Une étude est en cours en partenariat avec l’Atelier Parisien d’Urbanisme, l’APUR, sur l’ensemble des communes adhérentes, en voici les premiers résultats.
L’enquête réalisée auprès des cimetières adhérents au SIFUREP a reçu un accueil très satisfaisant : 107 cimetières ont remis le questionnaire, pour seulement 2 cimetières qui n’ont pas répondu. Les objectifs de l’enquête étaient de montrer l’importance des cimetières dans la vie des communes en termes d’espace, de fréquentation pour les rites funéraires (inhumations, recueillement…) ou pour d’autres motifs (promenade…), les pratiques actuelles et leur évolution dans le temps (pratiques funéraires, mode de gestion…) et la pression éventuelle sur les équipements (reprises…).
Concernant les pratiques funéraires, dans l’enceinte du cimetière, les inhumations de cercueils restent majoritaires malgré une hausse des inhumations d’urnes et des dispersions de cendres, passées en moyenne de 7 % de l’activité en 2003 à 13 % en 2008. Possiblement liés à cette évolution, les travaux prévus les plus fréquemment cités (par 42 % des cimetières) concernent l’espace cinéraire. Le devenir des cendres est en majorité l’inhumation d’urnes (93 % en 2008) par rapport aux dispersions. L’inhumation de cercueils se fait en moyenne plutôt en caveau (63 %) qu’en pleine terre.
Les cimetières proposent en moyenne 3 ou 4 équipements différents. Les ossuaires et les columbariums sont les plus fréquents (73 % et 69 % des cimetières), tandis que selon l’enquête 50 % des cimetières ont un jardin du souvenir. La loi permet de disposer de ces équipements dans un autre cimetière de la commune ou de l’intercommunalité. Moins de 5 % des cimetières sont équipés d’enfeus, il en est de même pour les crématoriums (cet équipement peut toutefois exister à proximité du cimetière).
La gestion des cimetières est surtout confiée aux services de l’état civil et des espaces verts. Si les cimetières proposent des concessions de diverses durées, la tendance est de ne pas créer de nouvelles concessions perpétuelles. En parallèle, les reprises semblent être une pratique en hausse. Toutefois, 9 % des cimetières prévoient une extension.
Sur le plan environnemental, certains cimetières sont confrontés à des contraintes géologiques, en majorité liées à l’eau (28 % des cimetières sont concernés) puis aux carrières (14 %).
En termes de gestion durable du cimetière, des efforts restent à faire. 80 % des cimetières respectent une réglementation sur l’usage des produits phytosanitaires, mais le traitement des déchets (végétaux, recyclables et non recyclables) est signalé dans moins de la moitié des cimetières enquêtés. La récupération des eaux pluviales est réalisée dans seulement 9 % des cimetières.
Les cimetières prennent parfois une place physique importante dans la commune, à l’image du cimetière des Joncherolles qui représente plus de 6 % du territoire communal de Villetaneuse. Nombre de communes accueillent même plusieurs cimetières sur leur territoire (ancien, nouveau, intercommunal…). Leur fréquentation comme lieux de mémoire et de recueillement est bien prise en compte avec la présence généralisée de bancs et de points d’eau, en revanche seule une minorité de cimetières (moins de 10 %) dispose d’un espace ou d’une salle de cérémonie. En termes d’accès, seuls 41 % proposent un parc de stationnement, même si 81 % des cimetières sont accessibles aux voitures particulières.
De nombreux cimetières (60 %) sont aussi fréquentés pour d’autres usages, soit comme lieu de promenade, comme raccourci ou encore pour des visites (Journées du Patrimoine…). Si 18 % des cimetières déclarent ne pas avoir de gardien, les vols et actes de vandalisme ne sont que marginaux, excepté les vols sur concessions (fleurs, vases, plaques…) déplorés dans 86 % des cimetières.
Enfin, le cimetière est un lieu où des éléments importants du patrimoine sont à préserver, que ce soit le patrimoine bâti, la faune ou la flore. L’enquête tend à montrer que les gestionnaires ont parfois des difficultés à les identifier. Parmi ces éléments de patrimoine remarquable cités, il ressort l’architecture de Robert Auzelle et les sculptures de Maurice Calka dans le cimetière des Joncherolles. Le réemploi des matériaux funéraires apparaît comme une pratique marginale, elle a été citée pour seulement deux cimetières, dont la transformation d’une chapelle en ossuaire à Épinay-sur-Seine. De plus, seuls 5 % revendent des concessions avec monuments anciens. L’étude monographique permettra de donner des éléments de référence pour aider à identifier le patrimoine des cimetières.
* Il est important de préciser que les questions ont été inégalement renseignées (méconnaissance, difficulté à renseigner les éléments du passé etc.).
Enjeux d’aménagement
1 - Situations métropolitaines des cimetières du Sifurep
L’inscription des cimetières dans la métropole parisienne est complexe. Soumis à un nouveau cadre réglementaire, à partir du début du XIXe siècle, ils sont éloignés des centres urbains. Pris dans un développement radioconcentrique et une organisation fonctionnelle du territoire, ils sont aussi soumis à des effets centrifuges et à une redistribution de grands équipements qui expliquent souvent leur proximité avec des forts militaires, des hôpitaux, des parcs et des terrains de sport, de grandes infrastructures routières, ferrées ou fluviales. La rareté et la valeur des terrains libres ont souvent rendu difficile leur localisation. Aujourd’hui ils se trouvent largement rattrapés par la ville habitée et industrieuse (activité, bureaux, habitat individuel et collectif, équipements d’échelles globales ou locales). Enfin, la proximité des emprises d’infrastructures et la mutation des occupations existantes (activité, industrie par exemple) placent nombre d’entre eux au coeur de territoires en mutation.
La dimension administrative s’avère également complexe. Plusieurs cimetières communaux sont implantés hors de la commune dont ils dépendent (à Paris pour les cimetières de Gentilly et Montrouge, à Nanterre pour ceux de Neuilly et Puteaux, à Pantin-Bobigny, Saint-Ouen, Ivry, Bagneux et Thiais pour les cimetières parisiens extra-muros…). Les cimetières intercommunaux n’échappent pas à cette règle. Celui des Joncherolles est sur deux communes adhérentes à son Syndicat, Pierrefitte-sur-Seine et Villetaneuse, celui de Valenton est dans une commune non adhérente à son syndicat.
Si nombre de cimetières membres du Sifurep se trouvent aux confins des communes et de ce fait parfois proches les uns des autres (comme à l’ouest dans le secteur de La Défense ou à l’est dans la Corniche de Romainville), plusieurs d’entre eux sont restés liés aux centres anciens ou nouveaux, à proximité des mairies ou des lieux de culte (Romainville, Bobigny…). Le développement et la répartition des funérariums et des crématoriums ont aussi enrichi ces dernières années cette organisation dans la mesure où ils ont été rapprochés dans bien des cas des lieux d’inhumation (Arcueil, Champigny-sur-Marne, Montreuil, Nanterre, cimetières intercommunaux de Clamart ou des Joncherolles). De même, la proximité des établissements de santé (hôpitaux notamment) rend compte du système fonctionnel et symbolique dans lequel les cimetières sont inscrits.
La diversité des situations géographiques, topographiques, mais aussi géologiques et hydrologiques doit aussi être signalée. Si les cimetières étudiés sont souvent sur des terrains plats, plusieurs d’entre eux sont implantés à flanc de coteaux et sont de véritables belvédères ouverts sur les grands paysages de la métropole (Arcueil, Montreuil, Nanterre Sud, Pierrefitte-sur-Seine, Romainville, Suresnes…). Les contraintes de sol et de sous-sol (eaux souterraines, carrières…) ont été signalées lors de l’enquête. Elles impactent souvent la gestion des lieux mais pourraient aussi davantage conduire à organiser l’offre de sépulture et les projets d’aménagement en conséquence.
Ces différents aspects d’un système métropolitain complexe plaident pour que les cimetières soient de véritables entités urbaines inscrites dans le territoire. Au XXIe siècle, ils ne peuvent plus être considérés comme des espaces fonctionnels marqués du déni de la mort, vision qui a trop longtemps nui à leur création et à leur gestion. Ils doivent retrouver une place dans les débats communaux et intercommunaux et dans les outils de l’aménagement à toutes les échelles (schémas directeurs, SCOT, agendas 21, PLU, cahiers des charges architecturaux, urbains et paysagers etc.). Leur nombre et leur surface le justifient à eux seuls. Les communes adhérentes au Sifurep représentent 37 207 ha, l’ensemble des cimetières présents sur ces communes occupe 759 ha (2.04 % de la surface communale), la part des cimetières membres du Sifurep est 412 ha, soit 1.11 % de la surface communale (les emprises dans Paris des cimetières des communes membres du Sifurep ne sont pas comprises dans ce calcul). Leur caractère pratiquement immuable impose aussi d’en faire des leviers pour améliorer les situations urbaines existantes et accompagner dignement les mutations urbaines qui les environnent ou qui ne tarderont pas à le faire.
Dans cette perspective, quelles peuvent être les paramètres à prendre en compte ? Ceux-ci sont d’abord étroitement liés aux missions du cimetière. Ce lieu d’inhumation et de recueillement doit satisfaire aux obligations de services incontournables (accueil des familles, inhumations, exhumations, décence, sécurité, hygiène…). Plus largement le cimetière est un lieu de mémoire individuelle et collective, mais aussi sociale, culturelle et artistique. En cela, le cimetière est un équipement particulier qui ne peut être confondu avec d’autres espaces publics (places ou voies urbaines et surtout parcs ou jardins auxquels ils sont souvent rattachés). L’enquête a par ailleurs confirmé que les cimetières sont ouverts sur d’autres pratiques. Ce sont des lieux de traversées, de promenades, de découvertes de la faune et de la flore mais encore du patrimoine. Par ailleurs, les sondages nationaux confirment régulièrement qu’ils font l’objet de nouvelles attentes de la part du public, attentes largement tournées vers l’amélioration de leur cadre paysager correspondant à la fois à l’évolution des pratiques funéraires et à leur nouveau rôle urbain.
D’autres critères plus exogènes invitent à penser différemment leur place et leur rôle dans l’environnement urbain. Dans le tissu urbain existant ou en devenir, le cimetière, comme certaines emprises qui le bordent, peut former une enclave importante, un obstacle aux pratiques urbaines. Dans ces conditions, certains accès pourraient être ouverts plus largement, d’autres pourraient être déplacés ou créés comme cela a été pratiqué à Saint-Denis ou prévu aux Joncherolles.
Concernant les pratiques funéraires, dans l’enceinte du cimetière, les inhumations de cercueils restent majoritaires malgré une hausse des inhumations d’urnes et des dispersions de cendres, passées en moyenne de 7 % de l’activité en 2003 à 13 % en 2008. Possiblement liés à cette évolution, les travaux prévus les plus fréquemment cités (par 42 % des cimetières) concernent l’espace cinéraire. Le devenir des cendres est en majorité l’inhumation d’urnes (93 % en 2008) par rapport aux dispersions. L’inhumation de cercueils se fait en moyenne plutôt en caveau (63 %) qu’en pleine terre.
Les cimetières proposent en moyenne 3 ou 4 équipements différents. Les ossuaires et les columbariums sont les plus fréquents (73 % et 69 % des cimetières), tandis que selon l’enquête 50 % des cimetières ont un jardin du souvenir. La loi permet de disposer de ces équipements dans un autre cimetière de la commune ou de l’intercommunalité. Moins de 5 % des cimetières sont équipés d’enfeus, il en est de même pour les crématoriums (cet équipement peut toutefois exister à proximité du cimetière).
La gestion des cimetières est surtout confiée aux services de l’état civil et des espaces verts. Si les cimetières proposent des concessions de diverses durées, la tendance est de ne pas créer de nouvelles concessions perpétuelles. En parallèle, les reprises semblent être une pratique en hausse. Toutefois, 9 % des cimetières prévoient une extension.
Sur le plan environnemental, certains cimetières sont confrontés à des contraintes géologiques, en majorité liées à l’eau (28 % des cimetières sont concernés) puis aux carrières (14 %).
En termes de gestion durable du cimetière, des efforts restent à faire. 80 % des cimetières respectent une réglementation sur l’usage des produits phytosanitaires, mais le traitement des déchets (végétaux, recyclables et non recyclables) est signalé dans moins de la moitié des cimetières enquêtés. La récupération des eaux pluviales est réalisée dans seulement 9 % des cimetières.
Les cimetières prennent parfois une place physique importante dans la commune, à l’image du cimetière des Joncherolles qui représente plus de 6 % du territoire communal de Villetaneuse. Nombre de communes accueillent même plusieurs cimetières sur leur territoire (ancien, nouveau, intercommunal…). Leur fréquentation comme lieux de mémoire et de recueillement est bien prise en compte avec la présence généralisée de bancs et de points d’eau, en revanche seule une minorité de cimetières (moins de 10 %) dispose d’un espace ou d’une salle de cérémonie. En termes d’accès, seuls 41 % proposent un parc de stationnement, même si 81 % des cimetières sont accessibles aux voitures particulières.
De nombreux cimetières (60 %) sont aussi fréquentés pour d’autres usages, soit comme lieu de promenade, comme raccourci ou encore pour des visites (Journées du Patrimoine…). Si 18 % des cimetières déclarent ne pas avoir de gardien, les vols et actes de vandalisme ne sont que marginaux, excepté les vols sur concessions (fleurs, vases, plaques…) déplorés dans 86 % des cimetières.
Enfin, le cimetière est un lieu où des éléments importants du patrimoine sont à préserver, que ce soit le patrimoine bâti, la faune ou la flore. L’enquête tend à montrer que les gestionnaires ont parfois des difficultés à les identifier. Parmi ces éléments de patrimoine remarquable cités, il ressort l’architecture de Robert Auzelle et les sculptures de Maurice Calka dans le cimetière des Joncherolles. Le réemploi des matériaux funéraires apparaît comme une pratique marginale, elle a été citée pour seulement deux cimetières, dont la transformation d’une chapelle en ossuaire à Épinay-sur-Seine. De plus, seuls 5 % revendent des concessions avec monuments anciens. L’étude monographique permettra de donner des éléments de référence pour aider à identifier le patrimoine des cimetières.
* Il est important de préciser que les questions ont été inégalement renseignées (méconnaissance, difficulté à renseigner les éléments du passé etc.).
Enjeux d’aménagement
1 - Situations métropolitaines des cimetières du Sifurep
L’inscription des cimetières dans la métropole parisienne est complexe. Soumis à un nouveau cadre réglementaire, à partir du début du XIXe siècle, ils sont éloignés des centres urbains. Pris dans un développement radioconcentrique et une organisation fonctionnelle du territoire, ils sont aussi soumis à des effets centrifuges et à une redistribution de grands équipements qui expliquent souvent leur proximité avec des forts militaires, des hôpitaux, des parcs et des terrains de sport, de grandes infrastructures routières, ferrées ou fluviales. La rareté et la valeur des terrains libres ont souvent rendu difficile leur localisation. Aujourd’hui ils se trouvent largement rattrapés par la ville habitée et industrieuse (activité, bureaux, habitat individuel et collectif, équipements d’échelles globales ou locales). Enfin, la proximité des emprises d’infrastructures et la mutation des occupations existantes (activité, industrie par exemple) placent nombre d’entre eux au coeur de territoires en mutation.
La dimension administrative s’avère également complexe. Plusieurs cimetières communaux sont implantés hors de la commune dont ils dépendent (à Paris pour les cimetières de Gentilly et Montrouge, à Nanterre pour ceux de Neuilly et Puteaux, à Pantin-Bobigny, Saint-Ouen, Ivry, Bagneux et Thiais pour les cimetières parisiens extra-muros…). Les cimetières intercommunaux n’échappent pas à cette règle. Celui des Joncherolles est sur deux communes adhérentes à son Syndicat, Pierrefitte-sur-Seine et Villetaneuse, celui de Valenton est dans une commune non adhérente à son syndicat.
Si nombre de cimetières membres du Sifurep se trouvent aux confins des communes et de ce fait parfois proches les uns des autres (comme à l’ouest dans le secteur de La Défense ou à l’est dans la Corniche de Romainville), plusieurs d’entre eux sont restés liés aux centres anciens ou nouveaux, à proximité des mairies ou des lieux de culte (Romainville, Bobigny…). Le développement et la répartition des funérariums et des crématoriums ont aussi enrichi ces dernières années cette organisation dans la mesure où ils ont été rapprochés dans bien des cas des lieux d’inhumation (Arcueil, Champigny-sur-Marne, Montreuil, Nanterre, cimetières intercommunaux de Clamart ou des Joncherolles). De même, la proximité des établissements de santé (hôpitaux notamment) rend compte du système fonctionnel et symbolique dans lequel les cimetières sont inscrits.
La diversité des situations géographiques, topographiques, mais aussi géologiques et hydrologiques doit aussi être signalée. Si les cimetières étudiés sont souvent sur des terrains plats, plusieurs d’entre eux sont implantés à flanc de coteaux et sont de véritables belvédères ouverts sur les grands paysages de la métropole (Arcueil, Montreuil, Nanterre Sud, Pierrefitte-sur-Seine, Romainville, Suresnes…). Les contraintes de sol et de sous-sol (eaux souterraines, carrières…) ont été signalées lors de l’enquête. Elles impactent souvent la gestion des lieux mais pourraient aussi davantage conduire à organiser l’offre de sépulture et les projets d’aménagement en conséquence.
Ces différents aspects d’un système métropolitain complexe plaident pour que les cimetières soient de véritables entités urbaines inscrites dans le territoire. Au XXIe siècle, ils ne peuvent plus être considérés comme des espaces fonctionnels marqués du déni de la mort, vision qui a trop longtemps nui à leur création et à leur gestion. Ils doivent retrouver une place dans les débats communaux et intercommunaux et dans les outils de l’aménagement à toutes les échelles (schémas directeurs, SCOT, agendas 21, PLU, cahiers des charges architecturaux, urbains et paysagers etc.). Leur nombre et leur surface le justifient à eux seuls. Les communes adhérentes au Sifurep représentent 37 207 ha, l’ensemble des cimetières présents sur ces communes occupe 759 ha (2.04 % de la surface communale), la part des cimetières membres du Sifurep est 412 ha, soit 1.11 % de la surface communale (les emprises dans Paris des cimetières des communes membres du Sifurep ne sont pas comprises dans ce calcul). Leur caractère pratiquement immuable impose aussi d’en faire des leviers pour améliorer les situations urbaines existantes et accompagner dignement les mutations urbaines qui les environnent ou qui ne tarderont pas à le faire.
Dans cette perspective, quelles peuvent être les paramètres à prendre en compte ? Ceux-ci sont d’abord étroitement liés aux missions du cimetière. Ce lieu d’inhumation et de recueillement doit satisfaire aux obligations de services incontournables (accueil des familles, inhumations, exhumations, décence, sécurité, hygiène…). Plus largement le cimetière est un lieu de mémoire individuelle et collective, mais aussi sociale, culturelle et artistique. En cela, le cimetière est un équipement particulier qui ne peut être confondu avec d’autres espaces publics (places ou voies urbaines et surtout parcs ou jardins auxquels ils sont souvent rattachés). L’enquête a par ailleurs confirmé que les cimetières sont ouverts sur d’autres pratiques. Ce sont des lieux de traversées, de promenades, de découvertes de la faune et de la flore mais encore du patrimoine. Par ailleurs, les sondages nationaux confirment régulièrement qu’ils font l’objet de nouvelles attentes de la part du public, attentes largement tournées vers l’amélioration de leur cadre paysager correspondant à la fois à l’évolution des pratiques funéraires et à leur nouveau rôle urbain.
D’autres critères plus exogènes invitent à penser différemment leur place et leur rôle dans l’environnement urbain. Dans le tissu urbain existant ou en devenir, le cimetière, comme certaines emprises qui le bordent, peut former une enclave importante, un obstacle aux pratiques urbaines. Dans ces conditions, certains accès pourraient être ouverts plus largement, d’autres pourraient être déplacés ou créés comme cela a été pratiqué à Saint-Denis ou prévu aux Joncherolles.
2 - Espace libre et environnement
Face à la rareté des terrains dans la zone dense de l’agglomération et à la permanence de leurs emprises foncières, les cimetières doivent pouvoir être pris en compte dans un système large d’espaces libres. En ce sens, ils peuvent être utilement rapprochés des parcs et jardins notamment pour les usages qu’ils ont en commun (promenade, repos, détente, loisir…). Leur gestion relevant dans bien des cas de la direction des espaces verts les rapproche de fait de ces équipements. Surtout, leur durabilité en fait des leviers essentiels du renforcement de la nature en ville, considérée à la fois sous l’angle de la biodiversité et du développement durable.
Souvent proches de grands corridors écologiques (fleuves, routes, voies ferrées) et de grands espaces libres (bois, parcs, jardins, terrains de sport, friches…), les cimetières, lieux de calme peu ou pas éclairés, peuvent participer aux migrations ou à la protection d’espèces fauniques ou florales. Ces espaces aujourd’hui très minéraux et souvent dominés par les sols imperméables (bitume) pourraient contribuer à une meilleure gestion des eaux de surface. Recueillie pour l’arrosage des plantations ou infiltrée dans des sols moins étanches, cette eau réduirait les quantités déversées en égout (donc traitées) voire les risques de ravinement ou d’inondation. Le renforcement des emprises plantées, la réduction des emprises minérales et imperméables et une meilleure gestion des eaux peuvent fortement contribuer à limiter localement les effets des îlots de chaleur urbains (ICU) en réduisant les températures diurnes et nocturnes, en augmentant l’humidité de l’air (évaporation et évapotranspiration des plantes) et en favorisant l’aération (vents locaux dus aux différences de température). Cette dimension environnementale peut avoir des répercussions qualitatives sur l’aménagement et la gestion des cimetières. À ce jour, l’enquête révèle qu’elle est très peu intégrée (voir plus haut).
Les cartes réalisées par l’Apur sur les strates du végétal, dont la diversité est utile à la biodiversité, et sur la thermographie d’été révèlent de forts contrastes entre les cimetières et leur environnement et entre les cimetières eux-mêmes. Dans de rares cas, ils sont autant ou plus plantés que le reste du territoire, et apparaissent comme des îlots de verdure et de fraîcheur (Arcueil, Bobigny, Nanterre Mont-Valérien, Romainville nouveau, Les Joncherolles). Le plus souvent ils sont peu plantés et chauds et alors contrastent (Romainville ancien) ou se fondent avec l’environnement proche (Drancy, Le Bourget).
Parmi les cimetières membres du Sifurep, plusieurs exemples de réaménagement récents doivent être signalés pour leur exemplarité selon les critères qui viennent d’être évoqués : le cimetière de Courbevoie, qui a inspiré celui plus récent d’Issy-les-Moulineaux, ceux de Bondy, Levallois-Perret, Saint-Ouen ou des Joncherolles de plus en plus engagés dans cette démarche.
Ces aménagements peuvent peser lourdement sur le budget communal, mais il est possible de les réaliser par tranches sur plusieurs années en ayant soin toutefois de s’appuyer sur un plan de gestion et d’aménagement global, qui fait encore trop souvent défaut. De même, en cessant d’isoler les cimetières du territoire et de ses transformations, il est possible d’améliorer leurs paysages et leurs usages en faisant appel à d’autres sources de financements. En Seine-Saint-Denis par exemple, la gestion des eaux en surface contribue au financement et à la qualité des espaces publics, donc à une gestion plus pérenne et plus globale.
3 - Le cimetière comme lieu : murs, allées et divisions
Les visites de terrain réalisées pour un corpus restreint de 28 cimetières ont permis une lecture comparée et la définition de types récurrents et d’un panel d’actions possibles à l’échelle du cimetière. Les éléments fondamentaux que sont les murs, les allées et les divisions seront examinés successivement.
Les murs forment la partie la plus visible et caractéristique du cimetière. De tout temps ils l'isolent du monde des vivants et protègent cet espace sacré. Le plus souvent une grande hétérogénéité dans la forme et les matériaux a été observée. Quelques très beaux exemples existent quels que soient les matériaux : pierres ou briques appareillées, murs en meulière ou enduit, palissades en béton. Malheureusement, ce dernier mode de construction est trop souvent employé dans sa version la plus pauvre (poteaux et remplissage par panneaux). Dès 1975, une circulaire du ministère de l’Intérieur avait pourtant signalé qu’une "haie vive peut avantageusement remplacer les murs en plaques de béton ou en minéraux agglomérés qui depuis quelques années sont trop souvent préférés, pour des raisons d’économies, aux murs traditionnels. Elle permet parfois de masquer les constructions extérieures disgracieuses, et peut être l’amorce d’un espace vert". (n°75-492 du 30 septembre 1975).
Des linéaires parfois très longs déprécient les cimetières à l’extérieur comme à l’intérieur. Dans certains cas des palissades ont remplacé des murs anciens dégradés ou coûteux en entretien. Plusieurs beaux exemples confirment qu’il est possible d’améliorer la situation en plantant davantage ces murs ou leurs abords (arbres, arbustes, plantes grimpantes). Dans certains cas, leur hauteur souvent importante (plus de 2 m) pourrait être réduite en restant conforme à la réglementation (1,50 m minimum). Ainsi, le cimetière Voltaire de Suresnes ouvre la vue sur un grand paysage en disposant des grilles sur des murs volontairement bas. Les grilles doublées de haies, bien qu’autorisées par la loi, sont très rares (Bondy intercommunal, Nanterre Mont-Valérien, Les Joncherolles). Enfin, dans de rares cas ont pu être observés des percements dans les murs, des grilles assurant la sécurité des lieux tout en permettant des relations visuelles entre la ville et le cimetière (Montreuil ancien). Plus souvent des portes métalliques à claire-voie permettent une ouverture visuelle sur les cimetières (Arcueil, Bondy intercommunal, Coeuilly à Champigny-sur-Marne, Créteil, Drancy, Épinay-sur-Seine, Issy-les-Moulineaux, Les Joncherolles, Maisons-Alfort, Saint-Denis).
Il ressort de ces observations que les plus beaux linéaires de murs devraient être entretenus et conservés. La plantation des clôtures devrait aussi être plus largement recherchée, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur du cimetière, et des relations visuelles davantage permises sans impacter le service funéraire ordinaire et le recueillement. Lorsque l’emprise le permet, des grilles ou grillages plantés devraient être préférés aux murs pleins tant pour des raisons esthétiques qu’environnementales.
Les voies et allées correspondent à l’espace public du cimetière sur lequel les communes peuvent agir avec plus de facilité que sur les terrains concédés. À de très rares exceptions près, elles structurent de manière très ordonnée la composition (grille orthogonale). Les matériaux de revêtement témoignent aussi de l’histoire des sites et soulignent l’organisation hiérarchique de la trame (pavés et bitume pour les allées principales, stabilisé et graviers pour les allées secondaires). Au fil des travaux successifs, les pavés ont souvent tendance à être remplacés par le bitume, matériau plus confortable mais aussi plus routier et connu pour son imperméabilité et sa contribution aux effets d’îlots de chaleur urbains. Enfin, à de rares exceptions près et à la différence notable des cimetières parisiens, les voies et allées des cimetières visités sont rarement plantées.
Plusieurs sites visités pourraient servir de modèles pour les aménagements à venir. Selon les cas, les sols anciens ont été respectés ou repris en gardant des traces des revêtements antérieurs (trottoirs et caniveaux par exemple), des sols moins austères et plus perméables ont aussi été mis en œuvre et un travail important de plantation engagé sur certaines allées ou croisées de voies (gazon, arbres d’alignement…). Plantations et revêtements contribuent ainsi à redessiner le cimetière, à mettre en valeur l’ordre et la hiérarchie de la composition. Ils améliorent la perception et l’environnement des sites. Pour tout ou partie de ces interventions signalons en plus des cas précités, les exemples d’Arcueil, de Bobigny centre, Épinay-sur-Seine, Gentilly, Nanterre, Romainville nouveau.
Si les divisions peuvent paraître plus difficiles à transformer, du fait des concessions privées, elles peuvent également contribuer à améliorer le paysage des lieux et leur bilan environnemental. C’est le cas par exemple des carrés militaires dont beaucoup sont encore très minéraux alors que des références plus végétales existent et sont souvent attachés, pour le public, à l’identité de ces lieux. Sans chercher à atteindre la beauté et l’unité du cimetière militaire de Suresnes, il est possible de planter largement ces divisions avec des essences ne nécessitant pas un entretien trop lourd et l’usage de produits polluants (ce qui peut être le cas des rosiers).
Comme de nombreux cas le prouvent, l’aire des concessions privées peut aussi accueillir une végétation diversifiée atténuant l’effet minéral et le caractère sériel de la production marbrière des 50 dernières années. Ces plantations peuvent être réalisées par les familles mais aussi par la commune lors des reprises de concessions notamment. Elles peuvent aussi contribuer à mettre en valeur le patrimoine existant.
Signalons à ce sujet les beaux exemples de Villetaneuse, Bobigny, Pierrefitte-sur-Seine, cimetière ancien de Champigny-sur-Marne, Créteil. Néanmoins, l’évolution de ces paysages intérieurs devrait aussi être davantage pensée en concertation avec les professionnels du funéraire dont l’offre actuelle peine encore à intégrer cette dimension paysagère et environnementale. À ce sujet, une évolution du service aux familles pourrait être davantage développée en privilégiant l’entretien d’une tombe plantée plutôt que la vente immédiate de dalles et de stèles couvrant la totalité de la concession. L’extension du cimetière nouveau de Champigny-sur-Marne datant de 2005 pourrait notamment être l’occasion de créer une nouvelle offre de divisions engazonnées à l’instar du cimetière du Mont-Valérien.
4 - Développement de l’offre funéraire
Il est reconnu que la crémation peut conduire à transformer les espaces et les rituels. Son développement est souvent associé de manière générique à l’image d’un cimetière planté et moins régulier que ceux que nous connaissons. Si le niveau d’équipement en matière cinéraire est très inégal dans les cimetières du Sifurep, ceux qui disposent d’espaces cinéraires confirment globalement que la production sérielle sur catalogue s’est redéployée vers les columbariums, cavurnes et même jardins du souvenir. Les mêmes aménagements se retrouvent d’un cimetière à l’autre. Face à ce panel limité certaines communes ont fait des choix plus atypiques (cylindres, pyramides). Ces différentes offres ont le mérite d’introduire dans les nécropoles saturées de monuments, des espaces ouverts où la nature est présente. En revanche elles manquent encore d’une réflexion d’ensemble susceptible d’améliorer leur intégration dans des cimetières qui ont tous une identité particulière.
Par ailleurs, les dispositifs les plus courants, des groupements de cases en colonne ou en murets sur des emprises plantées (gazon, arbustes, plantes grimpantes), s’avèrent peu denses. Ils risquent d’arriver à saturation à court ou moyen terme et d’imposer de nouveaux investissements ou de nouvelles solutions.
Des solutions plus denses ou plus simples ont pu être observées. Il s’agit en général d’organisation en murs plus ou moins longs et plus ou moins hauts. Ces columbariums peuvent occuper tout ou partie d’une division. Ils peuvent encore participer à la qualification d’une partie du mur d’enceinte. Les densités qui peuvent être obtenues sont plus importantes, mais le défaut le plus souvent constaté est l’austérité de la construction, la pauvreté du dessin architectural et la densité perçue d’un empilement de cases. Il suffirait parfois d’un travail sur le couronnement des murs, sur leurs retournements ou encore d’intégrer des plantations (plantes grimpantes ou tapissantes, arbres ou arbustes) pour que l’ensemble gagne en qualité. Ponctuellement la "noblesse" des matériaux pourrait être améliorée (plaques d’inscriptions ou de fermeture des cases).
Le principe de ces columbariums, également valable d’ailleurs pour les ossuaires en sursol voire les enfeus, a l’intérêt de pouvoir participer à la constitution et à l’amélioration des clôtures. Leur implantation en limite du cimetière a en effet été observée et ne semble pas poser de problème majeur (columbariums à Maisons-Laffitte et ossuaire au cimetière ancien de Champigny-sur-Marne…). Faire des columbariums, ossuaires ou enfeus des éléments de la clôture pourrait conduire à réduire ou mutualiser les coûts et à masquer la pauvreté de certaines limites.
Dans tous les cas, il faudrait veiller à éviter les effets trop répétitifs, s’assurer de la qualité architecturale et des matériaux, éviter des hauteurs trop importantes donnant une impression inhumaine, introduire de la végétation voire des éléments de patrimoine ancien issu des sépultures reprises… Ces solutions, rares dans les cimetières enquêtés à ce jour, sont courantes en Europe (Suisse, Italie, Espagne).
Les cavurnes sont plus discrètes car enterrées. Leur intégration pourrait encore être améliorée en évitant de trop la distinguer du reste des concessions. La ville de Paris a expérimenté ces dernières années une solution qui reprend globalement les dimensions d’une concession ordinaire. Plusieurs cases peuvent être réalisées et une partie plantée. Réparties dans le cimetière, ces sépultures pourraient être modulées en fonction des espaces environnants (matériaux, couleurs) ou prendre une forme unique à définir, comme dans les cimetières parisiens.
Il faut enfin souligner que l’offre en columbariums et cavurnes pourrait contribuer à préserver le patrimoine et le paysage funéraire hérité en prenant place dans des monuments funéraires dont la qualité esthétique ou celle des matériaux justifierait le réemploi. Outre l’aspect patrimonial, retenons les atouts en termes de paysage et de développement durable (économie de matériaux, durée potentiellement courte du recyclage, possibilité d’introduire des plantations à l’échelle d’une concession et donc au sein des divisions etc.).
5 - Jardins du souvenir
Présents de manière encore inégale dans les cimetières du Sifurep, les sites observés témoignent de la volonté des communes d’accroître leur offre cinéraire. Comme les columbariums, les jardins du souvenir introduisent espace libre et nature au sein des nécropoles, mais prennent aussi des formes répétitives (aires rondes ou rectangulaires, en galets blancs, reproduction de flammes stylisées en granit rose, pergola agrémentée de rosiers etc.). Les dispositifs permettant l’inscription des noms des défunts peuvent aussi avoir ce caractère (livre de pierre, plaques de granit rose, bleu, noir…).
L’économie d’investissement et le peu de place disponible rendent souvent leur réalisation difficile, mais du fait du nombre important de cimetières qui devront être équipés de jardins du souvenir à l’horizon 2014, il semble qu’une amélioration de l’offre peut encore être recherchée en se donnant les moyens de développer des projets qui tirent le meilleur parti des conditions de site et de l’identité, toujours singulière, de chaque cimetière.
L’organisation même de la dispersion des cendres devrait permettre davantage de possibilités que celles qui existent aujourd’hui tant sur le plan technique (enfouissement, versement dans des plans d’eau par exemple) que sur celui du cérémonial (aire suffisante pour la réunion de plusieurs personnes, pupitres, bancs, abris…).
Enfin, les conditions de la gestion de l’espace dans le temps mériteraient d’être approfondies. La commémoration du défunt au moment de la cérémonie de dispersion, mais également après, pose la question de la pérennité et des formes prises par la volonté de "laisser trace" (fleurs, jouets, photos…). Les réponses à cette difficile question relèvent à la fois de choix techniques, de conditions d’entretien, d’une réglementation intérieure et d’un travail de communication auprès du public.
6 - Équipements et aménités
L’enquête et les visites de terrain ont permis d’étudier les autres équipements et aménités des cimetières du Sifurep (abris, fontaines, bancs, poubelles…). Si les abris pour les visiteurs ou les espaces de cérémonies sont rares, certains beaux exemples ont été observés (Champigny-sur-Marne nouveau, Saint-Ouen). Même si la place fait souvent défaut, les cimetières souffrent d’un manque d’espaces de cérémonie, il faudrait donc chercher à étendre cette offre.
Quelques beaux exemples de fontaines ont été remarqués (Arcueil, Romainville ancien), mais ces éléments de mobilier urbain ainsi que les bancs ne sont pas toujours en nombre suffisant ou convenablement répartis. De plus, ils peuvent être très hétérogènes dans un même cimetière. Ces éléments sont pourtant essentiels à la qualité des lieux et à leur ouverture à des usages diversifiés (recueillement, repos…).
Enfin, les poubelles sont sans doute celles qui posent le plus de problèmes. Certaines communes sont parvenues à bien les intégrer, mais dans nombre de cas elles restent sans qualité et disposées trop près des tombes, à la croisée ou en fond de perspectives des allées… Là encore, dans bien des cas il suffirait de peu pour que des réponses de qualité soient trouvées.
Patrimoine funéraire : identifier et intervenir
1 - Description
Au cimetière, mort et mémoire s’entremêlent générant une culture qui se décline dans un rapport entre le construit et le végétal, à travers les bâtiments, les structures, les monuments collectifs et les sépultures privées. Cette culture matérielle de la mort a une valeur qui, à divers degrés, peut être définie comme patrimoniale. Étymologiquement, ce terme indique la transmission de père en fils et donc de génération en génération. La sphère funéraire, y compris contemporaine, fait partie intégrante de cette transmission qui n’inclut pas uniquement et nécessairement "le beau" ou "l’exceptionnel". L’intérêt patrimonial évalué dans cette étude est déterminé par la présence de plusieurs facteurs caractérisant les architectures, les tombes, les arts appliqués, les inscriptions etc. Ont été ainsi prises en considération la qualité, la représentativité, la rareté et l’originalité du dessin, de la composition, des matériaux et des techniques.
L’analyse conduite sur les 28 nécropoles, dont les 3/4 ont été créées avant 1900, a montré la présence d’une quantité moyenne et élevée de patrimoine ancien, et même très élevée comme dans les cas de Saint-Denis et de Montrouge. Il est constitué en grande partie par des dalles ou des coffres hauts en avant d’une stèle qui varie en dimension et en forme. Les chapelles sont présentes en quantité très variable selon les cimetières mais elles ne dominent jamais le panorama funéraire.
Cepenant un examen attentif des sépultures, du mobilier funéraire et des structures collectives comme les jardins du souvenir et les columbariums a permis d’observer la pauvreté en nombre et en qualité du patrimoine contemporain. À l’exception de deux cas, Champigny ancien et Montrouge, les 3/4 des cimetières étudiés présentent un niveau bas ou très bas de tombes réalisées après les années 1920 ayant un certain intérêt. Pour la quasi-totalité, celles-ci sont issues de l’art industriel en granite ou en granito des années 1920-1970, auxquelles s’ajoutent quelques rares exemples de monuments originaux.
Dans une partie du corpus étudié, a pu être notée une grande richesse des types d’arts appliqués comme les photos sur émail, les clôtures en métal, le mobilier en grès ou céramique et les vitraux. En revanche, la sculpture, dans la plupart des cas, est rare mais souvent de très bonne qualité.
2 - Axes d’interventions
2 - 1. Documentation photographique
La présence du patrimoine ancien, qu’elle soit quantitative ou qualitative, nécessite avant tout une documentation photographique. Celle-ci est essentielle pour garder une trace de monuments dont l’état de conservation n’est pas toujours valorisant. Elle est également indispensable en cas de vol et en prévision d’interventions particulières (déplacement, restauration, reprise, changement d’usage ou destruction). Enfin, elle pourrait utilement contribuer à une meilleure connaissance historique, mais aussi sociale, des cimetières et des communes, aspects essentiels qui n’ont pu être développés dans le temps de cette étude.
2 - 2. Conservation, restauration, reconversion
Le cimetière est et doit rester un espace vivant, inscrit avec sa diversité dans le tissu urbain, loin de toute "muséification" qui pourrait en altérer la fonction. C’est pour cela que le patrimoine funéraire du passé doit être géré en étudiant les différents types d’interventions nécessaires et praticables :
a) Conserver l’état du monument déjà en ruine en laissant agir le temps et en ne maîtrisant que la végétation lorsqu’elle existe. Une intervention plus réfléchie et structurée peut conduire à introduire plus de plantations.
b) Restaurer en rétablissant l’intégrité et l’état originel de certains monuments reconnus pour leur grande valeur patrimoniale ou leur représentativité d’une série ou d’un type funéraire qui, à défaut, pourraient disparaitre à jamais.
c) Établir de façon plus claire et méthodique une politique de reprise et/ou de reconversion des monuments en évitant l’état d’abandon prolongé. Plus précisément, les chapelles pourraient être transformées en ossuaires ou en lieux de conservation d’urnes cinéraires, tel que cela commence à être pratiqué dans certains cimetières français et européens.
d) Prévoir une politique d’intervention rapide concernant la production des coffres hauts en granito qui, dans nombre de cimetières, sont fortement détériorés jusqu’à présenter des fissures et des cavités. Dans beaucoup de cas, la restauration n’est pas envisageable. Ces tombes, devenues visuellement "indécentes" devraient être inévitablement retirées.
2 - 3. Plantations et patrimoine
La conservation et la valorisation du patrimoine devraient être articulées à une vision d’ensemble. Dans certains cas, les plantations peuvent contribuer à valoriser la qualité des tombes, des divisions mais également du cimetière considéré, dans sa globalité, comme patrimoine.
2 - 4. Dignité visuelle : les cas urgents
Dans plusieurs cas, une action publique contemporaine et de qualité permettrait d’accroître l’intérêt esthétique ou la valeur patrimoniale des cimetières. Elle apparaît d’autant plus essentielle lorsqu’il s’agit de redonner une dignité à des secteurs qui aujourd’hui en sont dépourvus, comme les aires d’inhumation pour les indigents ou les nouveau-nés.
2 - 5. Art et contemporanéité
Il apparaît urgent de revivifier le dialogue entre la sphère funéraire et l’art contemporain, dialogue qui malgré les foires et les salons professionnels semble dans les cimetières analysés totalement interrompu depuis des décennies. Il importe de stimuler une réflexion sur la production funéraire privée et sur le mobilier, de même que sur la composition de lieux à caractère collectif tels les columbariums et les jardins du souvenir. Ce dialogue pourrait ainsi se traduire par des événements (expositions d’une production de qualité à l’intérieur d’un cimetière, débats et rencontres avec les entreprises, les artisans, les artistes). Ce dialogue devrait être soutenu par une politique d’aménagement des lieux plus attentive aux dimensions sensible et symbolique, dimensions qui doivent se refléter dans la qualité esthétique des espaces et de leur composition. Ces actions pourraient également être conduites avec la participation des citoyens et des réseaux associatifs.
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