Si la période d’essai est encadrée par le Code du travail quant à sa finalité, elle demeure néanmoins facultative. Mais lorsque l’employeur entend y avoir recours, de nombreuses règles s’imposeront à lui.
Aux termes de l’art. L. 1221-10 du Code du travail : "La période d’essai permet à l’employeur d’évaluer les compétences du salarié dans son travail, notamment au regard de son expérience, et au salarié d’apprécier si les fonctions occupées lui conviennent". Si le Code du travail prévoit la possibilité d’y recourir et définit son objet, son caractère facultatif implique qu’elle doit nécessairement être prévue par un écrit.
La période d’essai doit faire l’objet d’un écrit
Ainsi qu’en dispose l’art. L. 1221-23, "La période d’essai […] (ne se présume pas)". (Elle est) expressément stipulée dans la lettre d’engagement ou le contrat de travail". En conséquence, la période d’essai est inexistante si le salarié en est informé après la date d’embauche (Cass. soc., 25 octobre 1995, n° 93-42.476).
En outre, dans la mesure où la période d’essai est un élément du contrat de travail, elle devra être acceptée par le salarié par l’apposition de sa signature (Cass. soc., 10 avril 2013, n° 11-25.652). En l’absence de signature, la période d’essai ne pourra pas être opposable au salarié (Cass. soc., 23 mai 2017, n° 16-10.544).
Enfin, il ne sera pas possible de recourir à une période d’essai si le salarié a déjà travaillé dans la même entreprise en occupant les mêmes fonctions de façon assez proche dans le temps avant le nouveau contrat de travail (Cass. soc., 26 février 2022, n° 00-40.749) ; et même si la relation antérieure avec l’employeur se caractérisait par un contrat de sous-traitance et non par un contrat de travail, dès lors que les tâches et les fonctions exercées étaient similaires (Cass. soc., 28 janvier 2015, n° 13-21.875).
Durée de la période d’essai
La question de la durée de la période d’essai a été assez complexe au cours de ces 20 dernières années, tant il était technique de déterminer, lorsqu’elles différaient, quelles règles étaient applicables, entre celles du Code du travail et celles des accords collectifs (de branches, ou d’entreprises).
Aujourd’hui, seules les durées de période d’essai découlant d’un accord collectif, plus courtes que celles définies par le législateur, trouveront à s’appliquer. Ainsi, en matière funéraire, il conviendra de retenir les durées prévues à l’art. L. 1221-21 du Code du travail, et non celles prévues à l’art. 214 de la Convention collective (qui prévoyait une durée plus longue pour les ouvriers et employés) :
"Le contrat de travail à durée indéterminée peut comporter une période d’essai dont la durée maximale est :
1° - Pour les ouvriers et les employés, de 2 mois ;
2°- Pour les agents de maîtrise et les techniciens, de 3 mois ;
3°- Pour les cadres, de 4 mois".
S’agissant des Contrat de travail à Durée Déterminée (CDD), il conviendra de se reporter à l’art. L. 1242-10 du Code du travail.
Déduction de la période d’essai d’un CDI à la durée d’un CDD ou d’un stage
Aux termes de l’art. L. 1243-11 al. 1 : "la durée du CDD est déduite de la période d’essai éventuellement prévue dans le nouveau contrat de travail". Il en ira ainsi lorsque la relation de travail, débutée en CDD se poursuit en Contrat de travail à Durée Indéterminée (CDI), également en cas de CDD successifs pour occuper un même poste, et même s’ils sont espacés de plusieurs jours ou semaines (Cass. soc., 19 juin 2024, n° 23-10.783).
S’agissant de la période d’essai relative à un contrat de travail faisant suite à un stage, l’art. L. 1221-24 dispose que "en cas d’embauche dans l’entreprise dans les 3 mois suivant l’issue du stage intégré à un cursus pédagogique réalisé lors de la dernière année d’études, la durée de ce stage est déduite de la période d’essai, sans que cela ait pour effet de réduire cette dernière de plus de la moitié, sauf accord collectif prévoyant des stipulations plus favorables. Lorsque cette embauche est effectuée dans un emploi en correspondance avec les activités qui avaient été confiées au stagiaire, la durée du stage est déduite intégralement de la période d’essai".
Le renouvellement de la période d’essai
Il s’agit d’une option prévue à l’art. L. 1221-21 qui dispose que : "la période d’essai peut être renouvelée une fois si un accord de branche étendu le prévoit. Cet accord fixe les conditions et les durées de renouvellement.
La durée de la période d’essai, renouvellement compris, ne peut pas dépasser :
1°- 4 mois pour les ouvriers et employés ;
2°- 6 mois pour les agents de maîtrise et techniciens ;
3°- 8 mois pour les cadres".
La convention collective nationale des pompes funèbres prévoit la possibilité d’un renouvellement dans son art. 214, aux termes duquel : "la période d’essai peut être renouvelée […]. À l’issue de la période de renouvellement, le salarié sera embauché définitivement ou il sera mis fin définitivement au contrat de travail".
En outre, et il s’agit de la deuxième condition, l’hypothèse du renouvellement de la période d’essai doit être prévue par le contrat de travail, ainsi qu’en dispose l’art. L. 1221-23 du Code du travail. Cependant, le renouvellement ne peut être automatiquement prévu dès la conclusion du contrat de travail (Cass. soc., 17 mars 2010, n° 08-44.248).
Enfin, pour que le renouvellement soit effectif, le salarié doit donner son accord à l’employeur, un accord clair et non équivoque, qui doit intervenir avant le terme de la période d’essai visée par la prolongation.
La rupture de la période d’essai
Le Code du travail ne prévoit pas de règles spécifiques relatives à la rupture de la période d’essai, mais il indique à l’art. L. 1231-1, que celle-ci relève de règles qui échappent au droit commun (telles que celles applicables à la démission ou au licenciement, par exemple). Ainsi, il découle de la jurisprudence que l’employeur n’est pas tenu d’indiquer au salarié les motifs de la rupture.
Il n’existe pas non plus de formalisme légal. La rupture peut donc être notifiée par tout moyen, mais il conviendra, pour celui qui en prend l’initiative, de la formaliser par un écrit et de préférence par une lettre recommandée avec accusé de réception.
En outre, un délai de prévenance devra être respecté. Ce délai de prévenance est fixé aux articles L. 1221-25 et L. 1221-26 du Code du travail, qui prévoient des délais identiques à ceux fixés par la Convention collective nationale des pompes funèbres :
- Rupture à l’initiative de l’employeur (art. L. 1221-25)
"Lorsqu’il est mis fin, par l’employeur, au contrat en cours ou au terme de la période d’essai définie aux articles L. 1221-19 à L. 1221-24 ou à l’art. L. 1242-10 pour les contrats stipulant une période d’essai d’au moins une semaine, le salarié est prévenu dans un délai qui ne peut être inférieur à :
1°) 24 heures en deçà de 8 jours de présence ;
2°) 48 heures entre 8 jours et 1mois de présence ;
3°) 2 semaines après 1 mois de présence ;
4°) 1 mois après 3 mois de présence.
La période d’essai, renouvellement inclus, ne peut être prolon gée du fait de la durée du délai de prévenance".
- Rupture à l’initiative du salarié (art. L. 1221-26) :
"Lorsqu’il est mis fin à la période d’essai par le salarié, celui-ci respecte un délai de prévenance de 48 heures. Ce délai est ramené à 24 heures si la durée de présence du salarié dans l’entreprise est inférieure à 8 jours".
Précisons enfin, que si le salarié ne bénéficie d’aucune indemnité à l’occasion de la rupture de sa période d’essai (à l’exception d’une indemnité compensatrice de congés payés), même si cette dernière intervient à l’initiative de l’employeur. Mais le dernier alinéa de l’art. L. 1221-25 du Code du travail prévoit le versement d’une indemnité si l’employeur ne respecte pas le délai de prévenance : "lorsque le délai de prévenance n’a pas été respecté, son inexécution ouvre droit pour le salarié, sauf s’il a commis une faute grave, à une indemnité compensatrice. Cette indemnité est égale au montant des salaires et avantages que le salarié aurait perçus s’il avait accompli son travail jusqu’à l’expiration du délai de prévenance, indemnité compensatrice de congés payés comprise".
Enfin, lorsque la rupture de la période d’essai a un caractère discriminatoire ou lorsque le motif de la rupture est extérieur à la personne du salarié, le juge pourra constater le caractère abusif de la rupture et accorder une indemnité au salarié, voire prononcer la nullité de la rupture de période d’essai et ordonner la réintégration du salarié.
Xavier Anonin
Docteur en droit - Avocat au Barreau de Paris
Lino Luca
SPE ACX
Résonance n° 215 - Mai 2025
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