A l’évidence les droits des plus proches parents des fondateurs des concessions funéraires et de leurs héritiers, en ce qui concerne la faculté de solliciter l’exhumation du corps des concessionnaires, qui doivent être spécifiquement distingués de leurs héritiers, posent un problème majeur dès lors qu’il n’existe pas de jurisprudence administrative permettant d’apprécier le contenu et l’étendue des pouvoirs des Maires en la matière. Force est de constater que la doctrine est partagée sur les solutions juridiques à donner, certains auteurs estimant que les volontés exprimées par le concessionnaire, appréciées en fonction des dispositions de la Loi du 15 Novembre 1887 s’éteignent avec la disparition de sa personnalité juridique liée aux conséquences de la mort.

A notre sens ces analyses sont erronées dès lors que la volonté du fondateur de la concession ne doit pas être appréciée en prenant pour référence la Loi de 1887, alors qu’elles relèvent du statut juridique de la concession funéraire issu de la définition légale fournie à l’article L 2223-13 du Code Général des Collectivités Territoriales ci-après rappelé :

"Lorsque l’étendue des cimetières le permet, il peut être concédé des terrains aux personnes qui désirent y fonder leur sépulture et celle de leurs enfants et successeurs".

Or on sait que les concessions funéraires constituent des contrats administratifs quel que soit l’acte qui confère au titulaire ses droits (contrat ou acte administratif individuel) et qu’ils engagent aussi bien le bénéficiaire de la sépulture que l’administration communale, autorité propriétaire de l’espace qui demeure affecté au domaine public.

Dans une réponse écrite à la question posée par Monsieur le Député François Calvet, Monsieur le Ministre d’Etat, Ministre de l’Intérieur et de l’Aménagement du Territoire, en date du 12 Juillet 2005, a rappelé un principe fondamental à l’égard des facultés offertes au concessionnaire de rétrocéder à la commune la concession, qui lui est strictement limitée et point ouverte aux héritiers, "lesquels sont tenus de respecter les contrats passés par leur auteur , soit le fondateur de la sépulture".

Cette position avait été clairement défendue dans notre ouvrage "LA COMMUNE L’AMENAGEMENT ET LA GESTION DES CIMETIERES" co écrit avec Monsieur André Autran, Docteur en Droit, Directeur Général des Services Juridiques la Ville de Marseille.
De surcroît les pouvoirs du Maire, en ce qui concerne l’interprétation des volontés d’un défunt, dont plus particulièrement le lieu de sépulture qui peut être au centre d’un  débat, viennent d’être réaffirmés par l’Arrêt du Conseil d’Etat  en date du 29 Mars 2006, req. N° 284-276 puisqu’à l’occasion de l’exécution d’une libéralité faite en faveur d’un organisme public, la Haute Assemblée a reconnu au Maire le pouvoir de s’opposer à son exécution dès lors que les volontés du donateur étaient susceptibles d’être contraires à l’appréciation faite par les autorités civiles : dans ce cas le contentieux développé autour de la décision administrative ressort de la compétence du juge administratif.
La position qui consiste à suspendre les volontés d’un défunt après son décès ne peut que nous interpeller, car la loi du 15 Novembre 1887, dans son article 3 pose un principe particulièrement clair :

"Tout majeur ou mineur émancipé, en état de tester, peur régler les conditions de ses funérailles, notamment en ce qui concerne le caractère civil ou religieux à leur donner et le mode de sépulture".
Arguer que la portée extraordinaire de la Loi du 15 Avril 1887 s’éteint à partir des jours qui succèdent aux funérailles, nous paraît excessif, car même si le défunt perd sa personnalité juridique, il n’en demeure pas moins vrai que les volontés, dès lors qu’elles seraient clairement exprimées doivent être respectées, et qu’il appartient au Maire par application des décisions du Conseil d’Etat, d’assumer le rôle d’administrateur du lieu de la sépulture, notamment les concessions funéraires.

Dans le cas contraire on pourrait légitimement s’interroger sur l’utilité de cette loi et au delà de la finalité et de  l’affectation des concessions funéraires .

Cette position est étayée par la nature contractuelle attachée aux concessions funéraires et les utilisations qui découlent de l’article L 2223-13 du Code général des Collectivités Territoriales.

De surcroît la jurisprudence civile paraît particulièrement précise, la Cour de Cassation dans ses Arrêts des  26 mai 1959 et 17 Février 1982 , note Beaubrun, in Dalloz 1983, p. 255 ayant accepté toute sorte de preuve de la manifestation des volontés du défunt.
Or la force testimoniale du contrat de concession ne paraît pas devoir être remise en cause.
Certes le droit d’exhumer un corps appartient au plus proche parent d’un défunt en vertu de l’article  R 2213-40 du CGCT, l’unanimité étant requise en cas de pluralité de parents de même degré, mais l’autorisation est délivrée par le Maire de la commune  où doit se pratiquer l’exhumation qui devra exiger la présentation des documents relatifs au lieu de sépulture et à son statut, ce qui favorise une étude approfondie de chaque dossier.

Or exhumer le corps d’une personne qui par contrat a déterminé son propre lieu de sépulture irait à l’encontre des volontés à caractère testimonial d’un fondateur d’une concession, d’autant plus que le respect du principe de légalité accorde une position hiérarchique supérieure aux prescriptions légales par rapport aux normes réglementaires.

En tout état de cause cette exégèse juridique qui oppose les tenants des protecteurs des volontés exprimées par un défunt aux partisans d’un régime juridique plutôt libéral devrait à terme donner lieu à une position des juridictions administratives comme cela vient de se produire à l’occasion de la responsabilité des Maires face aux vols commis dans les cimetières et la surveillance des opérations funéraires, qui permettrait ainsi de clarifier une situation assez ambiguë.

Jean Pierre TRICON

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations