur élimination par incinération individuelle ou collective. Par dérogation, l’art. L. 226-4 du même Code dispense de l’équarrissage les cadavres d’animaux familiers dont le poids n’excède pas 40 kg.

Le choix de l’inhumation

1 - L’inhumation dans un jardin
Si la loi impose de confier les dépouilles des animaux de plus de 40 kg à un équarrisseur, rien n’est prévu pour ceux dont le poids est inférieur. Le Code rural et de la pêche maritime renvoie au règlement européen CE n° 1774/2002 du Parlement européen et du Conseil du 3 octobre 2002, dont l’art. 8 semble indiquer que seule l’inhumation dans un cimetière animalier reste autorisée. Il convient donc de rester vigilant sur ce point.

Certains auteurs estiment qu’il est possible d’enterrer un animal de moins de 40 kg dans un jardin, à condition que la tombe se situe à moins de 35 mètres des premières maisons ou d’une source, que le trou soit au moins profond de 1,20 mètre et que le maître soit propriétaire du jardin.

2 - Le cimetière animalier
Il y a aujourd’hui une trentaine de cimetières animaliers en France, dont le plus célèbre est sans conteste celui d’Asnières, ouvert en 1899. La création d’un cimetière animalier est soumise aux prescriptions de l’art. 98 du règlement sanitaire départemental :
• La commune autorise son implantation au vu d’un dossier préalablement déposé par le demandeur.
• La préfecture délivre le droit d’exercer cette activité particulière.
• Les services d’hygiène demandent à un hydrogéologue agréé d’évaluer le positionnement du terrain par rapport aux cours d’eau, puisque les cimetières animaliers sont soumis aux mêmes obligations que les cimetières traditionnels en matière de protection des sols, des eaux et pour l’application des normes sanitaires.

Rappel
• Le cimetière doit être situé à au moins 35 mètres des habitations et des sources d’eau.
• L’inhumation peut être réalisée dans un linge, une boîte en carton ou un cercueil, tout contenant devant être biodégradable.
• Certains cimetières acceptent l’inhumation d’animaux dont le poids est supérieur à 40 kg.

La crémation

L’incinération est une alternative qui se développe, puisque, marketing aidant, elle permet aux maîtres dans le chagrin de récupérer et conserver un "souvenir" de leur petit compagnon. Les corps sont récupérés au domicile ou chez le vétérinaire. Si la crémation n’est pas possible immédiatement, ils sont conservés 24 heures maximum à - 5 °C, 72 heures maximum à - 14 °C.

2 options sont offertes aux propriétaires :
• L’incinération collective : généralement l’équivalent de 4 ou 5 petits animaux, 3 ou 4 pour les chiens plus volumineux ; les cendres sont confiées à un service d’enfouissement conformément à la réglementation en vigueur, mais certains crématoriums animaliers procèdent à des dispersions sur site.
• L’incinération individuelle : l’animal est incinéré seul en présence ou non de ses maîtres, et les cendres sont restituées ensuite dans une urne ou dispersées. Il est possible d’organiser une cérémonie.

Construction et entretien des crématoriums animaliers

Les installations d’incinération dédiées aux animaux de compagnie doivent être implantées à 200 mètres minimum des lieux d’habitation et des points d’eau. Les prescriptions relatives à la sécurité et à la composition des effluents gazeux sont au moins aussi drastiques que pour les crématoriums traditionnels destinés aux humains. Les opérateurs sont tenus au port d’équipements de protection individuelle, notamment des blouses et des gants ignifugés. Une hygiène stricte des installations doit être garantie. Leur contrôle régulier est obligatoire.

À noter
Une traçabilité de l’activité est demandée aux gestionnaires de ces crématoriums, qu’il s’agisse de crémations collectives ou individuelles.
Des fiches de traçabilité doivent être remplies et conservées pendant 2 années à la disposition de l’inspecteur des installations classées.
À savoir
Depuis la loi n° 2015-177 du 16 février 2015, qui modernise le statut juridique de l’animal dans le Code civil, l’animal est officiellement reconnu par ce dernier comme "un être vivant doué de sensibilité", et non plus comme un "bien meuble".
Toutefois, la notion d’animal familier est vague. Il semble que puissent être considérés comme tels les chiens, les chats, les rongeurs, les lapins et les oiseaux. Ils sont admis à la crémation.

Vers une évolution de la réglementation ?

Dans sa récente réponse à la question n° 00178 publiée au JO du Sénat du 3 novembre 2022, le ministère rappelle :
"En vertu des articles L. 2223-3 et L. 2223-13 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT), la sépulture dans un cimetière communal est due aux seules personnes. Le maire ne peut donc y autoriser l’inhumation d’un animal ou de ses cendres, demandée par une famille ou un propriétaire de caveau.

Ainsi, le Conseil d’État a justifié l’interdiction faite à un concessionnaire de caveau de s’y faire inhumer avec son chien en se fondant sur la notion de dignité des morts (Conseil d’État, 17 avril 1963, Blois), qui implique de séparer strictement les espaces dédiés à l’inhumation des hommes et des animaux de compagnie.

Il revient donc au maire d’interdire l’inhumation d’un cadavre d’animal ou de ses cendres dans le cimetière, ainsi que tout dépôt dans un cercueil dont il aurait connaissance. Le Gouvernement n’envisage pas de faire évoluer la réglementation en la matière."

Toutefois, les résultats d’un récent sondage, réalisé par l’IFOP le 27 octobre 2022, indiquent que 68 % des Français interrogés souhaiteraient être inhumés avec leur animal de compagnie. Cette lame de fond n’a pas échappé aux parlementaires, puisqu’en peu de temps deux propositions de loi ont été déposées par plusieurs députés dans ce sens sur le bureau de l’Assemblée nationale, indistinctement de leur appartenance politique :
• La proposition de loi n° 400 "visant à permettre aux propriétaires décédés de reposer avec leurs animaux de compagnie" a été déposée le 2 novembre 2022 par le député Olivier Falorni. Elle est l’expression d’un précédent travail engagé par des parlementaires de l’ancienne législature qui n’ont pas été réélus. Elle préconise la modification du CGCT afin d’autoriser le dépôt dans le cercueil d’une ou plusieurs urnes contenant les cendres de ses animaux de compagnie lors de la mise en bière du défunt. Elle envisage la possibilité alternative d’aménager un espace dédié dans les cimetières pour animaux où pourront être réunies dans la même sépulture l’urne cinéraire d’un défunt et les urnes cinéraires de ses animaux de compagnie ou équidés en modifiant en conséquence le Code rural et de la pêche maritime.
• La proposition de loi n° 629 "visant à permettre à nos concitoyens d’inhumer leurs animaux de compagnie au sein de leur caveau au cimetière", présentée par 27 députés, a été déposée le 15 décembre 2022. Dans un article unique du CGCT qu’elle complète en conséquence, cette proposition tend à autoriser chaque ayant droit d’une concession funéraire à faire placer dans la sépulture familiale la dépouille ou les cendres de ses animaux de compagnie à leur décès. Si toute gravure pérenne de leur nom est exclue, la présence de ces animaux peut être mentionnée via des plaques ou dispositifs amovibles placés sur le monument funéraire.

Il reviendra à la représentation nationale de se prononcer sur tout ou partie de ces deux textes dès lors que l’exécutif acceptera de les inscrire à l’ordre du jour de l’Assemblée nationale.

À savoir
Partant du constat "qu’après avoir passé une bonne partie de leur vie avec leur animal de compagnie, certaines personnes désirent poursuivre cette cohabitation après la mort, qu’elles souhaitent partager le même caveau familial, voire le même cercueil avec leur chien, leur chat ou leur canari, qu’ils aient été incinérés ou pas auparavant", dans un récent communiqué officiel, la Région wallonne (Belgique), en la personne du ministre des Pouvoirs locaux, a décidé de clarifier la situation en annonçant qu’il sera prochainement possible de se faire inhumer avec les cendres de son animal de compagnie, mais à condition qu’il ait été incinéré avant le décès de son maître.

Pas question bien sûr de l’euthanasier pour l’occasion. Il reste à observer quelle sera la position du Gouvernement français, pressé par un nombre croissant de propositions de loi sur ce sujet…

 
Notre conseil
Confrontés à une demande d’ensevelissement d’un animal familier dans le cimetière, vous devez à la fois garantir le respect des pouvoirs de police du maire (respect de la dignité des lieux d’inhumation des humains) et faire preuve de compréhension. Pour autant, un récipient contenant les cendres d’un animal ne peut pas être considéré comme un objet, mais comme un animal dont la présence est proscrite dans le cercueil du défunt.

 
Erreurs à éviter
De nombreux auteurs publiant des articles antinomiques sur le point précédent, il est conseillé de se rapprocher du règlement sanitaire départemental en vigueur, qui indiquera si, dans un département donné, l’inhumation d’un animal de moins de 40 kg reste possible dans un jardin. Cette option n’est plus notée sur le site officiel service-public.fr.

 
FAQ

Faut-il être habilité pour diriger un crématorium animalier ?
Non, l’habilitation ne vaut que pour l’exercice des missions relevant du service extérieur des pompes funèbres, ce qui n’est pas le cas de la crémation animale. En revanche, les règles de droit commun s’appliqueront dans tous les cas.

Une personne souhaite être inhumée le moment venu avec une urne contenant les cendres de son chat. Que puis-je lui répondre ?
Vous devez la renvoyer sur la jurisprudence Félix, qui a définitivement acté l’interdiction de procéder à l’inhumation d’animaux dans les cimetières "humains". Toutefois, à l’impossible nul n’est tenu, et il n’est pas exclu que la vigilance des professionnels soit trompée lors de la mise en bière…

Et si à l’inverse le maître sollicite son inhumation dans un cimetière animalier pour être proche de son compagnon ?
Cela équivaudrait à solliciter une autorisation de pratiquer une inhumation dans une propriété privée, pour laquelle seul le préfet du département est compétent. Au nom du principe de dignité des morts, le représentant de l’État oppose systématiquement des décisions administratives de refus à l’encontre des demandeurs.

L’interdiction de ces inhumations est-elle générale ?
Non, l’inhumation d’un chien ou d’un chat dans un tombeau où reposent des humains est possible en Angleterre et en Suisse allemande et romande.

Références juridiques

• Règlement (CE) n° 1774/2002 du Parlement européen et du Conseil du 3 octobre 2002 établissant des règles sanitaires applicables aux sous-produits animaux non destinés à la consommation humaine.
• Code civil, art. 515-14 (statut de l’animal).
• Code rural et de la pêche maritime, art. L.226-1 et s. (élimination des sous-produits animaux).
• Loi n° 2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.
• Loi n° 75-1336 du 31 décembre 1975 relative à l’équarrissage.
• Arrêté du 17 juillet 2009 relatif aux prescriptions applicables aux installations classées soumises à autorisation sous la rubrique 2740 (incinération de cadavres d’animaux de compagnie), art. 28.
• Arrêté du 4 mai 1992 relatif aux centres d’incinération de cadavres d’animaux de compagnie.
• CE, 17 avril 1963, Blois
• Rép. min. n° 00178, JO Sénat, 3 novembre 2022.
• Rép. min. n° 00329, JO Sénat, 15 novembre 2012, p. 2600, Povinelli Roland (cimetières animaliers).
 
Marie-Christine Monfort
Transmis par Julien Prévotaux
Directeur éditorial, WEKA

Résonance n° 199 - Janvier 2024

Instances fédérales nationales et internationales :

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