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Le 23 mai dernier, au Palais des congrès de Béziers, Luc Ferry, philosophe et ancien ministre, qui était invité dans le cadre des 10 ans de la SEM-PFO à débattre sur le thème "La mort, le véritable défi de la vie", a répondu aux nombreuses questions qui lui ont été posées sur le sujet. Ci-après quelques-unes parmi les nombreuses auxquelles il a apporté une réponse.

 

 

 

 

Luc Ferry, philosophe et ancien ministre.

 

Question : La mort est elle un thème que le philosophe que vous êtes avez l'habitude d'aborder ?

 

Luc Ferry : Une grande partie de mon dernier livre, "La révolution de l’amour", est consacrée à exposer les grandes philosophies de la mort, depuis les bouddhistes, les épicuriens ou les stoïciens jusqu’à Schopenhauer et Heidegger. Par ailleurs, j’ai aussi écrit avec l’un de nos plus grands biologistes, Axel Kahn, un livre sur l’euthanasie et consacré un séminaire toute l’année dernière aux questions d’éthique de fin de vie. Donc, oui, c’est un sujet auquel je m’intéresse depuis longtemps...

 

Q : Socrate a dit au moment d'affronter la mort, "Philosopher, c'est apprendre à mourir", êtes-vous d'accord ?

 

LF : Non, pas vraiment. Le thème est aussi repris par Montaigne, mais je préfère l’idée que philosopher, c’est apprendre à vivre ; c’est pourquoi d’ailleurs j’ai donné ce titre à un autre de mes livres.

 

Q : Est-il possible d'appréhender sereinement l'idée de notre fin ?

 

LF : Non, je ne crois absolument pas aux vertus consolatrices de la philosophie. On trouve, chez Épicure, l’un des plus grands philosophes grecs, une argumentation qui va traverser les siècles. Elle dit à peu près ceci : "La mort n’est rien pour le sage, car il sait que quand il est là, elle n’est pas là, et quand elle est là, il n’est plus là, de sorte que les vivants ne doivent pas se soucier de la mort". Ce genre d’argument logique n’a jamais convaincu personne. Seules les religions, et avant tout le christianisme, en parlant de la "mort de la mort", c’est-à-dire de la promesse d’une vie éternelle, peuvent parvenir à adoucir l’idée de la mort. Mais il y a une condition : il faut y croire, ce qui, malgré tout, me paraît de plus en plus difficile. Plutôt que les promesses de la foi ou que celles du raisonnement logique, je préfère me dire que la vie est comme toutes nos histoires : elle a une fin et c’est pourquoi il faut la vivre le plus pleinement possible, en évitant au maximum les regrets et les remords. Un choral de Bach, un livre ou un film magnifique ont toujours une dernière note, une dernière page ou une dernière image : est-ce une raison pour ne pas l’écouter, le lire ou le voir ?

 

Q : Ce lieu, le "Pech Bleu", recueille la peine des vivants après la mort de l'autre, comment soulager le deuil et l'aspect vertigineux de l'absence irré- versible et définitive ?

 

LF : Je crois que la seule consolation, si on n’a pas la foi et qu’on ne croie pas non plus dans les vertus des raisonnements trop logiques, c’est de se dire qu’une vie vaut encore d’être vécue, même après la catastrophe absolue qu’est la mort d’un être aimé, quand elle reste humaine, c’est-à-dire quand il reste encore des êtres à aimer. Perdre un enfant est la pire chose qui puisse arriver, mais si vous avez d’autres enfants, vous devez rester là pour eux, et aussi pour vous, parce que subsiste ce qui donne du sens à nos vies, à savoir cette relation d’amour avec autrui. Il reste toujours des rencontres possibles, des amitiés ou des amours possibles, c’est cela, je crois, qu’il faut se dire et dire aux autres. Ce n’est pas toujours facile, je le sais, mais ça a du moins le mérite d’être de l’ordre de la vérité, alors que les illusions de la foi et de la raison pure me paraissent de moins en moins convaincantes...

 

Q : La philosophie classique tend à réconcilier l'homme avec sa propre mort, la philosophie contemporaine cherche à ne pas escamoter le caractère scandaleux de la mort. Entre Sénèque qui dit qu'il faut vivre sans oublier que l'on est mortel et Sartre qui estime que la mort voue notre existence tout entière à l'absurde et interrompt la vie de manière insensée. Quelle est votre position ?

 

LF : Sartre a raison, la mort est absurde, et je n’ai jamais réussi à lui donner la moindre signification. Je dis seulement que c’est une raison supplémentaire de vivre...

 

Q : Peut-on goûter aux plaisirs de la vie quand on est en proie à la crainte de la mort ?

 

LF : Non. D’une manière générale, les peurs sont des calamités. Elles nous rendent égoïstes et bêtes, incapables de penser librement et d’aimer. Quand on est tétanisé par l’angoisse, on ne pense plus qu’à soi, et souvent, l’origine de l’angoisse, comme dans les phobies, est absurde ou insignifiante. Le problème, c’est que nous vivons dans une société de la peur. Nous avons peur de tout : du sexe, de l’alcool, du tabac, de la vitesse, des OGM, de l’effet de serre, du réchauffement climatique, des micro-ondes, des nanotechnologies, de la Turquie, de la mondialisation, de mon ami Claude Allègre, j’en passe et des meilleures... À la limite, c’est cette prolifération des peurs qui devient inquiétante...

 

Q : Est-il possible de quitter cette vie sans regrets ni remords ?

 

LF : Je pense que oui, dans une certaine mesure. En tout cas, c’est le meilleur programme de sagesse de vie qu’on puisse se proposer à mes yeux...

 

 

 

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