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Évolutions législatives, jurisprudentielles et doctrinales, février 2023.
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1 - Caveau non scellé ? L’opérateur engage sa responsabilité !

Le 17 mars 2017 est attribuée, par le maire d’une commune, une concession funéraire dans le cimetière communal pour une durée de 15 ans à compter de cette date. Cette concession a été attribuée à la veuve d’une personne décédée la veille : elle l’y rejoindra quelques mois plus tard.

Le 17 décembre 2017, le lendemain du décès de cette dame, le fils du couple a mandaté une société de pompes funèbres afin d’organiser les obsèques. La facture correspondante est soldée le 13 février 2018.

Dès mars 2018, le fils des défunts a fait constater par la police municipale, puis par huissier, que le caveau n’avait pas été refermé dans les règles de l’art : une plaque de ciment est demeurée non scellée et entourée d’une simple bande adhésive. Il a également pris soin de faire attester par une seconde entreprise de pompes funèbres que les règles de l’art imposaient un scellement complet du caveau.

Devant la résistance de la société de pompes funèbres intervenue lors des obsèques de sa mère, le fils des défunts n’a eu d’autre choix que de l’assigner par-devant le tribunal de proximité de Lure.

Par jugement du 25 juin 2021, le tribunal a estimé que la société de pompes funèbres avait commis une faute engageant sa responsabilité et qu’en conséquence, elle devait indemniser le demandeur à hauteur de 2 023 € au titre de son préjudice matériel tiré des frais de réparation du caveau, d’exhumation et de réinhumation des restes mortels, outre 4 000 € au titre de son préjudice moral.

La société de pompes funèbres a interjeté appel devant la cour d’appel de Besançon. Selon un premier argument de pure procédure (plus exactement, une fin de non-recevoir), la société de pompes funèbres considérait avec une certaine mauvaise foi que le fils des défunts ne justifiait pas de sa qualité pour agir en justice, dès lors que "le titulaire de la concession ne dispose pas d’un droit de propriété au sens classique du terme" et qu’en outre il ne justifiait pas être le titulaire de la concession.

La cour d’appel a rejeté cet argumentaire, en estimant que le fils des défunts était bien fondé à engager une action en justice, dès lors qu’il justifiait être l’héritier du concessionnaire, et qu’au surplus il avait acquitté la facture émise par la société de pompes funèbres.

Sur le fond du dossier, et avec une mauvaise foi tout aussi certaine, la société de pompes funèbres se contentait de soutenir en appel qu’un "caveau n’est jamais étanche et ne devrait de toute façon jamais l’être". Comprendre : qu’il ait été scellé ou pas, peu importe...

Là encore, la cour d’appel a fermement rejeté une telle position. Extraits choisis : "les règles de l’art imposent indubitablement un scellement du caveau […]" ; "La société X est d’autant moins fondée à soutenir l’absence de nécessité d’un scellement qu’elle a elle-même procédé à cette opération en présence de l’huissier de justice après que celui-ci ait constaté le désordre".

L’appel de la société de pompes funèbres a été rejeté, et le jugement de première instance confirmé.
 
Me Anthony Alaimo
Source : Cour d’appel, Besançon, 1re chambre, 7 février 2023 – n° 21/01321
 
Nugue2 - Frais de conservation du corps du défunt en chambre funéraire - ne pas tergiverser...

Nouvel exemple d’un litige entre un centre hospitalier et un particulier sur la prise en charge des frais de conservation du corps du défunt en chambre funéraire.

Le corps de la défunte a été déposé dans une chambre mortuaire de l’établissement de santé le jour de son décès, le 3 juin 2016. La fille de la défunte, par courrier du 17 juillet 2016, a demandé au centre hospitalier la communication du dossier médical de sa mère tout en indiquant qu’étant étudiante, elle n’avait pas les moyens financiers de prendre en charge immédiatement cette dernière et qu’elle souhaitait venir récupérer le corps dès qu’elle pourrait retravailler et que, le cas échéant, elle se contenterait de venir se recueillir sur le lieu prévu par l’hôpital pour les indigents.

Sans nouvelle de l’intéressée, le centre hospitalier a procédé à l’inhumation de sa mère dans le cadre d’obsèques en indigence le 27 septembre 2016. Il a émis un avis des sommes à payer en vue du recouvrement de la somme correspondant aux frais de conservation du corps en chambre mortuaire pour une période de 120 jours.

La fille de la défunte a demandé aux juges, à titre principal, l’annulation de l’avis des sommes à payer, et, à titre subsidiaire, la réduction du montant de la créance du centre hospitalier.

Après avoir rappelé que le juge administratif est compétent pour apprécier le bien-fondé des créances non fiscales des établissements publics de santé (rappel – les mesures mises en œuvre pour obtenir le paiement relevant quant à elles du juge judiciaire de l’exécution), la cour décline le droit applicable et implacable.

Aux termes de l’art. R. 2223-89 du Code Général des Collectivités Territoriales (CGCT) : "Le dépôt et le séjour à la chambre mortuaire d’un établissement de santé public ou privé du corps d’une personne qui y est décédée sont gratuits pendant les trois premiers jours suivant le décès."

Par ailleurs, l’art. R. 1112-69 du Code de la santé publique dispose que : "La famille ou les proches sont prévenus dès que possible et par tous moyens appropriés de l’aggravation de l’état du malade et du décès de celui-ci. […]". Aux termes de l’art. R. 1112-75 du même Code : "La famille ou, à défaut, les proches disposent d’un délai de dix jours pour réclamer le corps de la personne décédée dans l’établissement. […]".

Aux termes de l’art. R. 1112-76 de ce Code, en cas de non-réclamation du corps dans le délai de dix jours, l’établissement dispose de deux jours francs pour faire procéder à l’inhumation du défunt dans des conditions financières compatibles avec l’éventuel avoir laissé par celui-ci ; en l’absence de ressources suffisantes, il est fait application des dispositions du CGCT concernant les indigents.

La fille de la défunte oppose qu’elle n’a été prévenue que tardivement du décès, notamment à raison d’une erreur sur l’avis de décès sur la qualité du déclarant rectifiée ultérieurement par décision de l'officier d'état civil de la commune et qu'il en résulte que le point de départ de la période de garde mortuaire doit être fixé à la date du courrier qu’elle a adressé au centre hospitalier mentionnant qu’elle était informée du décès de mère.

Mais la date de connaissance effective du décès n’a pas d'incidence sur le calcul de la créance. La période de garde mortuaire a commencé, en application des dispositions de l’art. R. 2223-93 du CGCT, au plus tard dans les dix heures ayant suivi le décès. Au surplus, l’acte de décès établi le 3 juin 2016 comportait la signature de la fille et non celle d’un autre déclarant... L’appelante oppose également que la durée pendant laquelle le centre hospitalier a conservé dans sa chambre mortuaire le corps a excédé la période de douze jours résultant des obligations légales de conservation.

Mais la cour retient que le courrier adressé par la fille de la défunte visait, non un projet de transfert du corps de sa mère du lieu d’inhumation vers le caveau familial, mais la conservation du corps de celle-ci en chambre mortuaire dans l’attente de l’obtention des fonds suffisants pour l’organisation des obsèques. Le centre hospitalier a ainsi pu conserver le corps de la défunte jusqu’à l’inhumation intervenue le 27 septembre 2016.

En outre, la fille ne démontre pas, eu égard à la teneur de son courrier et, selon la cour "à ses tergiversations", que si elle avait été informée plus rapidement du décès de sa mère, elle aurait réclamé immédiatement le corps afin d’éviter ou de réduire les frais de conservation en chambre mortuaire.

Par ailleurs, la cour écarte les arguments sur le caractère tardif de l’information sur la durée de conservation du corps et sur le tarif, qui ne sont pas de nature, selon elle, à remettre en cause le bien-fondé de la créance du centre hospitalier. Dans ces conditions, la fille de la défunte n’est pas fondée à soutenir que l’avis des sommes à payer est dépourvu de base légale.

En résumé, la cour ne retient aucune faute à la charge du centre hospitalier, et la fille de la défunte doit l’intégralité des frais de conservation en chambre mortuaire.
 
Me Philippe Nugue
Source : Cour administrative d’appel, Douai, 2e chambre, 7 février 2023 – n° 21DA02205

Résonance n° 189 - Mars 2023

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations