Hormis le fondateur de la concession funéraire, qui peut inscrire son nom sur un monument funéraire et surtout quand ? Cette question vient enfin de recevoir une réponse par la Cour de cassation.

 
Titulaire de la police du cimetière (CGCT, art. L. 2213-9), le maire autorise les inscriptions placées sur les pierres tumulaires et les monuments funéraires (CGCT, art. R. 2223-8). Il pourra à cet effet interdire une inscription portant manifestement atteinte à l’ordre public dans le cimetière (CE, 4 févr. 1949, Moulis c/ Maire Sète : Rec. CE, p. 52). Néanmoins, ces inscriptions ne sont pas seulement les épitaphes que choisissent les familles pour rendre un dernier hommage au défunt. Il va s’agir également de mentionner des patronymes sur le monument funéraire érigé sur une concession. Or, les textes demeurent muets sur la question de savoir quels sont les droits des membres de la famille à ce titre.

Doivent être distingués celui qui a fondé la sépulture (le fondateur que le Code général des collectivités territoriales (CGCT) qualifie de concessionnaire, les héritiers de ce dernier qualifiés d’ayants cause ; CGCT, art. L. 2223-15) et ses héritiers. Si la jurisprudence, qui reconnaît de nombreuses prérogatives au fondateur (et notamment le droit de désigner les bénéficiaires du droit à l’inhumation ; V. M. Perrier-Cussac, Les droits du titulaire d’une concession funéraire : JCP N 1990, I, p. 343), elle limite en revanche celles des héritiers du fondateur, tenus en quelque sorte au respect de la volonté initiale de celui-ci.

C’est dans ce cadre qu’est intervenue la première chambre civile de la Cour de cassation, le 12 janv. 2011, qui, au visa de l’article 1128 du Code civil (les concessions funéraires ont toujours été considérées comme en dehors du commerce ; V. notamment : D. Dutrieux, L’inhumation en terrain privé : JCP N 2006, 1370), a cassé l’arrêt de la cour d’appel de Grenoble du 12 oct. 2009 ayant, notamment, statué sur une demande visant à la suppression d’une inscription d’un nom de famille sur un monument funéraire.
Parmi les héritiers, certains avaient ajouté leur patronyme, différent de celui du défunt, après avoir procédé à la réfection du caveau. La première chambre civile de la Cour de cassation reproche à la cour d’appel d’avoir débouté l’auteur de la demande visant à la suppression alors qu’en "statuant ainsi, sans constater que le nombre de places disponibles dans le caveau permettrait d’y inhumer les époux Y..., lesquels en ce cas ne pourraient exiger l’inscription de leur patronyme avant le décès de l’un d’eux, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision".

Ainsi, les héritiers jouissent d’un droit à ajouter, à celui du fondateur, leur patronyme, mais ce droit ne peut s’exercer qu’une fois intervenue une inhumation dans la concession d’une personne possédant ce nom. Les travaux de réfection, comme d’ailleurs le renouvellement (CE, ass., 21 oct. 1955, Méline : Rec. CE, p. 491), opérés pour le compte de l’ensemble des ayants cause et ne modifiant pas les droits respectifs sur la sépulture, ne donnent donc aucun droit particulier à ceux qui les ont réalisés.
Il est possible d’ajouter, comme le rappelle Jean Hérail (JurisClasseur Notarial Formulaire, Fasc. 10 : Sépulture, § 53), qu’étant hors du commerce, les concessions ne peuvent faire l’objet d’une cession à titre onéreux, ni être comprises dans un partage successoral ou après divorce, aussi bien selon la jurisprudence judiciaire (Cass. req., 9 juin 1898 : S. 1898, 1, 315 et 1902, 1, p. 134. – CA Paris, 22 mai 1924 : DH 1924, p. 551) que celle administrative (CE, 11 oct. 1957, Hérail : Rec. CE, p. 523 ; AJDA 1957, 2, 429, concl. Kahn).

Damien Dutrieux,
consultant au CRIDON Nord-Est, maître de conférence associé à l’Université de Valenciennes.
 
Annexe :
Arrêt n° 47 du 12 janvier 2011 (09-17.373) - Cour de cassation - Première chambre civile

Cassation partielle

Demandeur(s) : M. G... X...
Défendeur(s) : M. A... Y... ; Mme S... X..., épouse Y...
Attendu que Y... Z... et A... X..., mariés sous le régime de la communauté réduite aux acquêts, sont décédés respectivement le 21 juin 1989 et le 31 déc. 1995, laissant pour leur succéder leurs deux enfants S... et G... ; que, par jugement en date du 21 fév. 2008, le tribunal de grande instance de Grenoble a, notamment, ordonné le partage de la communauté ayant existé entre les époux X... Z... ainsi que de leurs successions, attribué à Mme S... X..., épouse Y... la parcelle sise à Cognin-les-Gorges cadastrée section 1 et à M. G... X... les parcelles situées dans la même commune section 2, 3 et 4 et débouté M. G... X... de sa demande tendant à la suppression du nom de Y..., que les époux Y... avaient fait apposer sur le caveau de la famille X... ;
Sur le premier moyen :
[…]
Et sur le second moyen :
Vu l’article 1128 du Code civil ;
Attendu que pour débouter M. G... X... de sa demande à voir supprimer le patronyme Y... sur la stèle, l’arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que si aucune personne portant le nom de Y... n’est actuellement inhumée dans le caveau familial, M. et Mme Y..., qui ont procédé à la réfection du caveau, ont vocation à y être inhumés, ainsi que leurs enfants ;
Qu’en statuant ainsi, sans constater que le nombre de places disponibles dans le caveau permettrait d’y inhumer les époux Y..., lesquels en ce cas ne pourraient exiger l’inscription de leur patronyme avant le décès de l’un d’eux, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision ;
Par ces motifs :
Casse et annule, mais seulement en ce qu’il a attribué à Mme S... X..., épouse Y... la parcelle sise à Cognin-les-Gorges cadastrée section 1 et à M. G... X... les parcelles situées dans la même commune section 2, 3 et 4 et débouté M. G... X... de sa demande de suppression du nom de Y... sur le caveau familial, l’arrêt rendu le 12 oct. 2009, entre les parties, par la cour d’appel de Grenoble ; remet, en conséquence, sur ce point, la cause et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d’appel de Lyon.

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations