Cette fiche n° 5828 est issue du service documentaire "Pratique des opérations funéraires" des Éditions WEKA. Supervisé par Marie-Christine Monfort, forte de 20 ans d’expérience dans le domaine funéraire au sein de la Ville de Lille et de la Métropole Européenne de Lille, et mis à jour en permanence, ce service offre une veille juridique et réglementaire et des conseils opérationnels pour tous les professionnels pratiquant le droit funéraire.

Même si le législateur ne l’a pas explicitement précisé, le service public de la crémation est de nature industrielle et commerciale. Il doit donc être géré budgétairement sur la base d’un budget annexe dont les articles L. 2224-1 et L. 2224-2 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) précisent qu’il doit être équilibré en recettes et en dépenses. La création d’un crématorium géré en régie impose donc l’élaboration d’un budget annexe, la fixation de tarifs spécifiques ainsi qu’une soumission.
L’élaboration d’un budget annexe
Les budgets annexes, distincts du budget principal proprement dit, mais votés par l’assemblée délibérante, sont notamment établis pour les activités revêtant le caractère de Service Public Industriel et Commercial (SPIC).
La création d’un budget annexe a différentes conséquences notables :
- La commune ou l’Établissement Public de Coopération Intercommunale (EPCI) ne peuvent prendre en charge dans leur budget principal des dépenses au titre de ce service, sauf lorsqu’elles sont justifiées par l’une des 3 raisons précisées à l’art. L. 2224-21 du CGCT :
• lorsque les exigences du service public conduisent la collectivité à imposer des contraintes particulières de fonctionnement,
• lorsque le fonctionnement du service public exige la réalisation d’investissements qui, en raison de leur importance et eu égard au nombre d’usagers, ne peuvent être financés sans augmentation excessive des tarifs,
• lorsque, après la période de réglementation des prix, la suppression de toute prise en charge par le budget de la commune aurait pour conséquence une hausse excessive des tarifs.
- Les délibérations qui engendrent une augmentation des dépenses du service ne peuvent entrer en application lorsqu’elles ne sont pas accompagnées du vote des recettes correspondantes.
Le budget annexe permet donc d’établir le coût réel du service afin de déterminer avec précision le prix à payer par les usagers, permettant ainsi d’équilibrer les comptes.
La fixation des tarifs
La règle de base pour un SPIC géré en budget annexe est que, pour chaque usager, les droits de crémation doivent être déterminés en fonction de la valeur du service rendu.
Ainsi, sur la base d’une délibération, l’assemblée délibérante de la commune ou de l’EPCI déterminera ou révisera le taux des tarifs relatifs aux services proposés par le crématorium.
À noter
Un nouveau paramètre financier devra également être pris en compte désormais. En effet, de nombreux gestionnaires de crématoriums ne déclaraient pas la liste des œuvres musicales diffusées durant les cérémonies de funérailles, estimant qu’elles se déroulaient dans la sphère privée. En fait, aucune directive officielle n’était jamais venue confirmer ou infirmer cette pratique. Ce choix avait également été fait par un grand groupe funéraire, et un bras de fer engagé avec la Société des auteurs, compositeurs et éditeurs de musique (Sacem) sur le principe de la rémunération des ayants droit.
Le tribunal judiciaire de Paris a donné raison à la Sacem dans un jugement intervenu le 31 janvier 2024. En effet, les juges ont estimé qu’aujourd’hui les funérailles ne se passent plus uniquement dans un cercle privé, mais que l’on y voit régulièrement des collègues et amis du défunt, voire les amis de la famille. On ne peut plus évoquer le cercle privé.
"La diffusion par la société X d’œuvres musicales lors d’obsèques, sans autorisation préalable des titulaires des droits […], constitue une représentation non autorisée de ces œuvres et, partant, une contrefaçon de droits d’auteur." En marge de ce qui précède, il faut savoir que la Sacem effectue incognito des vérifications sur site, et que la vigilance est donc requise.
Il reviendra à l’organe délibérant de la structure gestionnaire du crématorium de décider de prendre en charge la redevance ou d’indexer en conséquence la facture établie aux familles. Des listes d’œuvres libres de droit sont disponibles sur Internet.
À l’issue d’une rencontre entre les représentants des grandes fédérations funéraires nationales et la Sacem, un accord a été trouvé, qui prévoit un versement unique réalisé par l’opérateur funéraire calculé sur la base du nombre de convois. Les gestionnaires de crématoriums ne seront donc pas directement assujettis à cette redevance.
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Rappel
L’art. L. 2223-22 du CGCT, qui instituait, notamment, la taxe de crémation que pouvaient mettre en place les communes d’implantation des crématoriums, est abrogé.
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L’imposition
Les crématoriums étant des SPIC, ils sont assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée sur la base d’un taux à 20 %. En effet, les règles de TVA applicables à l’exploitation de crématoriums par les communes et leurs groupements ont été détaillées dans une instruction publiée au Bulletin Officiel des Impôts (BOI) du 6 août 2004.
Cette instruction indique que les régies communales et intercommunales qui exploitent un crématorium exercent une activité à caractère concurrentiel et qu’elles doivent être soumises, à ce titre, à la TVA. Cette disposition a été confirmée depuis par la loi n° 2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020 (art. 37).
En ce qui concerne l’impôt sur les sociétés, en application des articles 206-1 et 1654 du Code Général des Impôts (CGI) et de l’art. 165 de l’annexe IV du même Code, les organismes de l’État, des départements ou des communes ayant un caractère industriel ou commercial entrent dans le champ d’application de l’impôt sur les sociétés de droit commun s’ils sont dotés de l’autonomie financière. Ce qui est le cas pour un crématorium géré en régie (hors cas de régie des directes pour les espaces cinéraires, par exemple).
Enfin, en raison de leur caractère sanitaire, les régies municipales (ou des EPCI) sont exonérées de l’assujettissement à la taxe professionnelle.
Notre conseil
N’oubliez pas que le service de crémation est gratuit pour les personnes dépourvues de ressources suffisantes, mais à la condition qu’elles aient manifesté leur accord pour la crémation de leur corps.
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Erreurs à éviter
La jurisprudence a souvent rappelé l’interdiction, dans le cadre de SPIC, de différencier la tarification appliquée en fonction de la qualité de résident ou non (CE, 12 juillet 1995, n° 147947, Commune de Maintenon).
Cette jurisprudence démontre que, le SPIC étant supporté financièrement par l’usager et non par le contribuable, il n’est pas possible de créer des tarifs différents en raison de son lieu de résidence.
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FAQ
Le budget annexe d’un crématorium peut-il générer un excédent ?
Il se peut qu’un excédent soit dégagé par l’exploitation du crématorium, l’activité pouvant être supérieure à l’estimation ayant basé le calcul des tarifs. Dans ce cas, l’excédent est affecté dans le respect de l’art. L. 2311-5 du CGCT.
Références juridiques
• CGCT, art. L. 2224-1 et L. 2224-2, art. L. 2224-21 et art. L. 2311-5
• Code Général des Impôts, art. 206-1 et 1654 et art. 165 de l’annexe IV
• Loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021
• Bulletin Officiel des Impôts du 6 août 2004
• CE, 12 juillet 1995, n° 147947, Commune de Maintenon
• TJ Paris, 31 janv. 2024, n° 20/03574
Marie-Christine Monfort
Transmis par Mariam El Habib
Éditrice Services à la population, WEKA
Résonance n° 217 - Juillet 2025
Résonance n° 217 - Juillet 2025
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