Se rencontrent assez fréquemment dans les règlements des cimetières (voire dans les contrats de concession eux-mêmes), des clauses prévoyant la résiliation automatique de la concession funéraire (après mise en demeure) dans le cas où son titulaire ne respecterait pas certaines de leurs dispositions. Le plus souvent, il s’agit de dispositions ayant trait soit à des obligations de construction soit à des obligations d’entretien.
Certes, le maire peut indubitablement imposer des obligations aux titulaires de concessions, par des stipulations introduites dans le contrat de concession, ou, par l’utilisation de son pouvoir de police des cimetières au moyen de dispositions arrêtées dans le règlement du cimetière.

L’illégale obligation de construire et la légalité de l’obligation d’entretien

Cependant il ne peut y avoir que des obligations d’entretien, une obligation de construire dans un certain délai demeure indubitablement illégale. Ce point a été d’ailleurs récemment rappelé dans une réponse écrite à une question du sénateur Jean-Louis Masson. Selon le ministre de l’intérieur, "Que ce soit au titre du contrat de concession funéraire ou du respect de l'ordre public, le concessionnaire se doit d'entretenir la concession acquise même si celle-ci n'est pas encore bâtie et utilisée. Pour autant, aucune disposition n'oblige le concessionnaire à construire sur ce terrain, notamment à la suite immédiate de l'achat, un quelconque caveau, tombeau ou monument. Le fait pour le titulaire de la concession de laisser cet espace en friche, c'est-à-dire non bâti, ne peut pas lui être reproché. Il doit cependant procéder à l'entretien du terrain et s'assurer du bon état de propreté de ce dernier sauf à contrevenir au bon ordre et à la décence du cimetière ou au respect de l'ordre public. Le maire, au titre de la police des cimetières, serait alors fondé à intervenir." (Rép. min. n° 3163, JO Sénat Q 27 mars 2008 p. 621).
Il importe cependant de préciser que les obligations ainsi fixées sont limitées quant à leur objet (bon ordre, décence, hygiène et sécurité dans le cimetière) d’une part, et que, d’autre part, la résiliation de la concession ne peut jamais constituer une sanction automatique du non respect de ces obligations.

La résiliation une sanction contestée

Ces principes ont été rappelés par le ministre de l’intérieur dans une réponse au député Bernard Derosier : "L’article L. 2223-13 du code général des collectivités territoriales permet aux communes, sans qu’il s’agisse d’une obligation, de concéder des terrains aux personnes qui désirent y fonder leur sépulture et celle de leurs enfants ou successeurs. Cet article précise que les bénéficiaires de la concession peuvent construire sur ces terrains des caveaux, monuments et tombeaux. Il découle de ces dispositions que les communes ne peuvent, ni dans l’acte de concession ni dans le règlement du cimetière, exiger des concessionnaires que les terrains soient obligatoirement aménagés. L’article L. 2223-12 du code précité prévoit par ailleurs que tout particulier peut faire placer sur la fosse d’un parent ou d’un ami une pierre sépulcrale ou un autre signe distinctif de sépulture sans avoir à acquérir une autorisation préalable. Sur ce point, le Conseil d’Etat a considéré (arrêt Chambre syndicale des entreprises artisanales du bâtiment de Haute-Garonne, 18 février 1972) comme excédant les pouvoirs de police du maire un arrêté comportant des dispositions qui limitaient la hauteur des dalles, des encadrements et monuments funéraires et soumettant à autorisation préalable tout projet de construction de tombe ou caveau à des fins esthétiques. Cette jurisprudence a été confirmée par un arrêt du 11 mars 1983, Commune de Bures-sur-Yvette. Le maire aurait toutefois la faculté, dans le cadre des ses pouvoirs de police des cimetières, d’exiger la construction de caveaux en présence de contraintes hydrogéologiques afin d’assurer le respect de la salubrité au sein du cimetière, sous le contrôle éventuel du juge administratif. La jurisprudence a par ailleurs reconnu au maire le droit de prescrire que les terrains seront entretenus par les concessionnaires en bon état de propreté et de solidité. En cas de méconnaissance de ces prescriptions, il est tenu d’en dresser un procès-verbal adressé au juge des contraventions. Il ne peut, en revanche, sauf urgence ou péril imminent, procéder d’office à l’exécution des mesures nécessaires. Le régime juridique des concessions relève des contrats administratifs qui confèrent au concessionnaire un droit d’occupation du domaine public. Ce dernier n’a cependant pas le caractère précaire et révocable s’attachant généralement aux occupations du domaine public. Dans ces conditions, la commune n’est pas en mesure d’engager une procédure de résiliation d’un contrat de concession. Les textes lui confèrent cependant une faculté de reprise des concessions en état d’abandon, après un délai minimal de trente ans à compter de l’acte de concession et dix ans après la dernière inhumation, lorsque l’état d’abandon manifeste se décèle par des signes extérieurs nuisibles au bon ordre et à la décence du cimetière." (Rép. min. n° 26311, JOAN Q 24 mai1999 p. 3174)

Dès lors, les résiliations automatiques ne sont pas opposables aux titulaires de concessions, en raison de la nature particulière de ce contrat. La résiliation d’une concession implique toujours que le juge administratif soit saisi à cette fin.

Pour mettre fin au contrat de concession de sa propre initiative, la commune dispose seulement du droit de reprise (D. Dutrieux, La reprise des concessions funéraires : JCP A, 18 avril 2006, 1100, p. 565).

La nature particulière du contrat de concession funéraire

On peut rappeler au préalable que l’acte de concession peut prendre la forme soit d’une convention (d’un contrat proprement dit) soit d’un arrêté du maire. Le juge, quelle que soit la forme retenue, analyse toujours la concession comme un contrat (TA Paris 21 avril1971, Ville de Paris c/ Sieurs Ribette et Manoury et Dame Ropert : AJDA 1972 p. 164, note P. Godfrin).
Ce contrat à la base de la concession porte sur un bien immobilier - un emplacement dans le cimetière - appartenant à la commune et intégré dans le domaine public de celle-ci (CE 28 juin 1935, "Marécar” : Rec. CE p. 734.). Comme tout contrat portant occupation du domaine public (décret-loi du 17 juin 1938), la concession est donc un contrat administratif (CE, Ass., 21 octobre 1955, Demoiselle Méline : Rec. CE p. 491.). Toutefois, ce contrat se différencie des autres contrats portant occupation du domaine public ; il n’est, en effet, ni précaire ni révocable.

Le titulaire d’une concession, bien qu’il ne jouisse pas juridiquement d’un véritable droit de propriété sur le terrain concédé (puisque la concession est située sur le domaine public), bénéficie d’un régime très protecteur s’apparentant souvent à celui du droit de propriété. Le Tribunal des conflits qualifie le droit du titulaire d’une concession funéraire de droit réel immobilier d’une nature particulière (TC 4 juillet 1983, François : Rec. CE p. 539).

L’impossibilité de prévoir une résiliation automatique

Le contrat de concession, n’étant ni précaire ni révocable, "la commune n’est pas en mesure d’engager de procédure de résiliation" (Rép. min. n° 26311 précitée).

D’ailleurs, le tribunal administratif de Lille, à propos d’un contrat d’occupation d’une case de columbarium - auquel il a décidé d’appliquer le régime juridique des concessions funéraires - a récemment annulé une disposition du règlement du cimetière d’une commune qui contenait une clause de résiliation (TA Lille 30 mars 1999, Mme Denise Tillieu et autres c/ Commune de Mons-en-Baroeul : Les Petites Affiches 2 juin 1999, p. 17, note D. Dutrieux).

La compétence du juge administratif

En cas de non respect des obligations imposées dans le contrat de concession ou le règlement du cimetière, le maire n’a que le pouvoir de dresser procès-verbal des infractions et de saisir le juge des contraventions (art. R. 610-5 du Code pénal ; voir Rép. min. n° 26311 précitée).

C’est en revanche au juge administratif que l’autorité municipale devra s’adresser si elle souhaite voir annuler (quand il n’y a pas encore eu d’inhumation dans la concession) ou résilier le contrat de concession, puisque la commune ne saurait d’elle-même mettre fin à ce type de contrats administratifs (TA Paris 21 avril 1971, Ville de Paris c/ Sieurs Ribette et Manoury et Dame Ropert, précité).

Damien Dutrieux

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations