Marion-PercheyMarion Perchey,
responsable juridique Le Vœu.
Le cimetière est un espace qui connaît depuis une dizaine d’années des mutations réglementaires constantes sous l’impulsion des évolutions sociétales. On pense tout d’abord à l’essor de la crémation (1) (qui a impliqué la création et la mise à disposition de sites cinéraires), à un éloignement des familles et une transformation du noyau familial (qui conduit à un abandon des sépultures anciennes ou à un regroupement de sépultures), à une évolution des rites funéraires (avec l’essor des cérémonies civiles et donc la question des lieux disponibles pour leur bonne organisation (2)) et à des demandes fortes des communautés religieuses (qui ont conduit à une incitation au développement de carrés confessionnels). Le cimetière est ainsi un environnement juridique et physique à la croisée des chemins.

 

 

C’est un espace public obligatoire (3) et laïc sous gestion publique (non délégable), car il fait toujours l’objet d’un monopole communal. Il obéit donc à des contraintes bien spécifiques liées à la gestion du domaine public (4). Le maire est responsable de l’entretien général du cimetière (5) et, au titre de ses pouvoirs de police (6), il a la charge de garantir notamment le respect de l’ordre public (dont les composantes forment un triptyque classique – sécurité, salubrité et tranquillité publiques (7) – auquel s’est ajouté en 1995 la dignité de la personne humaine (8)). La gestion du cimetière et l’exercice des pouvoirs de police spéciaux s’appliquent dans un encadrement légal parfois difficile à appréhender. Effet millefeuille. En l’état, le cadre légal du cimetière est essentiellement issu des lois napoléoniennes (codifiées principalement dans le Code Général des Collectivités Territoriales – CGCT) et d’une abondante jurisprudence, auxquelles il faut ajouter un certain nombre de circulaires, réponses ministérielles, et bien sûr la doctrine. Pour une commune et a fortiori pour les usagers, l’accès et la compréhension du cadre légal peuvent alors apparaître comme difficiles et non prioritaires.

C’est un espace qui est mis à la disposition d’intérêt privés, car les espaces concédés, qu’ils soient funéraires ou cinéraires, sont autant d’espaces "privés" c’est-à-dire d’occupations temporaires du domaine public constitutives d’un droit réel immobilier (9) et dont les titulaires jouissent d’une liberté d’usage (limitée dans le temps) assortie d’un certain nombre d’obligations (10).

C’est un lieu de mémoire individuel et collectif

Il marque le deuil et permet d’entretenir le souvenir des personnes disparues. Lieu chargé de symboles, le cimetière communal a une fonction sociale : il rend possible le recueillement. C’est un lieu de mémoire collectif, patrimonial, qui peut être un support culturel et identitaire intéressant pour une commune (11). Les maires sont mêmes invités à participer à la protection du patrimoine au cimetière (12).
C’est un espace sensible, un lieu d’émotion et donc un lieu où les tensions peuvent être fortes et difficiles à gérer. Le moindre incident même mineur peut prendre alors des proportions importantes, et il est parfois tentant d’avoir le sentiment que la gestion de cet espace est complexe alors qu’une bonne maîtrise et une bonne application des règles peuvent prévenir la survenance de conflits futurs aussi bien avec les usagers qu’avec les professionnels, interlocuteurs incontournables.

Les équipements obligatoires et encouragés

Le cimetière comporte un certain nombre d’équipements obligatoires ; parmi les plus classiques, on peut citer le terrain commun (ou inhumation en service ordinaire), qui est constitué d’emplacements individuels destinés à accueillir gratuitement les corps pour une durée minimale de cinq années (13) ; l’enceinte du cimetière : le cimetière doit être entouré d’une clôture (14) et être fermé ; les allées et les entre-tombes, côtés, pieds et têtes, que ce soit pour les sépultures en terrain commun ou pour les concessions (15), auxquels il faut ajouter désormais le site cinéraire pour les communes de plus de 2 000 habitants, et l’ossuaire pour les communes effectuant des reprises de concessions, et le caveau provisoire. Sans évoquer d’obligation, on peut également rappeler l’encouragement des maires à créer des carrés confessionnels.
 
I - Les équipements obligatoires

- Le site cinéraire

L’obligation touche les communes de plus de 2 000 habitants, depuis le 1er janvier 2013 (16). Art. L. 2223-1 du CGCT : "Chaque commune ou chaque établissement public de coopération intercommunale compétent en matière de cimetières dispose d’au moins un cimetière comprenant un terrain consacré à l’inhumation des morts et, dans les communes de 2 000 habitants et plus ou les établissements publics de coopération intercommunale de 2 000 habitants et plus compétents en matière de cimetières, d’au moins un site cinéraire destiné à l’accueil des cendres des personnes décédées dont le corps a donné lieu à crémation. La création, l’agrandissement et la translation d’un cimetière sont décidés par le conseil municipal. […]." Pour mémoire le site cinéraire est ainsi défini à l’art. L. 2223-2 du CGCT : "[…] Le site cinéraire destiné à l’accueil des cendres des personnes décédées dont le corps a donné lieu à crémation comprend un espace aménagé pour leur dispersion et doté d’un équipement mentionnant l’identité des défunts, ainsi qu’un columbarium ou des espaces concédés pour l’inhumation des urnes (17)." Il n’y a pas de règles en matière de construction (18). Il est rappelé que, pour la doctrine, le régime de gestion des cases est identique à la gestion des concessions : autorisations (19) et liberté de construction et de personnalisation (20). Le conseil municipal fixe seul la durée et le prix des cases.

- L’ossuaire
 
À Paris, le premier ossuaire municipal – les Catacombes – a été créé dans les anciennes carrières à l’occasion de l’exhumation massive des sépultures du cimetière des Saints-Innocents, en 1785. Il faut attendre la circulaire du 30 mai 1924 pour disposer d’une première définition de l’ossuaire moderne : "L’ossuaire peut consister en un caveau ou même en une simple fosse, pourvu que son affectation soit définitive ou perpétuelle. De même, pour limiter les frais de cet aménagement, la gravure des noms sur pierre dure n’est pas obligatoire, mais les matériaux et le dispositif adoptés doivent présenter des garanties suffisantes de pérennité." Désormais, un arrêté du maire affecte à perpétuité (21), dans le cimetière, un ossuaire aménagé où les restes exhumés sont aussitôt réinhumés. Le maire peut également faire procéder à la crémation des restes exhumés en l’absence d’opposition connue ou attestée du défunt. Les restes des personnes qui avaient manifesté leur opposition à la crémation sont distingués au sein de l’ossuaire. [art. L. 2223-4 du CGCT – loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 – art. 26] Il faut rappeler en la matière l’absence de règles sur la construction de l’ossuaire, il peut être construit en sous-sol ou hors sol. Il n’y a pas de prescriptions techniques particulières (22).

Lors des reprises administratives, et selon l’art. R. 2223-20 du CGCT, une fois les restes exhumés, ils doivent être "réunis dans un cercueil de dimensions appropriées", dénommé reliquaire ou boîte à ossements, pour être réinhumés dans l’ossuaire. Rien n’interdit cependant de mettre les restes de plusieurs corps (le texte n’impose nullement un cercueil par corps en matière d’exhumation) issus d’une même concession dans un seul reliquaire. Il ressort ainsi clairement du texte que les restes exhumés doivent être réunis dans un cercueil d’une taille adaptée répondant aux mêmes agréments qu’un cercueil de taille standard et non un sac. Idem, l’art. R 2213-42 du CGCT rappelle que : "Lorsque le cercueil est trouvé détérioré, le corps est placé dans un autre cercueil ou dans une boîte à ossements." Les sacs ou boîtes en plastique sont donc à exclure. Pour une bonne gestion de l’ossuaire, une identification des reliquaires est à prévoir avant placement à l’ossuaire (l’année de décès et, s’ils sont connus, l’année de naissance, le prénom, le nom patronymique et, s’il y a lieu, le nom marital du défunt la concession ou sépulture d’origine).
    
Il est par ailleurs rappelé à l’art. R. 2223-6 que, lorsque le cimetière n’offre pas d’emplacement suffisant pour la construction de l’ossuaire […], les restes peuvent être transférés par décision du maire dans l’ossuaire d’un autre cimetière appartenant à la commune. Lorsque la commune est membre d’un syndicat de communes, d’un district ou d’une communauté urbaine, le transfert peut avoir lieu dans les mêmes conditions sur le territoire d’une autre commune appartenant au même groupement de communes. Les cendres des restes exhumés sont déposées dans un columbarium, dans l’ossuaire, ou dispersées dans le lieu spécialement affecté à cet effet prévu à l’art. R. 2223-9. Les noms des personnes, même si aucun reste n’a été retrouvé, sont consignés dans un registre tenu à la disposition du public et peuvent être gravés sur un dispositif établi en matériaux durables dans le lieu spécialement affecté à cet effet ou au-dessus de l’ossuaire.

Mais, peut-on vider un ossuaire ?

Dans une réponse à une question écrite publiée le 22 janvier 2008, le ministre de l’Intérieur rappelle que : "Le terrain affecté à l’ossuaire bénéficie d’une affectation définitive et perpétuelle. Le retrait des ossements d’un ossuaire pourrait, sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, constituer un manquement au respect des morts." Toutefois, l’art. 26 de la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 a ajouté un troisième alinéa à l’art. L. 2223-4 du CGCT : "Les restes des personnes qui avaient manifesté leur opposition à la crémation sont distingués au sein de l’ossuaire." Cette précision récente autorise de facto la commune à procéder le moment venu à la crémation des cercueils et boîtes à ossements contenus dans l’ossuaire, dès lors que les dispositions de l’alinéa 3 ont été vérifiées. Le législateur de 2008 a posé des restrictions à la possibilité offerte au maire de vider un ossuaire complet en vue de crématiser les restes mortels. Le maire doit en effet s’assurer de l’absence d’opposition du défunt à cette pratique, notamment pour des raisons liées à la pratique d’une religion. Le CGCT dispose dorénavant, au troisième alinéa de l’article L. 2223-4, que les restes mortels des personnes qui avaient manifesté leur opposition à la crémation sont distingués au sein de l’ossuaire.

II - Les équipement encouragés

- Le carré confessionnel

Compte tenu des dispositions des articles L. 2213-7 et s. du CGCT, aucune séparation ne doit être établie dans les cimetières à raison de la différence des cultes, et la création ou l’agrandissement d’un cimetière confessionnel existant ne sauraient être autorisés. L’interdiction de créer des cimetières confessionnels s’explique par la nécessité de respecter la liberté des croyances et des convictions en assurant la neutralité des lieux d’inhumation ouverts à tous, sans distinction de race ou de confession. Dans les faits, le principe de neutralité du cimetière est contourné, en acceptant la création de carrés confessionnels, et ce, dans un souci d’intégration des populations demanderesses. Selon la loi du 14 novembre 1881, aucune séparation ne doit plus être établie dans les cimetières en raison de la différence des cultes. En effet, l’ancien texte prévoyait l’obligation pour les communes de réserver dans les cimetières une surface proportionnelle aux effectifs de fidèles des différents cultes, et faisait obligation aux familles de déclarer le culte du défunt (23). Le cimetière est un équipement public communal et, en tant que tel, il est soumis au principe de laïcité de la République, il est interconfessionnel. Ainsi, les articles L. 2213-7, L. 2213-9 et L. 2213- 13 du CGCT interdisent au maire d’établir des distinctions en raison du culte ou des croyances des défunts (24). Toutefois, le principe de neutralité ne s’oppose pas à la liberté religieuse des titulaires de concessions funéraires et de leurs familles. Dans son rapport public pour 2004, le Conseil d’État relève que : "L’institution de carrés confessionnels dans les cimetières n’est donc pas possible en droit. Toutefois, en pratique, les carrés confessionnels sont admis et même encouragés par les pouvoirs publics afin de répondre aux demandes des familles, de confession musulmane notamment, de voir se créer dans les cimetières des lieux d’inhumation réservés à leurs membres (25)."

La création de carrés confessionnels est actuellement laissée à la libre appréciation du maire, au titre de son pouvoir de fixer l’endroit affecté à chaque tombe dans les cimetières. Cette pratique est encouragée par le ministère de l’Intérieur. Deux circulaires, du 28 novembre 1975 et du 14 février 1991, confirmées par une récente circulaire NOR/INT/A/08/00038/C du ministre de l’Intérieur en date du 19 février 2008, ont ainsi invité les préfets à recommander aux maires de leur département "d’user des pouvoirs qu’ils détiennent pour réserver aux Français de confession islamique, si la demande leur en est présentée et à chaque fois que le nombre d’inhumations le justifiera, des carrés spéciaux dans les cimetières existants." Pour prévenir tout contentieux, les carrés confessionnels doivent prendre la forme de "regroupements de fait" et la neutralité de l’ensemble du cimetière doit être préservée tant dans son aspect extérieur que par la possibilité laissée aux familles de toutes religions de s’y faire inhumer. L’inhumation ne doit résulter que de la manifestation expresse de la volonté du défunt ou de la demande de la famille ou de toute personne habilitée à régler les funérailles ; l’inhumation dans les autres parties du cimetière doit toujours rester possible ; le carré confessionnel ne doit pas être séparé du reste du cimetière par une séparation matérielle de quelque nature qu’elle soit mais constituer simplement un espace réservé dont la disposition générale permet l’orientation des tombes dans une direction déterminée ; il n’appartient pas au maire, saisi d’une demande d’inhumation dans le carré confessionnel du cimetière communal, de vérifier auprès d’une autorité religieuse ou non la confession du défunt (26).
Rappel des modalités de mise en œuvre des espaces confessionnels (27)

- la décision d’aménager de tels espaces dans le cimetière communal ou d’accepter l’inhumation d’un défunt ne résidant pas dans la commune appartient au maire et à lui seul ; il a toute latitude pour apprécier l’opportunité de créer ou non un espace confessionnel ;
- le maire doit veiller à ce que les parties publiques du cimetière ne comportent aucun signe distinctif de nature confessionnelle. L’espace confessionnel ne doit pas être isolé des autres parties du cimetière par une séparation matérielle de quelque nature qu’elle soit ;
- l’inhumation dans un espace confessionnel ne peut résulter que de la volonté expresse du défunt ou de sa famille ; l’inhumation dans les autres parties du cimetière doit toujours rester possible. Le maire, saisi d’une telle demande, enregistre le vœu ; il ne lui appartient pas de vérifier la confession religieuse du défunt (TA Grenoble, 5 juill. 1993). En l’espèce, le juge administratif a considéré que le maire ne pouvait se fonder "exclusivement" sur la circonstance que les autorités consistoriales déniaient l’appartenance à la confession israélite de la personne décédée, qui souhaitait se faire enterrer près de son défunt mari, pour refuser une concession funéraire dans le "carré juif" d’un cimetière communal ;
- la famille du défunt décide librement de l’emplacement d’une éventuelle stèle sur la sépulture ou de l’aspect extérieur de celle-ci, en individualisant la sépulture par la pose de plaques funéraires, de signes ou emblèmes religieux, sous la seule réserve que le parti pris ne soit pas choquant pour les autres familles ayant une tombe dans le cimetière et susceptible de provoquer des troubles à l’ordre public ;
- il peut ainsi arriver qu’une personne ne partageant pas la confession d’un précédent défunt ait explicitement souhaité se faire enterrer à ses côtés au sein d’un espace confessionnel ; dans ce cas, le maire devra veiller à ce qu’un signe ou un emblème religieux ne vienne dénaturer l’espace et, partant, heurter certaines familles ;
- l’ensemble des règles et prescriptions en matière d’hygiène et de salubrité, notamment celles relatives à la conservation des corps et à leur mise en bière, doivent être strictement respectées ; l’inhumation directement en pleine terre et sans cercueil ne saurait être acceptée ;
- enfin, les communes dotées d’un espace confessionnel dans leur cimetière sont invitées à créer, autant que faire se peut, un ossuaire réservé aux défunts de même confession. (Rép. min. n° 01356 : JO Q Sénat 21 août 2008, p. 1677). À défaut, les restes provenant des concessions reprises seront déposés à l’ossuaire communal sans être incinérés.

Dans les faits, la pratique reste limitée. On dénombrerait aujourd’hui seulement 70 carrés musulmans en France. Le cimetière de Thiais compte, par exemple, 14 divisions musulmanes, 3 divisions israélites, 3 divisions bouddhistes et 2 orthodoxes. Jassine Chaib, dans son ouvrage "L’Émigré et la Mort", relève, à juste titre, que "le lieu de sépulture est une clé pour l’interprétation de l’intégration de l’immigré". À noter que, le 3 février dernier, le premier cimetière musulman municipal de France a été inauguré à Strasbourg, une première rendue possible grâce au droit local alsacien-mosellan, qui permet aux pouvoirs publics d’intervenir dans l’organisation et le financement des cultes. Aménagé sur un terrain de plus d’un hectare dans le sud de la ville, ce cimetière pourra accueillir près d’un millier de sépultures, dispose de deux salles d’ablutions et d’un ossuaire, avec une extension déjà prévue si nécessaire.

- Le caveau provisoire

Art. R. 2213-29 du CGCT. Après la fermeture du cercueil, effectuée conformément aux dispositions de l’art. R. 2213-20, celui-ci peut être déposé temporairement dans un édifice cultuel, une chambre funéraire, au crématorium, à la résidence du défunt ou celle d’un membre de sa famille, dans les conditions prévues aux articles R. 2213-33 et R. 2213-35. Le cercueil peut également être déposé dans un caveau provisoire, le cas échéant après accord du propriétaire du caveau, dans l’attente de l’inhumation définitive. L’autorisation du dépôt est donnée par le maire de la commune du lieu du dépôt, après vérification que les formalités prescrites par l’art. R. 2213-17 et par les articles 78 et suivants du Code civil ont été accomplies. Le dépôt prévu au deuxième alinéa ne peut excéder six mois. À l’expiration de ce délai, le corps est inhumé ou fait l’objet d’une crémation dans les conditions prévues aux articles R. 2213-31, R. 2213- 34, R. 2213-36, R. 2213-38 et R. 2213-39.

III - La gestion des concessions

Il est nécessaire de penser le cimetière différemment, pas simplement comme une contrainte à gérer immédiatement mais à gérer sur le long terme : prévoir les évolutions et non pas les subir et prévenir les conflits liés à des gestions passées.

- Les obligations du maire et de la commune vis-à-vis des concessionnaires

La création des concessions n’étant jamais obligatoire, le conseil municipal dispose d’un pouvoir discrétionnaire. La concession par délégation est cependant délivrée par le maire. Les actes de concession prennent la forme d’arrêtés municipaux ou de contrats administratifs. Le document remis au concessionnaire sera son "titre de propriété", sur lequel figureront les conditions et les engagements de chacun. Ils sont établis en triple exemplaire (l’intéressé, le receveur municipal, les archives communales). Une concession ne peut être acquise tacitement (CAA Nantes, 23 mars 2004, Cne de Loctudy), un écrit est nécessaire (28). Lorsqu’un emplacement n’a pas fait l’objet d’un acte de concession, il est considéré comme situé en terrain commun. La commune a la faculté de procéder à la reprise de la sépulture, dans les conditions fixées par l’art. R. 2223-5 du Code précité, qui dispose que "l’ouverture des fosses pour de nouvelles sépultures n’a lieu que de cinq années en cinq années". Il n’existe donc pas de droit acquis au maintien des restes mortels dans la sépulture, au-delà de ce délai. Toutefois, s’agissant de tombes parfois anciennes, il apparaît souhaitable que la commune assure la publicité de sa décision de procéder à la reprise (29). Si la famille souhaite conserver l’emplacement, il est possible d’opérer une transformation d’une sépulture du terrain général en concession funéraire. Lorsqu’une commune souhaite appliquer le régime des concessions à une telle sépulture, cette dernière doit être libre de tout corps. Toutefois, la commune peut proposer l’octroi d’une concession sur l’emplacement considéré à l’ensemble des ayants droit des personnes qui y sont déjà inhumées. Dans cette hypothèse, il n’est pas nécessaire d’appliquer la procédure de reprise de terrain commun. Comme en matière de renouvellement, la concession est délivrée à l’ayant droit le plus diligent. (30)

Peut-on communiquer la copie d’un titre de concession ?

La Commission d’Accès aux Documents Administratifs (CADA) a examiné, dans sa séance du 7 décembre 2006 (31), une demande de conseil relative au caractère communicable du registre des concessions funéraires et des actes portant concessions funéraires, aux modalités de la consultation de ces documents et à la question de savoir si la demande de communication dont est saisie la mairie, qui ne vise aucune période déterminée, présente un caractère trop imprécis pour être satisfaite en l’état. La commission a relevé que : "Les documents se rapportant aux concessions funéraires […] ont le caractère de documents administratifs. […] La commission considère toutefois que, eu égard aux informations qu’elle comporte, une concession funéraire constitue un document dont la communication porterait atteinte au secret de la vie privée au sens des dispositions du II de l’art. 6 de la loi du 17 juillet 1978. Par suite, il n’est communicable qu’aux "intéressés", au nombre desquels figurent le titulaire de la concession et, s’ils justifient de la nécessité d’une telle communication pour faire valoir leurs droits, les ayants droits éventuels des personnes inhumées. En aucun cas il ne pourra être fait droit à une demande de consultation de l’intégralité du registre. La commission rappelle que les demandes adressées aux autorités détentrices de ces documents doivent être suffisamment précises pour permettre leur identification. En l’espèce, et compte tenu des restrictions au droit d’accès précédemment mentionnées et de la nécessité, pour le demandeur, de justifier de sa qualité, les demandes susceptibles d’aboutir seront, par définition, précises, et ne porteront,

en principe, que sur un volume limité de documents. Dans le cas contraire, il appartiendrait à l’Administration de procéder à la communication des documents, le cas échéant de manière échelonnée, afin de préserver le bon fonctionnement du service public (32)."

Les conseils municipaux peuvent créer, à leur choix, quatre catégories de concessions :
- des concessions temporaires, accordées pour quinze ans au plus ;
- des concessions trentenaires ;
- des concessions cinquantenaires ;
- des concessions perpétuelles.

Le maire est tenu de laisser aux familles le choix entre tel ou tel type de concession et a, à ce titre, un devoir de conseil : Circ. 27 févr. 1991 n° NOR/INT/B/91/00043/C relative à la transmission des concessions funéraires.

La commune ne peut concéder qu’un terrain vide de corps et propre à sa destination. Elle engage sa responsabilité si elle concède un terrain déjà occupé par une personne inhumée au service ordinaire (TA Pau, 14 décembre 1960, Sieur Loste). De même, la commune peut voir sa responsabilité engagée si le terrain concédé ne permet pas de procéder aux inhumations. Tel est le cas en présence d’eaux souterraines inondant les caveaux et rendant impossible l’utilisation de la concession. Sur ce motif, la responsabilité contractuelle de la commune peut être engagée vis-à-vis de son cocontractant (TA Montpellier, 21 décembre 1994, Jean-Raphaël Lengo c/Cne de Sète). Le juge en l’espèce exige que le terrain soit véritablement impropre à sa destination et que les infiltrations résultent d’une faute contractuelle de la commune (33).
Il appartient au maire de déterminer l’emplacement de la concession. Le demandeur peut indiquer ses préférences, mais le maire peut ne pas en tenir compte (CE, 28 janvier 1925, Valès).

Droit à concession et droit à sépulture

Il ne faut pas confondre le droit à être inhumé dans un cimetière et le droit d’y obtenir une concession. La commune a l’obligation d’inhumer certaines personnes et bénéficie en revanche de la faculté d’accorder des concessions dans son cimetière. En ce qui concerne le droit à inhumation, il est dû :
"1° Aux personnes décédées sur son territoire, quel que soit leur domicile ;
2° Aux personnes domiciliées sur son territoire, alors même qu’elles seraient décédées dans une autre commune ;
3° Aux personnes non domiciliées dans la commune mais qui y ont droit à une sépulture de famille ;
4° Aux Français établis hors de France n’ayant pas une sépulture de famille dans la commune et qui sont inscrits sur la liste électorale de celle-ci. Art. L. 2223-3 du CGCT."

- Les conditions d’attribution : le droit à concession est très large

Le maire ne peut refuser le droit à concession que pour des motifs tirés du manque de places disponibles (CE Sect. 5 décembre 1997, Cne de Bachy c/ Saluden-Lanie) ou les contraintes résultant du plan d’aménagement du cimetière (CE, 26 octobre 1994, Mlle Arii) ou le fait que le demandeur ait déjà plusieurs concessions dans le cimetière (CAA Douai, 14 février 2001, Robert Coudeville) (34). Aucun texte ne limite en effet le droit, pour une personne ne résidant pas dans la commune, d’y acquérir une concession (TA Nice 25 juillet 1984) si elle démontre un lien avec celle-ci. Toute personne qui, par exemple, a des liens affectifs avec une commune peut demander l’octroi d’une concession dans le cimetière. Un droit d’entrée (surcoût) au détriment des personnes non domiciliées sur le territoire communal serait lui-même illégal. Le Conseil d’État l’a réaffirmé dans un arrêt le 10 décembre 1969. De la même manière que le fait de réserver les concessions aux seuls habitants de la commune est illégal. Le tribunal administratif d’Orléans s’est prononcé à ce sujet le 31 mai 1988. Par voie de conséquence il n’est pas légal de refuser l’acquisition des concessions funéraires d’avance ou de fixer des conditions discriminatoires (âge).

En l’état actuel de la jurisprudence, le seul motif légal de refus d’octroi d’une concession ne peut résulter que des contraintes liées à l’aménagement du cimetière, c’est-à-dire au manque de place, et cela, que les personnes soient domiciliées dans la commune ou non (CE 26 avril 1994, Mlle Arii ; CE, 5 décembre 1997, commune de Bachy ; CAA Marseille, 15 novembre 2004, M. Michel X). Il en découle que le maire ne peut pas refuser une concession, au seul motif que le demandeur en bénéficie déjà d’une (CE sect. 5 décembre 1997, commune de Bachy c/ Mme Saluden-Laniel). En effet, si une concession est pleine de tout corps, le même titulaire peut revendiquer l’octroi d’une autre concession dans le cimetière. Motifs de refus à l’attribution d’une concession funéraire. Le juge a censuré le refus de délivrance de la concession exclusivement motivé par le fait que le demandeur ne disposait pas d’un droit à être inhumé dans la commune au regard des dispositions de l’art. L. 2223-3 (CE, 25 mai 1990, commune de Cergy). Par ailleurs, selon une autre jurisprudence (CAA Douai, 14 février 2001, affaire Coudeville), il convient de démontrer l’utilité de la concession sollicitée pour avoir droit à sa délivrance. Dans la délivrance des concessions, la circulaire du 27 févr. 1991 no NOR/INT/B/91/00043/C relative à la transmission des concessions funéraires incite les maires à mieux informer les titulaires de concessions sur la destination de celle-ci et sur leur transmission.

La concession individuelle (nominative)

Si la concession est individuelle, une seule inhumation sera opérée : celle de la personne au profit de laquelle elle est acquise, nommément désignée, à l‘exclusion de toute autre. Rien n’empêche le fondateur de la transformer en concession familiale (TA Versailles, 4 juil. 2008 n° 0603232) (35).

La concession collective (pluri-nominative)
 
Elle est accordée au bénéfice des personnes nommément désignées dans l’acte initial. La concession est indivise entre ces personnes, et la maire doit s’opposer à l’inhumation de toute autre personne.

La concession familiale

Elle est concédée au bénéfice du titulaire initial et des membres de sa famille. Elle peut faire l’objet d’une transmission au décès du concessionnaire. Tous les ayants droit du fondateur ont accès à la concession, sauf stipulation contraire du fondateur. Le conseil municipal ne peut limiter le droit d’inhumation au seul titulaire de la concession ou aux seuls descendants (conjoint, parents, enfants, petits-enfants…), à l’exclusion des collatéraux et des légataires universels (CE, 11 oct. 1957, Consorts Herail).

Obligation est faite à la mairie de vérifier au préalable la nature de la concession avant toute délivrance d’autorisation d’inhumation (CAA Versailles, 6 juill. 2010, n° 08VE02943).

En l’absence de manifestation contraire du fondateur, à son décès, la concession est familiale et indivise : tous les ayants droit en ligne directe ont droit à être inhumés dans la sépulture. Ils doivent ainsi donner unanimement leur accord en cas d’inhumation d’une personne étrangère à la famille (sauf opposition supposée du fondateur), mais ne peuvent s’opposer à l’inhumation d’un ayant droit. Ainsi, en l’état actuel du droit, de son vivant, le fondateur d’une concession funéraire peut décider d’inhumer qui il souhaite dans sa concession hors ayant droit. Il peut désigner ceux des membres de sa famille qui pourront y être inhumés ou dont les cendres pourront y être déposées (et donc exclure certains membres de sa famille). Les dispositions qu’il prend (par voie testamentaire, par exemple) ne peuvent être modifiées ultérieurement (CA Amiens, 29 nov. 1960, Caron-Potentier C/Potentier-Lambert). Le fondateur peut également désigner un héritier qui désignera les bénéficiaires du droit à l’inhumation (Cass. Civ. 2 mars 1976, DUC C/ DR Kalinowski). Après son décès, seuls les ayants droit pourront y être inhumés ou "les personnes unies au concessionnaire par des liens d’affection" – Rép. min. JO Sénat 22/09/11 p. 2438.

Il est à noter que le renouvellement de la concession opéré par un seul profite à tous (Conseil d’État n° 262977 9 mai 2005). De plus, un ayant droit ne peut "réserver" sa place, les inhumations ayant lieu dans l’ordre des décès, notamment en faisant graver son nom à l’avance sur la sépulture (Cass. Civ. 12 janvier 2011). Règle des prémourants.

- Les constructions : un droit de construction quasi absolu

Le droit de construire des monuments et caveaux est reconnu au titulaire d’une concession funéraire (art. L. 2223-13 du CGCT). Toutefois, le maire peut parfois soumettre à autorisation la construction des caveaux, monuments et tombeaux pour des raisons liées à la nature du terrain ou pour des questions d’ordre public (exemple : projet de construction qui rendrait toute inhumation impossible, limiter la taille ou le poids d’un monument, prescrire l’isolement des cercueils dans les caveaux, exiger que l’ouverture des caveaux s’opère sur le dessus…). Le maire ne peut cependant pas contrôler la qualité plastique des monuments funéraires et imposer ainsi des normes purement esthétiques. En effet, il ne peut imposer le type de monuments, le type de matériaux ou de plantations sur les concessions (CE, 18 févr. 1972, Ch. Synd. Des entr. Artis. Du bâtiment ; CE, 11 mars 1983, Cne de Bures-sur-Yvette) (36), sauf à démontrer que l’aspect du monument porte atteinte à l’ordre public (sécurité, salubrité, tranquillité publiques et dignité de la personne). Notons que le maire n’a en aucun cas le droit de restreindre les droits des titulaires d’une case de columbarium ou d’une cavurne (interdiction d’apposer des photographies, porte-fleurs ou ornements sur les plaques de fermeture…) TA Lille, 30 mars 1999, Mme Denise Tillieu et autres c/cne de Mons-en-Baroeul. Le maire ne peut intervenir dans le choix des monuments et de la décoration qu’au nom du bon ordre et de la décence. Il ne peut non plus prescrire le type de monuments funéraires, ainsi que l’a jugé le Conseil d’État en 1972. Il ne peut s’opposer à une construction funéraire au motif qu’elle ne correspond pas au style déjà existant (TA Montpellier, 13 novembre 1979, Allemandi).

Les pouvoirs du maire

La palette des pouvoirs du maire s’est étoffée depuis 2008, et ce, notamment à l’endroit du cimetière, on pense en premier lieu aux constructions et à la procédure de péril imminent à l’endroit des monuments. Comme indiqué en préambule, l’art. L. 2212-2 "La police municipale a pour objet d’assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. Elle comprend notamment : […] la démolition ou la réparation des édifices et monuments funéraires menaçant ruine […]."
Les mesures de police prises par le maire concernent pour l’essentiel :
- les conditions d’ouverture, de surveillance et de circulation ;
- le maintien de la tranquillité publique (veiller à la décence et au respect dû aux morts et à leur mémoire) ;
- l’entretien des cimetières (les plantations, l’entretien des tombes) ;
- les conditions d’hygiène et de sécurité des constructions (caveaux, monuments funéraires).

Le règlement municipal du cimetière

Le maire peut, au coup par coup, prendre par arrêté municipal toutes mesures de police. En les rassemblant, il constituera un règlement. Il peut encore arrêter par un règlement intérieur du cimetière qui apporte des solutions à la plupart des problèmes posés et qui s’impose à tous les utilisateurs. Les articles du règlement rappellent les dispositions législatives et réglementaires relatives aux opérations funéraires, qui se déroulent dans le cimetière, et aux concessions. Ils édictent les mesures propres à assurer le bon ordre, la décence, la sureté et la salubrité publiques à l’intérieur de la nécropole. L’inobservation des arrêtés de police du maire donne lieu à une sanction pénale de police générale, et dans certains cas, à des sanctions administratives.

Dans les nouveaux pouvoirs du maire – art. L. 2223-12-1 (créé par loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 – art. 18) –, le maire peut fixer des dimensions maximales des monuments érigés sur les fosses. Le juge avait déjà reconnu la légalité de telles mesures lorsqu’elles intervenaient dans le souci de protéger les usagers et les sépultures voisines de monuments instables au regard de la nature du terrain.

- La fin des concessions

Le renouvellement est de droit

Il est l’acte qui tend à reconduire pour une durée équivalente ou supérieure une concession funéraire – non perpétuelle – venue à expiration. Selon l’art. L. 2223-15 al. 2 du CGCT : "Les concessions temporaires, les concessions trentenaires et les concessions cinquantenaires sont renouvelables au prix du tarif en vigueur au moment du renouvellement." L’alinéa 3 dispose que le renouvellement est possible dans les deux années qui suivent l’expiration de la concession. Lorsqu’une concession vient à expiration après la mort du fondateur décédé ab intestat, elle doit, "sur la demande du plus diligent des héritiers naturels et moyennant le paiement de la redevance fixée par le tarif en vigueur à la date du renouvellement, être renouvelée pour une même période au profit de l’ensemble desdits héritiers" (CE, Delle Méline). En d’autres termes, le renouvelant ne devient pas "nouveau et seul concessionnaire". Même s’il est le seul à payer, il ne s’approprie ni le titre de concession, ni le caveau, ni les dépouilles mortelles, ni le monument. En l’absence de famille, le renouvellement peut être refusé (circulaire interministérielle du 27 février 1991, NOR/ INT/B/91/00043/C).

Le maire ne peut interdire d’inhumation en concession pendant les cinq dernières années de la concession, pour éviter une prorogation de fait de la durée de celle-ci (CE, 27 mai 1892, Petichet). Si une demande de renouvellement est présentée plus d’un an avant l’expiration de la concession, dans cette dernière période quinquennale, il peut y être donné droit (renouvellement anticipé). Le renouvellement est possible pour une durée plus courte ou une plus longue que l’initiale. Si la concession n’est pas renouvelée à l’expiration du délai prévu, la commune peut disposer du terrain. Elle ne peut le réattribuer à un autre concessionnaire que si la dernière inhumation remonte à plus de cinq ans et que les restes mortels ont été exhumés et déposés à l’ossuaire ou crématisés. La commune devient propriétaire des monuments, caveaux, stèles se trouvant sur la concession funéraire non renouvelée. Une famille ne peut donc les revendre à un tiers sans l’accord exprès de la commune.

Le concessionnaire ou l’ayant droit le plus diligent sollicitant le renouvellement devra payer à la commune le prix de la concession tel que fixé le jour du renouvellement (cette précision est importante, puisque certaines communes modifient annuellement le prix des concessions). La date du renouvellement est celle de l’arrivée à échéance, même s’il n’est opéré qu’à la fin du délai de deux ans, puisqu’il ne s’agit pas d’accorder une occupation gratuite aux titulaires de concessions. Par exemple : une concession trentenaire arrivant à échéance le 1er mars 1998 peut être renouvelée jusqu’au 1er mars 2000 ; le renouvellement étant opéré le 15 janvier 2000, la concession sera accordée jusqu’au 1er mars 2028 ; le prix payé sera celui en vigueur au 15 janvier 2000.

- La conversion

La conversion se définit comme l’allongement de la durée de la concession, soit au moment d’un renouvellement, soit en cours d’exécution d’un contrat de concession funéraire. Elle est subordonnée à l’existence de la catégorie demandée dans le règlement de cimetière. Le maire ne peut s’y opposer, la conversion est un droit. Dans cette hypothèse, le maire peut décider d’accorder la conversion dans un autre emplacement que celui initial de la concession (CE 12 janvier 1917, Deconvoux, Rec. CE, p. 38). Lorsque l’on convertit une concession, il reste au titre initial une certaine durée. Comme le CGCT prévoit expressément les durées des concessions funéraires, il est impossible d’ajouter le reliquat des années restant à courir au terme de la conversion. Nécessairement, on ampute donc la durée demandée des années qui restent à courir. Dans ce cas, il faut les rembourser au concessionnaire. L’art. L. 2223-16 du CGCT en dispose ainsi : il est défalqué du prix de conversion une somme égale à la valeur que représente la concession convertie, compte tenu du temps restant encore à courir jusqu’à son expiration.

- La rétrocession

Le concessionnaire initial, et uniquement lui, peut renoncer à ses droits et proposer à la commune de lui rétrocéder sa concession. La concession doit être vide de tout corps, soit parce qu’elle n’a jamais été utilisée, soit parce que les restes mortels des personnes qui y avaient été inhumées ont fait l’objet d’exhumation, de transfert dans une autre sépulture, ou de crémation. Cette possibilité n’est pas ouverte aux ayants droit. Le conseil municipal ou le maire, s’il a reçu délégation à cet effet, est libre d’accepter ou de refuser l’offre de rétrocession. Si la rétrocession de concession est acceptée, elle sera réalisée à titre gratuit ou à titre onéreux. Elle peut en effet être subordonnée à une indemnisation au prorata du temps restant, dans la limite du prix acquitté au profit de la commune (37).
Le remboursement prorata temporis posera problème si la rétrocession concerne une concession perpétuelle. Dans ce cas, c’est à la commune qu’il reviendra de déterminer souverainement le montant de la somme proposée au titre du remboursement, et au concessionnaire de l’accepter ou la refuser. On rappellera qu’une concession, conformément à l’arrêt de la Cour de cassation, 1re civ., 4 décembre 1967, no 66-10765, confirmé par la réponse du ministère de la Justice publiée dans le JO Sénat du 25 avril 2013, p. 1359, est "hors commerce" et ne peut faire l’objet d’une cession à titre onéreux auprès d’un particulier. En revanche, une concession peut faire l’objet par le concessionnaire initial d’une donation entre vifs si l’acte administratif accordant la concession et le règlement municipal ne l’interdisent pas. Dans ce cas, la possession d’une sépulture est assimilée à un droit réel immobilier, et à ce titre, l’acte de donation doit être établi devant notaire en application de l’art. 931 du Code civil. À réception de l’acte notarié, un acte de substitution est établi par le maire entre le donataire et le donateur. Un nouveau titre de concession est établi au nom du donataire, et le contrat établi au nom du donateur ne produira plus d’effets de droit. Seule une concession funéraire jamais utilisée peut faire l’objet d’une donation en faveur d’une personne étrangère à la famille.

- La reprise des concessions

La reprise des concessions funéraires permet à la commune de mettre fin, de sa propre initiative, à un contrat de concession. À l’expiration de deux années permettant de considérer que le concessionnaire ou ses ayants droit ont renoncé à leur droit, la commune peut reprendre les sépultures qui sont considérées comme abandonnées. Les reprises peuvent être annoncées par voie d’affichage, mais rien n’empêche le maire de prendre d’autres mesures de publication, d’informer les familles lorsqu’elles sont connues, et de les aviser, le cas échéant, des exhumations consécutives à une reprise au cas où elles désireraient y être présentes ou y être représentées.
La procédure de reprise des concessions cinquantenaires, centenaires et perpétuelles en état d’abandon est régie par les articles L. 2223-4, L. 2223-172 et L. 2223-183, R. 2223-12 à R. 2223-23 du CGCT. C’est un droit pour les communes. Il répond à trois conditions :
- trente ans d’existence au minimum ;
- la dernière inhumation doit dater de dix ans, au moins ;
- l’état d’abandon (qui offre un aspect indécent, nuisible au bon ordre et à la décence du cimetière).

Le maire sollicite d’abord l’accord du conseil municipal sur l’opportunité ou non d’engager la procédure. On demandera au responsable du cimetière si la concession est ou non régulièrement visitée, fleurie, et par qui. Il faut procéder à toute enquête administrative, et par tout autre moyen, afin de retrouver d’éventuels descendants ou successeurs. Il est bon d’informer la population par le journal (bulletin municipal) et de l’inviter à collaborer à la recherche des ayants droit. L’affichage en mairie et au cimetière est souhaitable ainsi que sur la sépulture elle-même. Une fois la procédure terminée, les opérations matérielles de reprise peuvent se dérouler. La commune est libre de détruire, utiliser ou vendre les monuments signes funéraires et caveaux présents dans les concessions : circulaire no 93-28 du 28 janvier 1993. Outre l’enlèvement des caveaux et monuments, une exhumation des corps présents s’impose (TA Pau, 14 décembre 1960, Sieur Loste). Les restes doivent être "réunis dans un cercueil de dimensions appropriés" (38), soit des reliquaires en bois, afin d’être réinhumés dans l’ossuaire ou crématisés en l’absence d’opposition connue du défunt (39).

Détail de la procédure

- Procédure pour la reprise des concessions en état d’abandon
Voir Résonance Funéraire n° 114 d’octobre 2015 pages 94, 95, 96 et 97.

La destruction des monuments en cas de péril imminent

Avant même la fin de la procédure de reprise d’une concession en état d’abandon, le maire a le pouvoir de prescrire la reprise d’un monument funéraire menaçant la sécurité des personnes et des biens. Art. L. 2213-24 du CGCT (loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 – art. 21) : "Le maire prescrit la réparation ou la démolition des murs, bâtiments, édifices ou monuments funéraires menaçant ruine dans les conditions prévues aux articles L. 511-1 à L. 511-4-1 du Code de la construction et de l’habitation." Art. L. 511-4-1 du Code de la construction créé par la loi no 2008-1350 du 19 décembre 2008 – art. 21 : "Le maire peut prescrire la réparation ou la démolition des monuments funéraires lorsqu’ils menacent ruine et qu’ils pourraient, par leur effondrement, compromettre la sécurité ou lorsque, d’une façon générale, ils n’offrent pas les garanties de solidité nécessaires au maintien de la sécurité publique. Toute personne ayant connaissance de faits révélant l’insécurité d’un monument funéraire est tenue de signaler ces faits au maire, qui peut recourir à la procédure prévue aux alinéas suivants. Le maire, à l’issue d’une procédure contradictoire dont les modalités sont définies par décret, met les personnes titulaires de la concession en demeure de faire, dans un délai déterminé, les réparations nécessaires pour mettre fin durablement au danger, ou les travaux de démolition, ainsi que, s’il y a lieu, de prendre les mesures indispensables pour préserver les monuments mitoyens.

L’arrêté pris en application de l’alinéa précédent est notifié aux personnes titulaires de la concession. À défaut de connaître l’adresse actuelle de ces personnes ou de pouvoir les identifier, la notification les concernant est valablement effectuée par affichage à la mairie de la commune où est situé le cimetière ainsi que par affichage au cimetière. Sur le rapport d’un homme de l’art ou des services techniques compétents, le maire constate la réalisation des travaux prescrits ainsi que leur date d’achèvement et prononce la mainlevée de l’arrêté. Lorsque l’arrêté n’a pas été exécuté dans le délai fixé, le maire met en demeure les personnes titulaires de la concession d’y procéder dans le délai qu’il fixe et qui ne peut être inférieur à un mois. À défaut de réalisation des travaux dans le délai imparti, le maire, par décision motivée, fait procéder d’office à leur exécution. Il peut également faire procéder à la démolition prescrite, sur ordonnance du juge statuant en la forme des référés, rendue à sa demande. Lorsque la commune se substitue aux personnes titulaires de la concession défaillantes et fait usage des pouvoirs d’exécution d’office qui lui sont reconnus, elle agit en leur lieu et place, pour leur compte et à leurs frais. Les frais de toute nature, avancés par la commune lorsqu’elle s’est substituée aux personnes titulaires de la concession défaillantes, sont recouvrés comme en matière de contributions directes. Art. D. 511-13 Code de la construction créé par décret n° 2011-121 du 28 janvier 2011 – art. 57 : Lorsque les désordres affectant des monuments funéraires sont susceptibles de justifier le recours à la procédure prévue à l’art. L. 511-4-1, le maire en informe, en joignant tous éléments utiles en sa possession, les personnes titulaires de la concession ou leurs ayants droit et les invite à présenter leurs observations dans un délai qu’il fixe et qui ne peut être inférieur à un mois.

Marion Perchey

Résonance n°115 - Novembre 2015

 

 

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FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations