Les questions :
- Quelle est la distance minimale entre un cimetière et un débit de boissons ?
- L'opérateur funéraire effectuant des exhumations lors des reprises de concessions abandonnées doit-il être habilité ?
- Combien de temps minimum un caveau quelconque, non étanche, doit-il rester étanche à l'eau dans un cimetière ?
- Sur quel critère un maire se base-t-il pour accorder à un indigent le paiement des funérailles de cette personne dépourvue de ressources suffisantes ?
- Lors du décès d'un malade du sida, le maire interdit-il les soins de conservation avec autorisation de transport avant mise en bière ou impose-t-il la mise en bière immédiate en cercueil simple ?
- L'entreprise de Pompes Funèbres peut-elle être mandatée par une personne pour prendre une concession en son nom ?
- Une entreprise de Pompes Funèbres qui gère une chambre funéraire peut-elle faire paraître des avis nécrologiques indiquant le lieu de dépôt du corps (chambre funéraire) avec l'entreprise organisatrice des funérailles ?
- Comment procède une commune pour reprendre des terrains communs (tombes individuelles) sur lesquels ont été édifiées des caveaux de famille ?
- Comment fait un concessionnaire pour vendre sa concession et le monument qui la recouvre ?
- Le maire peut-il accepter un paiement de la concession échelonné sur cinq ans ?
Les réponses :
- L'article L. 3335-1 du code de la santé publique, permet au préfet, dans le cadre de la lutte contre l'alcoolisme, de fixer la distance entre un cimetière et un débit de boissons. Cette distance est calculée de porte à porte en suivant les voies ouvertes à la circulation publique. Sans fixation de seuil minimal au plan national, cette distance est donc variable selon le département.
- La reprise de tombes arrivées à échéance et de concessions à l'état d'abandon est une mission de service public qui ne peut être déléguée (circulaire n° 97-211 du 12 décembre 1997). Cette activité de gestion du cimetière est indépendante du service extérieur des pompes funèbres. La réglementation nationale ne requiert donc pas l'habilitation funéraire, qui reste réservée au service extérieur des pompes funèbres. Cependant, le maire peut exiger cette habilitation dans son appel d'offres, en supplément, comme gage d'expérience des exhumations.
- Un caveau de cimetière, quel qu'il soit : étanche ou non étanche, ne doit pas contenir d'eau pour permettre la réduction du corps de la personne humaine en ossements destinés à l'ossuaire. Cette aptitude à l'emploi est soumise à la garantie décennale des ouvrages définis par l'article 1792 du code civil, ainsi que l'a jugé la cour de cassation, pourvoi n° 02-17388 dans son audience du 17 décembre 2003.
- Il n'existe pas un mais des critères d'insuffisance de ressources. Une somme d'argent de poche inférieure à 45 euros par mois, pendant les deux mois précédents, donne droit à l'attribution de produits d'hygiène dans les prisons (circulaire du ministre de la Justice du 1er juillet 2001 relative à la lutte contre l'indigence dans les établissements pénitentiaires). Ce montant de 45 euros peut être pris comme référence pour toutes les personnes âgées hébergées dans un établissement sanitaire ou médico-social financé par leur caisse de retraite. Par ailleurs, pour avoir droit à la ligne téléphonique sociale (réception des appels uniquement, sans redevance), le titulaire doit être bénéficiaire du revenu minimum d'insertion (RMI), de l'allocation spécifique de solidarité ou de l'allocation adulte handicapé notamment. Ces critères de minima sociaux cités par l'article R. 20-34 du Code des postes et télécommunications sont des références indiscutables pour tout maire confronté au financement des funérailles de personne dépourvue de ressources suffisantes, en l'absence de famille solvable.
- Le conseil d'Etat a jugé, dans son arrêt en date du 29 novembre 1999, que l'arrêté du 20 juillet 1998 relatif aux maladies contagieuses interdisant certaines opérations funéraires était illégal. Le conseil d'Etat a rétabli l'arrêté précédent du 18 mai 1976, à l'exception de la mise en bière : la mise en bière pour une personne décédée du sida, dans l'arrêté de 1986, est devenue une interdiction des soins de conservation puisque le conseil d'Etat n'a, apparemment, pas annulé cette mesure. En fait, l'illégalité de l'arrêté de 1998 entraîne son annulation et le maintien de l'arrêté antérieur de 1986. Cet arrêté de 1986 était tout aussi illégal, mais comme il n'a pas été contesté dans les délais, il a acquis sa validité. La circulaire du ministère de la santé en date du 26 mai 2000 précise que c'est l'arrêté de 1986 qui s'applique, ainsi que les certificats de décès correspondants. Cette obligation de mise en bière était contestée par les associations de malades du sida, qui ne contestent plus apparemment. Cela signifie que l'arrêté de 1986 ne serait pas appliqué, mais plutôt l'arrêté de 1998 (interdiction des soins de conservation avec possibilité de transport avant mise en bière).
- "Acheter une concession" est une banalité qui recouvre un contrat administratif de mise à disposition d'un terrain public, pendant une durée déterminée, à une personne privée, moyennant certaines conditions (paiement de la redevance, respect du règlement du cimetière, entretien de la tombe). Ce contrat n'est valable qu'avec les signatures des parties prenantes qui sont le représentant de la commune d'une part, et le concessionnaire d'autre part. Le mandatement de l'entreprise de pompes funèbres peut donc concerner le paiement de la concession, mais non la signature du contrat. Ce point a été précisé dans la question écrite n° 27424 parue au JO de l'assemblée nationale du 24 mai 1999, page 3175. C’est un problème insoluble pour les contrats obsèques.
- La Cour d'appel de Lyon a statué, le 15 mai 2003, que l'indépendance nécessaire entre la chambre funéraire et l'entreprise de pompes funèbres nécessitait qu'aucune raison sociale ne soit accolée à l'adresse de la chambre funéraire dans les avis nécrologiques.
- Il est certain que des caveaux de famille ne peuvent se trouver sur des terrains communs affectés à une personne unique, indigente ou non, hors le cas de mauvaise gestion historique du cimetière. Le maire peut bien entendu entamer des pourparlers avec les familles pour les convaincre de prendre des concessions. Encore faut-il les créer car il ne peut y avoir de demande si les familles obtiennent gratuitement une simili concession. De plus, le maire doit fixer l'échéance des terrains communs ou délai de rotation des tombes, qui dépend de la capacité du sol à réduire les corps à l'état d'os blancs. Cette échéance doit être rendue publique par arrêté du maire ou publication d'un règlement de cimetière. Une fois cette échéance rendue publique, le maire peut exiger la restitution du terrain comprenant un caveau de famille ou sa transformation en concession.
- Une concession est personnelle et ne peut être vendue puisqu'il s'agit d'une occupation du domaine public. Le concessionnaire peut toutefois la céder, gratuitement puisqu'elle est hors commerce, si elle n'a pas déjà été occupée (Cour de cassation, Billot contre Mund, 6 mars 1973), avec accord du maire. La cession de concession s'effectue en présence du maire, gratuitement, avec engagement du repreneur de respecter le règlement de cimetière ou la réglementation des concessions (entretien de la tombe, respect des concessions voisines et du cimetière). Puisque l'acte de concession est un contrat d'occupation du domaine public, le maire signe alors un acte de substitution de concession avec l'ancien concessionnaire et le repreneur. Le maire ne peut s'y opposer que pour des motifs liés à l'ordre public. Le monument construit sur la concession, qui appartenait à l'ancien concessionnaire, peut être vendu, donné, détruit sans l'accord du maire, mais dans le respect du règlement de cimetière. Si la concession comportait une inhumation, alors le concessionnaire ne peut la céder qu'à un descendant (Réponse ministérielle n° 28641, JO Assemblée nationale du 5 août 1991, page 3165).
- Ce point relatif aux finances publiques a été traité par la réponse du ministre à la question n° 59 parue au JO de l'Assemblée nationale du 13 janvier 2004, page 339. L'article L. 2223-15 du CGCT soumet l'octroi d'une concession au versement d'un capital, lequel pourrait donc être échelonné. Toutefois, l'article 23 du décret n° 62-1587 du 29 décembre 1962 portant règlement général de la comptabilité publique impose au maire, ordonnateur de la commune, d'inscrire à son budget l'intégralité du montant dû et d'émettre un titre de perception. Par contre, l'article 11 de ce même décret stipule que les comptables publics sont seuls chargés du recouvrement des créances constatées par un titre. Les percepteurs, qui sont responsables sur leurs deniers propres du recouvrement des dettes publiques, peuvent donc accorder un paiement échelonné en fonction des sommes dues et des ressources des débiteurs.
Claude Bouriot,
Co-auteurdu code pratique
des opérations funéraires
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