Ces derniers mois, L'UGCF a participé à de nombreuses réunions de travail visant à finaliser les projets de textes réglementaires pour l’établissement de nouvelles normes applicables aux crématoriums et aux cercueils. Pierre Vidallet, président de l’Union des Gestionnaires de Crématoriums Français, pour informer nos lecteurs, a bien voulu répondre à nos questions.

 

Résonance : Pouvez-vous nous rappeler les objectifs de l’UGCF ?

Pierre Vidallet : L’Union des Gestionnaires de Crématoriums Français (UGCF) est aujourd’hui la principale organisation professionnelle représentant les exploitants de crématoriums aussi bien publics que privés. Nous rassemblons des professionnels, parfois concurrents sur le terrain, autour de préoccupations communes sans jamais oublier notre vocation première de service public. L’UGCF se veut être l’interlocuteur référent auprès des pouvoirs publics. Ces derniers mois, nous avons participé aux réunions de travail visant à finaliser les projets de textes réglementaires pour l’établissement de nouvelles normes applicables aux crématoriums et aux cercueils. Et nous accompagnerons nos adhérents sur le terrain pour la mise en place de cette nouvelle réglementation.

Résonance : Justement, dans le cadre de cette finalisation des projets de textes réglementaires sur les rejets des crématoriums en matière d’environnement, quelle est votre position ?

Pierre Vidallet : Notre position s’inscrit dans la droite ligne de celle du Manifeste Européen sur la crémation et le respect de l’environnement publié par l’ECN (European Crematoria Network) qui a été remis, en mai 2008, au Parlement européen. L’UGCF, étant le représentant français au sein de l’ECN, nous avons été partie prenante à la rédaction de ce document et nous avons participé, dès le début, aux discussions. D’ailleurs, dans votre précédent numéro, vous en avez rapporté les principaux éléments lors du compte-rendu de la dernière assemblée de l’EFFS.

Résonance : Et pouvez-vous nous faire part de vos propositions ?

Pierre Vidallet : Ce n’est pas nouveau, nous souhaitons "mettre des limites aux limites", c’est-à-dire adopter une position pragmatique, pour les crématoriums, sur les obligations de moyens à satisfaire ce qui contribuera largement à un meilleur respect de l’environnement.

Résonance : Par exemple ?

Pierre Vidallet : Alors que la fréquence des contrôles sur les émissions atmosphériques revient tous les 2 ans, nous proposons une vérification tous les 5 ans, étant donné que les filtres sont une garantie. La préfecture pourrait demander un contrôle supplémentaire si cela se justifie. Question pratique : il faudra déterminer les modalités de contrôle quand on a une seule unité de filtration pour plusieurs appareils. Autre point critique, les limites imposées aujourd’hui pour les poussières notamment sont quasi systématiquement dépassées, les dispositions transitoires devront en tenir compte.

Résonance : Et sur le plan du développement durable ?

Pierre Vidallet : Comme il est indiqué dans le Manifeste Européen : pourquoi tant d’obligations à la fois ? Alors qu’on nous impose des obligations de résultats, la combinaison avec des obligations de moyens peut s’avérer nuisible pour l’environnement. Une illustration : la demande de maintenir les gaz à 850° dans la chambre de postcombustion alors que 800° suffiraient et que le temps de séjour pourrait être diminué de 1,5 seconde. Ce qui permettrait de réaliser ainsi une économie de combustible fossile sachant que les ressources de la planète sont limitées. C’est dans cet esprit, et, d’ailleurs, vous en avez rendu compte dans vos colonnes, que l’UGCF a signé un accord avec GDF-Suez permettant de réduire encore les consommations d’énergie.
Je souhaite également souligner que la multiplication des crématoriums pour des raisons plus mercantiles que désireuses d’offrir de réels services de proximité est contraire à une approche éco-responsable. Ce sujet devra être abordé d’une manière ou d’une autre.

Mais nous n’avons pas de doute sur l’aboutissement des concertations avec les ministères, elles sont aujourd’hui en bonne voie.

Résonance : D’où vient réellement l’origine des polluants ? Et quelles sont vos suggestions en matière de prévention ?

Pierre Vidallet : Ce sujet a déjà été largement traité dans vos précédents magazines. Finalement, un appareil de crémation restitue sous forme gazeuse et solide ce qu’il a reçu. La réglementation va évoluer en matière de cercueils mais ce qui est nouveau et ce sur quoi insiste l’UGCF c’est que les familles et les entreprises de pompes funèbres doivent se sentir concernées par cet aspect. En accompagnement de cette nouvelle réglementation sur les cercueils et leurs contenus, un long travail de sensibilisation devra être réalisé, c’est par une prise de conscience collective qu’on fera disparaître à l’avenir les explosions de bouteilles, les matériaux nocifs pour l’environnement et dangereux pour le personnel de l’établissement ainsi que toutes sortes d’objets préjudiciables comme par exemple, les combinaisons de plongée ou les fusils de chasse chargés !!! Le cercueil, aussi, va suivre "la vague verte" et donc son contenu. Les entreprises de pompes funèbres allemandes ont mis en place une charte à ce propos, qui traite du contenu du cercueil et des vêtements du défunt. Pourquoi ne pas y travailler ?

Résonance : Quels seront les moyens à mettre en œuvre pour les gestionnaires de crématoriums et les collectivités locales de manière à satisfaire aux futures exigences environnementales ?

Pierre Vidallet : Nous ne sommes pas donneurs de leçons, nous souhaitons plutôt faire part du retour d’expériences de nos adhérents. Nous préconisons donc de réaliser d’abord une étude au cas par cas sur l’adaptation du site et des matériels destinés à recevoir les équipements de traitement des rejets. Ensuite, d’étudier l’impact économique et financier réel induit par l’investissement, les intérêts d’emprunts, le surcoût de l’entretien, le plan de renouvellement du matériel, le prix des réactifs, le coût d’évacuation des concentrés toxiques et les coûts supplémentaires en personnel.

Résonance : Avez-vous une recommandation particulière à mentionner ?

Pierre Vidallet : Oui, afin d’éviter la distorsion de concurrence entre un établissement ancien et un nouveau, nous suggérons que ce nouvel arrêté, dans les 6 mois suivant sa parution, soit accompagné d’une perception auprès des usagers. Son montant serait mis sur un compte bloqué, libérable uniquement par la collectivité pour l’investissement en traitement de rejets. Cette proposition aurait 4 avantages : étaler les investissements, faciliter l’accès à l’emprunt des gestionnaires, encourager tous les établissements à engager une étude pour déterminer les coûts supplémentaires au plus près et éviter l’attentisme et la précipitation dans 6 ou 7 ans. Les constructeurs de matériels n’auraient, de toute façon, pas la capacité de suivre et cela nuirait à la compétitivité.

Résonance : Et justement, qu’avez-vous à suggérer aux constructeurs d'équipements ?

Pierre Vidallet : Nous suggérons que les constructeurs mettent au point des matériels spécifiques plus adaptés à la dimension des crématoriums (comme les filtres haute température par exemple). Et à ce sujet, il est plus que temps que nous élargissions la consultation auprès de plusieurs constructeurs européens en ne négligeant pas la qualité et la réactivité de leur maintenance. La maintenance étant déjà le point critique de notre métier.

Résonance : Et quelles en seront les conséquences sur le prix des crémations ?

Pierre Vidallet : On peut s’attendre, suivant les cas, à un surcoût de 80 à 160 € TTC par crémation selon l’établissement et le nombre annuel de crémations. Cela pourra être bien plus pour certains selon le type de contraintes. C’est là où la profession, les collectivités et les préfectures ont un rôle à jouer ensemble vis-à-vis des familles. La protection de notre planète est coûteuse, nous acceptons aujourd’hui de payer une contribution environnementale pour le recyclage de nos biens de consommation. Et je ne crois pas que les familles, si elles sont bien informées, soient hostiles à intégrer cette démarche dans le prix des funérailles.

Et à mon tour de vous poser une question, vous avez compris que l’UGCF a pour vocation de professionnaliser ce métier, en dehors de toutes querelles de chapelles et de luttes d’influence. N'est-il pas temps, par le biais de votre magazine, et avant que ne se tienne la prochaine rencontre au ministère de l’Environnement, de récolter les avis et suggestions tant des gestionnaires de crématoriums que des entreprises de pompes funèbres ?

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations