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Alors que les textes d’application visant à pérenniser la certification des décès par les infirmiers diplômés d’État volontaires viennent d’être publiés, la Fédération Nationale du Funéraire s’est rapprochée de l’Ordre national des infirmiers afin d’obtenir de plus amples éclairages sur cette mesure attendue, tant des familles que des professionnels du funéraire, et qui reconnaît la profession infirmière comme un acteur clé de la santé de proximité.
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Les difficultés posées par les déserts médicaux sur le territoire ne se limitent pas à l’offre de soins pour les vivants : elles compliquent aussi la certification des décès, particulièrement ceux intervenus à domicile. Cette situation est connue, et a été rappelée récemment par Philippe Gosselin, député de la Manche, dans une question écrite publiée en octobre 2024, dans laquelle il déplorait que, aujourd’hui encore, "de nombreuses collectivités sont confrontées à un manque de médecins disponibles pour effectuer cette procédure. La situation est particulièrement tendue dans les zones de déserts médicaux […], mais elle concerne également des zones mieux dotées" (Question écrite n° 477, JO AN du 8 octobre 2024, p. 5249).

Pour répondre à cette problématique, le Gouvernement avait déjà, en 2019, étendu la possibilité de certifier les décès aux médecins en retraite, aux étudiants en médecine et aux médecins étrangers (art. 12 de la loi n° 2019-774 du 24 juillet 2019 et décret n° 2020-446 du 18 avril 2020). Cette solution n’ayant pas permis de régler ces difficultés, une expérimentation visant à permettre aux infirmiers diplômés d’État de certifier les décès a été lancée par la loi de financement pour la Sécurité sociale pour 2023 (art. 36 de la loi n° 2022-1616 du 23 décembre 2022).

C’est cette nouvelle possibilité qui vient d’être pérennisée et étendue par le législateur (art. 56 de la loi n° 2025-199 du 28 février 2025) et le pouvoir réglementaire (décrets nos 2025-370 et 2025-371 du 22 avril 2025 et arrêté du même jour). Le dispositif retenu lève un frein relatif à l’intervention des médecins en retraite, qui n’auront plus à s’assurer qu’un médecin en activité peut établir un certificat de décès dans un délai raisonnable. Mais surtout, en inscrivant dans le marbre du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) les éléments liés à l’expérimentation, il devrait permettre d’augmenter le contingent de professionnels de santé certificateurs de décès.

Le choix des infirmiers est particulièrement pertinent, dès lors que, comme nous l’a confié l’Ordre national des infirmiers : s’il existe des déserts médicaux, il n’existe pas de déserts infirmiers , avec plus de 600 000 professionnels en exercice, en libéral ou salariés.

Une expérimentation pérennisée et étendue

Désormais donc, et de manière pérenne, un infirmier pourra certifier un décès s’il remplit trois conditions :
- Être titulaire d’un diplôme d’État depuis au moins 3 ans ;
- Avoir validé la formation prévue par l’arrêté du 22 avril 2025 et qui comporte 3 modules (module "statistique sur les causes de décès et l’examen clinique du processus mortel", module "administratif et juridique", module "système d’information" ;
- Être inscrit sur la liste établie par le conseil départemental ou interdépartemental de l’Ordre des infirmiers, et publiée par le Conseil national de l’Ordre des infirmiers.
Une fois habilité à cette fin, l’infirmier volontaire pourra certifier tous les décès de personnes majeures, à l’exception :
- De ceux intervenus sur la voie publique ou dans un lieu ouvert au public ;
- De ceux dont le caractère violent de la mort est manifeste ou lorsqu’il y aura des signes ou indices de mort violente, ou d’autres circonstances qui donneront lieu de le soupçonner.

Dans ces hypothèses, il ne peut pas certifier le décès et doit contacter un médecin ou les services d’aide médicale d’urgence (SAMU) pour ce faire. De même, lorsque l’infirmier se trouve dans l’incapacité de déterminer seul les causes du décès, il doit faire appel à l’expertise d’un médecin. Dans tous les cas, il doit informer le médecin traitant du défunt, si ce dernier en avait un.

Pour mémoire, dans le cadre de l’expérimentation, le défunt devait être décédé à son domicile ou dans un établissement d’hébergement pour personnes âgées dépendantes, pour que son décès puisse être certifié par un infirmier.

Le pouvoir réglementaire a également levé une source de difficulté révélée par l’expérimentation, en permettant aux infirmiers certificateurs d’établir tout certificat, attestation ou document consécutif au décès et qui s’y rattache directement. Il ne sera donc plus nécessaire de faire appel à un médecin pour l’établissement d’une attestation de non-contagiosité permettant le transport international de corps, ce qui est une avancée.

La rémunération des infirmiers assurée

Un dernier point, mais non des moindres, est encore attendu, s’agissant de la rémunération de ces actes.

En effet, si celle des infirmiers employés par les établissements de santé ou médico-sociaux est prise en charge dans leur traitement ou leur salaire – la certification des décès est incluse dans leur plan de travail –, celle des infirmiers libéraux doit donner lieu à un dispositif spécial, prévu au II de l’art. 56 de la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2025, dont l’arrêté d’application n’a pas encore été publié.

Dans l’entre-temps, ces infirmiers seront toujours sous le régime de l’arrêté du 6 décembre 2023 pris dans le cadre de l’expérimentation, qui prévoit une prise en charge forfaitaire comprise entre 42 et 54 € par acte, en fonction des circonstances (journée, nuit, week-ends et jours fériés, zones déterminées comme fragiles, etc.).

L’Ordre national des infirmiers rappelle à notre attention que cette rémunération est due pour toute intervention, y compris lorsque l’infirmier n’a pu établir le certificat de décès, parce qu’un obstacle médico-légal ou l’impossibilité d’établir les causes de la mort l’oblige à faire appel à un médecin. Il n’y a donc, a priori, aucun risque pour un infirmier libéral d’intervenir sans être rémunéré.

Des perspectives encourageantes pour les familles

Il n’est pas possible d’évaluer avec certitude la mesure dans laquelle ce nouveau dispositif aboutira à une augmentation du contingent des infirmiers diplômés d’État certificateurs de décès. L’Ordre national des infirmiers a été clair à ce sujet : cette possibilité se fait sur la base du volontariat et relève de la décision individuelle de ces professionnels de santé, particulièrement en cas d’exercice libéral, ainsi que des politiques mises en œuvre dans les différentes unités de soin qui les emploient. Si, à moyen terme, il est envisagé d’intégrer cette nouvelle compétence dans la formation initiale des infirmiers, aucun calendrier n’existe encore à ce jour.

Toutefois, le dispositif adopté lève plusieurs freins qui peuvent laisser espérer une montée en puissance à venir de la certification des décès par les infirmiers.

- Ainsi, le simple fait de la pérennisation de l’expérimentation envoie un signal positif aux infirmiers. Le caractère temporaire du dispositif pouvait dissuader certains infirmiers de se lancer dans l’aventure, au risque de payer le coût d’entrée – une formation de 12 heures – pour rien, si le Gouvernement n’avait pas souhaité continuer sur cette voie.

- Par ailleurs, la formation obligatoire était jusqu’ici dispensée par les Agences Régionales de Santé (ARS). Désormais, elle sera proposée par des organismes de formation, et l’Ordre national des infirmiers nous a confirmé que plusieurs d’entre eux s’étaient déjà saisis de cette nouvelle possibilité.

L’on pourra donc espérer que le nombre d’infirmiers se formant à la certification des décès aille en augmentant. "Durant l’expérimentation, rappelle l’Ordre national des infirmiers, 10 571 infirmiers ont été formés et sont en capacité d’intervenir." Sachant qu’il y a environ 600 000 infirmiers en activité en France, les marges de progression sont prometteuses, particulièrement dans les régions qui, ayant pris l’expérimentation en cours de route (décret n° 2024-375 du 23 avril 2024), accusent un certain retard.

La Fédération Nationale du Funéraire (FNF) salue cette nouvelle mesure, dont elle espère qu’elle permettra de résorber les difficultés liées à la certification des décès en milieu rural ou tendu. Elle se tient aux côtés de l’Ordre national des infirmiers et des professionnels de santé engagés qu’il représente, pour en accompagner le déploiement, dans l’esprit constructif et collaboratif qui l’anime. Il en va, ici comme ailleurs, de l’intérêt des familles endeuillées.
 
Élisabeth Charrier
Déléguée générale de la FNF

Résonance n° 215 - Mai 2025

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