En cas de décès dans un établissement de santé, ce qui concerne en moyenne nationale 60 à 70 % des décès annuels, le corps de la personne décédée est transporté en chambre mortuaire. Mais de nombreuses questions se posent : quelle est la chambre mortuaire d’un établissement ? Quel véhicule faut-il utiliser ?

Quelle habilitation est nécessaire ? Quelle autorisation faut-il se procurer ?
Nous étudierons successivement chacune de ces questions.

 

1 - Quelle chambre mortuaire ?

L’article L. 2223-39 du Code général des collectivités territoriales (CGCT) précise que tout établissement de santé, qu’il soit public ou privé, doit disposer d’une chambre mortuaire dès lors qu’il s’y produit deux cents décès annuellement, sur une période de trois ans (art. R. 2223-90 du CGCT).

L’article R. 2223-91 précise que les établissements de santé doivent gérer directement leurs chambres mortuaires : ils ne peuvent donc en déléguer la gestion à une entreprise de pompes funèbres. L’article R. 2223-92 du CGCT ajoute qu’ils peuvent faire appel à la coopération hospitalière.

Cette coopération hospitalière peut prendre la forme de communauté d’établissements de santé (depuis 1996), de syndicat interhospitalier (pour les établissements publics, art. L. 6131-1 du Code de la santé publique – CSP), de groupement de coopération sanitaire (avec un établissement privé), de conférence sanitaire de secteur (art. L. 6131-1 du CSP). Il manque à cet éventail de possibilités le réseau de soins spécifiques qui couvre une coopération uniquement sanitaire et ne peut concerner une chambre mortuaire.

Cette multiplicité de formules vise à favoriser la coopération tout en conservant un respect apparent de l’autonomie des établissements, sous le contrôle de l’agence régionale de santé. Par exemple, la conférence sanitaire de secteur et le syndicat interhospitalier se traduisent par une convention de mise à disposition, un groupement d’intérêt public (entre des établissements publics) ou un groupement d’intérêt économique (avec un partenaire privé).

Bien qu’il existe même des rapprochements internationaux entre hôpitaux, en matière de chambre mortuaire seule compte la proximité géographique (relative) de façon à ne pas trop pénaliser les familles utilisatrices de l’établissement non pourvu en chambre mortuaire. Il suffit donc d’un accord entre deux établissements pour que l’un d’eux utilise la chambre funéraire de l’autre.

La mission d’inspection des affaires sanitaires et sociales qui avait enquêté sur le traitement de la mort dans les établissements sanitaires (www.ladocumentationfrançaise.fr / la mort à l’hôpital) a constaté que cette obligation de chambre mortuaire n’était pas toujours respectée : certains établissements sanitaires devant disposer d’une chambre mortuaire appliquent toujours les conditions transitoires prévues par la circulaire n° 18 du 14 janvier 1999 relative aux chambres mortuaires des établissements de santé. Cette circulaire prévoit, en son paragraphe 3.5.1, le transfert du corps de la personne décédée dans une chambre funéraire, l’établissement sanitaire payant les frais de transport ainsi que les frais de séjour des trois premiers jours.

La famille n’étant pas pénalisée par cette disposition, aucune plainte n’est déposée et la situation pourrait perdurer bien que la mission d’inspection ait recommandé la fin de cette pratique.


En conséquence, l’implantation de la chambre mortuaire d’un établissement est très variable : elle peut être dans ses murs, dans un autre établissement, voire dans une chambre funéraire.

2 - Quel véhicule ?

La gestion de la chambre mortuaire étant une activité sanitaire, il en est de même pour le transport de corps avant mise en bière entre le service de soins où le malade est décédé et la chambre mortuaire.

Lorsque le transport du corps de la personne décédée s’effectue à l’intérieur de l’établissement, sans emprunter les voies publiques, ce transport hospitalier est organisé librement par l’établissement : il peut utiliser un véhicule, quel qu’il soit, dédié à cette activité ou un brancard manuel sur roulettes. Ses seules obligations résident dans la décence du mode de transport et dans l’absence de vision de ce transport par les malades, pour des raisons évidentes d’optimisme, qui est un facteur connu de guérison.


Lorsque le transport de corps nécessite de sortir de l’établissement sanitaire, ce transport est toujours une activité sanitaire : une convention avec un opérateur funéraire est donc illégale. Elle a été dénoncée par le Conseil d’État dans son avis du 24 mars 1995 relatif aux chambres mortuaires et a été rappelée par le ministre de l’Intérieur dans sa réponse à la question écrite n° 53566, publiée au Journal Officiel de l’Assemblée Nationale du 8 mars 2006, page 2502.

En effet, l’opérateur funéraire qui effectuerait le transport du malade décédé entre le service de soins et la chambre mortuaire bénéficierait d’un avantage par rapport à ses concurrents funéraires, ce qui est contraire à l’esprit de la loi n° 93-23 organisant la libre concurrence des entreprises funéraires et aux principes de l’ordonnance du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence.

Le transport du malade décédé depuis le service de soins jusqu’à la chambre mortuaire doit donc être réalisé par l’établissement sanitaire.


L’article L. 2223-43 du CGCT précise que les établissements sanitaires qui effectuent le transport de corps avant mise en bière doivent être habilités au vu de la capacité professionnelle des agents (le permis de conduire suffit) et de la conformité des véhicules fixées par l’article L. 2223-23 du CGCT. Ces véhicules circulant sur la voie publique (ne serait-ce que pour traverser une voie publique) sont donc des véhicules de transport avant mise en bière définis aux articles D. 2223-110 à D. 2223-115 du CGCT.

3 - Quelle habilitation ?

L’article L. 2223-43 du CGCT précise que les établissements sanitaires qui effectuent le transport de corps avant mise en bière doivent être habilités pour le transport avant mise en bière, avec la précision qu’il s’agit de la seule mission du service extérieur des pompes funèbres qu’ils peuvent exercer. Plus de précisions sont données au point 1 Quel véhicule ?

Cette habilitation ne vise pas les directeurs de maisons de retraite bien que ces derniers puissent donner leur accord à un transport vers une chambre mortuaire. Les maisons de retraite, ayant une activité médico-sociale, ne sont pas concernées non plus par l’interdiction de faire appel à un transporteur funéraire qui s’applique uniquement aux établissements sanitaires.

4 - Quelle autorisation ?

Un article spécifique du CGCT traite de cette question du transport à la chambre mortuaire. L’article R. 2223-95 du CGCT précise que le transport vers une chambre mortuaire, depuis un établissement de santé ou une maison de retraite, s’effectue sur accord du directeur de l’établissement après que deux conditions ont été remplies.

La première de ces conditions est le respect des 4° et 5° de l’article R. 2213-8 du CGCT, c’est-à-dire la déclaration du décès à l’état civil et l’accord du médecin – chef de service. Cet accord du médecin est détaillé dans la deuxième condition de l’accord du directeur d’établissement, qui est présentée plus loin.

Le respect de ces 4° et 5° est capital sur le plan juridique car ces alinéas sont une partie des conditions permettant au maire d’autoriser un transport de corps avant mise en bière : l’article R. 2223-95 du CGCT impose de respecter le 4° et le 5° de l’article R. 2213-8 mais non l’article lui-même dans son intégralité. La conséquence en est que l’autorisation du maire pour un transport avant mise en bière n’est pas nécessaire lors d’un transport de corps à une chambre mortuaire depuis un hôpital ou une maison de retraite.

En contrepartie de cette absence d’autorisation du maire de la commune de dépôt du corps, le maire de la commune de destination du corps (celle de la chambre mortuaire) est informé s’il s’agit d’un autre maire. Ainsi, dès 2002, date du décret modifiant cet article R. 2223-95 du CGCT, la simplification des autorisations mortuaires était en marche.

La deuxième condition de l’article R. 2223-95 du CGCT est le respect des conditions de transport avant mise en bière décrites par l’article R. 2213-9 du CGCT, c’est-à-dire l’absence de problème médico-légal et de maladie contagieuse, ainsi qu’un bon état du corps.

5 - Conclusions

Le transport d’une personne décédée dans un établissement de santé vers la chambre mortuaire de l’établissement révèle sa complexité lorsqu’il doit être appliqué. On retiendra que :
- la chambre mortuaire de l’établissement est celle choisie par convention entre deux établissements si ce n’est celle du lieu du décès, voire une chambre funéraire ;
- le mode de transport est libre à l’intérieur d’un établissement ;
- quand le trajet impose de circuler sur les voies publiques, un véhicule de transport de corps avant mise en bière est nécessaire. Ce véhicule sera utilisé par du personnel hospitalier et l’établissement de santé sera habilité pour les transports avant mise en bière ;
- l’autorisation du maire n’est pas nécessaire pour ce transport avant mise en bière particulier.


Claude Bouriot

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations