Lors de mes travaux de recherche pour la rédaction de ma thèse d’ethnologie consacrée à la thanatopraxie et aux thanatopracteurs, j’ai été amenée à rencontrer en 2003 Karine Pesquera, une thanatopracteur travaillant à son compte dans la région Midi-Pyrénées. Enseignante au sein de différents instituts de formation en thanatopraxie, (ACCENT-FORMATION, EFSSM) et maître de stage pour les thanatopracteurs en formation pratique. Karine a aussitôt partagé ma démarche réflexive et analytique d’universitaire, puisque, elle-même avait été amenée à faire des recherches sur sa profession afin de préparer ses cours théoriques (chronologie d’un soin de conservation, restauration) et élaborer une méthode pédagogique pour enseigner le mode opératoire aux stagiaires en formation pratique (fiches de soin en fonction de l’état visuel, olfactif et tactile du cadavre).
Une grande complicité intellectuelle est née entre nous. Karine Pesquera est devenue très vite une informatrice privilégiée de ma thèse et a, de ce fait, pu partager avec moi le nouvel éclairage terminologique et historique apporté par mes recherches (la thanatopraxie se doit d’être définie comme une technique d’embaumement pratique, qui s’enracine dans notre ritualité funéraire au haut moyen âge).
Après la thèse que j’ai soutenue en mars 2006, nous avons souhaité, continuer notre collaboration en mettant en commun nos connaissances. Nos analyses et nos réflexions sur le métier de thanatopracteur, afin de pouvoir les partager avec tous les acteurs du monde funéraire, c'est-à-dire non seulement les praticiens, mais également les entrepreneurs de pompes funèbres et plus particulièrement les conseillers funéraires, qui présentent et proposent en amont aux familles endeuillées le soin de conservation que le thanatopracteur sera amené à réaliser en aval.
Comme nous l’indiquons dans l’introduction de ce manuel, ces professionnels travaillent tous les jours ensemble, pour accompagner au mieux les familles confrontées à l’expérience douloureuse de la perte d’un être cher. Leur collaboration interprofessionnelle est donc primordiale, ce qui suppose une connaissance réciproque de leur métier et de leurs compétences. Or, tel n’est pas toujours le cas.
La singularité de cet ouvrage tient, à nos yeux, à sa faculté de pouvoir être ainsi utilisé comme un outil de travail à la fois par les thanatopracteurs et les conseillers funéraires, en leur donnant matières à échanger et à faciliter leur collaboration interprofessionelle. Par la mise en place de fiches opératoires lisibles, (qui vont aider le jeune thanatopracteur à choisir un mode opératoire adapté au cas à traiter / et le conseiller funéraire à proposer un soin de conservation / une sanitation / une restauration en prenant conscience des difficultés techniques rencontrées sur le terrain par le praticien). De définitions communes, (un lexique commun pour parler le même langage afin de mieux communiquer) et, de réflexions majeures concernant leurs préoccupations quotidiennes (la thanatopraxie comme mode d’accompagnement des familles endeuillées, la manière de proposer et d’expliquer un soin de conservation à un tiers).
Illustré par des dessins humoristiques, ce manuel offre un nouveau regard sur la thanatopraxie en s’appuyant sur une méthodologie opératoire sensorielle, en présentant une histoire innovante de cette profession et en s’intéressant au quotidien des thanatopracteurs au regard des grandes peurs anthropologiques suscitées par le cadavre manipulé.
En conclusion : C’est ouvrage, fruit d’un travail collectif et de réflexions issues de longues années d’expérience de terrain, s’adresse à tous les thanatopracteurs, jeunes diplômés ou praticiens chevronnés, ainsi qu’a l’ensemble des opérateurs du funéraire. Car c’est grâce à leur collaboration interprofessionnelle que la thanatopraxie sort un peu plus chaque jour de l’ombre.
Mélanie Lemonnier
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