Depuis l’entrée en vigueur de la loi du 19 décembre 2008, la destination des cendres est strictement encadrée.

 

En effet, l’art. L. 2223-18-2 du Code Général des Collectivités Teritoriales (CGCT) qui en découle dispose que les cendres (qui ne peuvent plus être divisées) doivent :
- soit être conservées dans une urne qui sera inhumée, déposée dans une case columbarium ou scellée sur un monument funéraire ;
- soit être dispersées dans une site cinéraire aménagé ou en pleine nature.

Un régime juridique qui emprunte à l’inhumation et à l’exhumation

L’art. L. 2223-18-2 du CGCT met sur le même plan l’inhumation, le placement en case columbarium et le scellement de l’urne. De plus, l’art. R. 2213-39 dispose que ces opérations "sont subordonnées à l’autorisation du maire de la commune où se déroule l’opération". Nous pouvons donc en déduire que l’ensemble des règles relatives à l’inhumation auront vocation à s’appliquer : en particulier, l’existence d’une concession non échue et la demande (ou l’autorisation) du concessionnaire.
S’agissant du "dé-scellement" d’une urne, il n’existe pas de texte spécifique applicable. Dans le "Guide de recommandations relatif aux urnes funéraires et aux sites cinéraires" publié le 6 décembre 2018 sous l’égide du Conseil National des Opérations Funéraires (CNOF) et de la Direction Générale des Collectivités Locales (DGCL), une interprétation fondée sur le parallélisme des formes et des compétences a abouti au raisonnement suivant : "Sous réserve de l’appréciation souveraine des tribunaux, le scellement de l’urne sur le monument paraît assimilable à une inhumation, et donc son "dé-scellement" à une exhumation."
Il conviendra donc d’appliquer les dispositions de l’art. R. 2213-40 du CGCT, aux termes duquel : "Toute demande d’exhumation est faite par le plus proche parent de la personne défunte [...]. L’autorisation d’exhumer […] est délivrée par le maire de la commune où doit avoir lieu l’exhumation." En outre, l’autorisation du concessionnaire sera inévitablement nécessaire.

Une opération qui ne peut être réalisée par la famille

Dès lors que l’opération "dé-scellement" a vocation à être assimilée à une inhumation (et non à une simple prestation de marbrerie), l’opération ne pourra être exécutée que par un opérateur funéraire habilité, en vertu du 8° de l’art. L. 2223-19 du CGCT, qui dispose que relève du service extérieur des pompes funèbres : "La fourniture de personnel et des objets et prestations nécessaires aux obsèques, inhumations, exhumations et crémations, à l’exception des plaques funéraires, emblèmes religieux, fleurs, travaux divers d’imprimerie et de la marbrerie funéraire". Il en ira donc de même pour le "dé-scellement", assimilé à une exhumation.

Le choix de l’urne

Il n’existe aucune spécification particulière quant à la nature de l’urne à utiliser lorsque cette dernière fera l’objet d’un scellement. Néanmoins, il va de soi, notamment en application de l’art. 16-1-1 du Code civil (relatif au respect dû au corps humain et aux cendres), que le choix de l’urne devra être adapté à une exposition prolongée aux agressions extérieures de l’environnement (pluie, vent, soleil, changements de températures).
L’urne devra donc présenter des caractéristiques de poids, de résistance et de solidité suffisantes. Les matériaux les plus adaptés présents sur le marché sont de toute évidence le granit, le marbre et la pierre. Ces matériaux présenteront en outre l’avantage de pouvoir être gravés, permettant ainsi la possibilité d’une identification durable de l’urne, préférable à la conservation de l’étiquette apposée à l’issue de la crémation, beaucoup plus fragile.
Il convient en effet de rappeler l’obligation d’identifier extérieurement l’urne de l’identité du défunt et du nom du crématorium (art. L. 2223-18-1 du CGCT). De plus, une urne gravée présentera un risque moindre d’être volée.

Aspects techniques du scellement

Que faut-il entendre par scellement ? Le scellement de l’urne ne pourra être techniquement réalisé qu’à la condition d’être effectué sur un monument présentant une surface plane suffisamment étendue pour en garantir la stabilité. Il conviendra également d’exclure tout scellement sur une semelle, dans la mesure où cette dernière n’est pas posée sur le terrain concédé, mais autour. S’agissant des techniques de scellement, il est habituel de fixer la base de l’urne au monument à l’aide de colle ou de silicone. Néanmoins, certaines communes ont pu considérer que cette technique de fixation n’est pas de nature à garantir une solidité suffisante évitant tout risque de renversement de l’urne ou son vol.
C’est ainsi que certains règlements de cimetières exigent parfois l’utilisation de goujons pour solidariser l’urne et le monument. Mais de telles exigences réglementaires doivent être appréhendées avec mesure. En effet, le perçage du monument (et de l’urne) qu’implique l’utilisation d’un goujon est une opération délicate faisant peser un risque de détérioration, voire de casse, du monument. De plus, l’opération fera peser sur la famille un surcoût financier évident.
Enfin, en cas de "dé-scellement" futur, le retrait de l’urne laissera apparaître une "cicatrice" sur le monument ou fera également peser un risque de casse. Sous réserve de l’appréciation des tribunaux, il nous apparaît donc que l’édiction de règles techniques destinées à solidifier la fixation des urnes ne pourrait être justifiée qu’à la condition que de telles règles n’aient pas pour effet d’être disproportionnées, et de faire ainsi renoncer les familles à leur droit à sceller l’urne sur un monument ou de rendre le scellement techniquement impossible.

Xavier Anonin
Docteur en droit

Résonance n° 152 - Juillet 2019

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