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Dans le numéro de Résonance de mars 2022, nous évoquions l’importante réforme opérée par la loi n° 2022-172 du 14 février 2022 en faveur de l’activité professionnelle indépendante. L’entreprise individuelle ("en nom propre" NDLR) représentait en 2020, 74 % des créations d’entreprises et cette forme juridique, qui inclut également les autoentrepreneurs, est particulièrement répandue dans le secteur funéraire. 


Outre une définition légale de l’entreprise individuelle introduite à l’art. L.526-22 du Code de commerce, la loi du 14 février 2022 opère une distinction entre patrimoine personnel et patrimoine professionnel du chef d’entreprise et, par là même, instaure un régime de protection générale du patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel. Il restait néanmoins à définir le périmètre du patrimoine professionnel ainsi que les règles relatives à la faculté de renoncer à sa protection. C’est ce que précisent les décrets du 28 avril et du 12 mai 2022.

Le périmètre du patrimoine professionnel

En premier lieu, rappelons que l’art. L. 526-22 du Code de commerce dispose dans son alinéa 2 que "les éléments du patrimoine de l’entrepreneur individuel non compris dans le patrimoine professionnel constituent son patrimoine personnel", et son alinéa 6 précise que : "Seul le patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel constitue le gage général des créanciers dont les droits ne sont pas nés à l’occasion de son exercice professionnel."

Entré en vigueur le 15 mai 2022, le décret n° 2022-725 du 28 avril 2022 relatif à la définition du patrimoine professionnel de l’entrepreneur individuel crée un art. R. 526-22 au Code de commerce définissant comme suit le périmètre du patrimoine professionnel de l’entrepreneur individuel :
"I.- Pour l’application du deuxième alinéa de l’art. L. 526-22, les biens, droits, obligations et sûretés dont l’entrepreneur individuel est titulaire, utiles à l’activité professionnelle, s’entendent de ceux qui, par nature, par destination ou en fonction de leur objet, servent à cette activité, tels que :
1° Le fonds de commerce, le fonds artisanal […], tous les biens corporels ou incorporels qui les constituent et les droits y afférents […] ;
2° Les biens meubles comme la marchandise, le matériel et l’outillage […], ainsi que les moyens de mobilité pour les activités itinérantes telles que la vente et les prestations à domicile, les activités de transport ou de livraison ;
3° Les biens immeubles servant à l’activité, y compris la partie de la résidence principale de l’entrepreneur individuel utilisée pour un usage professionnel ; lorsque ces immeubles sont détenus par une société dont l’entrepreneur individuel est actionnaire ou associé et qui a pour activité principale leur mise à disposition au profit de l’entrepreneur individuel, les actions ou parts d’une telle société ;
4° Les biens incorporels comme les données relatives aux clients, les brevets d’invention, les licences, les marques, les dessins et modèles, et plus généralement les droits de propriété intellectuelle, le nom commercial et l’enseigne ;
5° Les fonds de caisse, toute somme en numéraire conservée sur le lieu d’exercice de l’activité professionnelle, les sommes inscrites aux comptes bancaires dédiés à cette activité, notamment au titre des articles L. 613-10 du Code de la sécurité sociale(1) et L. 123-24 du présent Code(2), ainsi que les sommes destinées à pourvoir aux dépenses courantes relatives à cette même activité.
II.- Lorsque l’entrepreneur individuel est tenu à des obligations comptables légales ou réglementaires, son patrimoine professionnel est présumé comprendre au moins l’ensemble des éléments enregistrés au titre des documents comptables, sous réserve qu’ils soient réguliers et sincères et donnent une image fidèle du patrimoine, de la situation financière et du résultat de l’entreprise. Sous la même réserve, les documents comptables sont présumés identifier la rémunération tirée de l’activité professionnelle indépendante, qui est comprise dans le patrimoine personnel de l’entrepreneur individuel".
Outre la définition du patrimoine professionnel le décret du 28 avril 2022 prescrit de nouvelles mentions devant figurer "sur les documents et correspondances à usage professionnel".

De nouvelles mentions obligatoires

Le décret du 28 avril 2022 a également créé un art. R. 526-27 au Code de commerce aux termes duquel :
"Pour l’exercice de l’activité professionnelle mentionnée au premier alinéa de l’art. L. 526-22, et sans préjudice des articles D. 123-235 et D. 123-236(3), l’entrepreneur individuel utilise une dénomination incorporant son nom ou nom d’usage précédé ou suivi immédiatement des mots : "entrepreneur individuel" ou des initiales : "EI".
La dénomination figure sur les documents et correspondances à usage professionnel de l’intéressé. Chaque compte bancaire dédié à son activité professionnelle ouvert par l’entrepreneur individuel doit contenir la dénomination dans son intitulé […]".

La faculté de renoncer à la protection du patrimoine personnel

Si, par principe, le patrimoine personnel du chef d’entreprise se trouve désormais protégé, celui-ci peut, par exception, y renoncer. C’est ce que prévoit le nouvel art. L. 526-25 al.1 du Code de commerce aux termes duquel :
"L’entrepreneur individuel peut, sur demande écrite d’un créancier, renoncer à la dérogation prévue au quatrième alinéa de l’art. L. 526-22, pour un engagement spécifique dont il doit rappeler le terme et le montant, qui doit être déterminé ou déterminable. Cette renonciation doit respecter, à peine de nullité, des formes prescrites par décret".

C’est le décret du 12 mai 2022 qui en prévoit les modalités

Ainsi bien entendu, le financement du développement de l’activité professionnelle de l’entreprise individuelle pourra continuer d’être assuré par les divers mécanismes de sûretés personnelles et réelles engageant les ressources et le patrimoine personnels du chef d’entreprise, en particulier à la demande des établissements bancaires dans le cadre de l’octroi de prêts souscrits à titre professionnel.
 
Xavier Anonin
Docteur en droit
Avocat au barreau de Paris

Jérôme Le Lay
Expert-comptable
Cabinet ASF
 
Nota :
(1) Art. L.613-10 du Code de la sécurité sociale : "Les travailleurs indépendants […] sont tenus de dédier un compte ouvert dans un [établissement bancaire] à l’exercice de l’ensemble des transactions financières liées à leur activité professionnelle lorsque leur chiffre d’affaires a dépassé pendant deux années civiles consécutives un montant annuel de 10 000 €".
(2) Art. L.123-24 du Code de commerce : "Tout commerçant est tenu de se faire ouvrir un compte dans un établissement de crédit ou dans un bureau de chèques postaux".
(3) La nouvelle mention "EI" s’ajoute, le cas échéant, à l’obligation de faire figurer sur ces mêmes documents d’autres mentions obligatoires telles que, notamment, le numéro d’immatriculation au registre du commerce, le numéro SIRET, le numéro de TVA intracommunautaire ou son motif d’exonération, le numéro d’habilitation dans le domaine funéraire, etc.

Résonance n° 181 - Juin 2022

Instances fédérales nationales et internationales :

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