En complément de l’article publié dans RESON@NCE N° 35 de novembre 2007, il apparaît opportun, sans revenir sur l’excellente analyse des textes en vigueur et de la jurisprudence civile afférente au recouvrement des frais d’obsèques, voire le régime fiscal, d’exposer un problème pratique auquel des communes peuvent êtres confrontées, dès lors qu’un enfant légitime du défunt invoquerait spécifiquement une raison pour s’exonérer de son obligation alimentaire, ou, lorsque le défunt relevait, au cours de son hospitalisation ou de son placement en maison de retraite ou de santé, de l’aide sociale dispensée par les départements, via les services de la solidarité.
On sait que les frais funéraires constituent une créance privilégiée qui s’exerce sur la généralité des meubles, dans un ordre décroissant :
Après les frais de justice , viennent en seconde position les frais funéraires, qui précèdent les frais médicaux, l’article 2101 du Code Civil prescrivant "les frais quelconques de la dernière maladie, quelle qu’en ait été la terminaison, concurremment entre ceux  à qui ils sont dus".

Il existe actuellement un problème majeur pour le recouvrement des frais d’obsèques des personnes décédées dans un établissement de santé ou de retraite qui relevaient de l’Aide Sociale octroyée par les services de la solidarité des départements, dans la mesure où systématiquement ces établissements perçoivent l’intégralité de la dernière redevance de séjour (tout mois commencé étant dû), qui comprend, outre le complément versé par les services sociaux du département, les ressources propres du défunt (pension ou retraite principale, réversion de celle du conjoint, rentes, etc).
Ce faisant, les responsables de ces établissements saisissent les maires pour obtenir la gratuité des frais d’obsèques au motif que le défunt était dépourvu de ressources suffisantes, conformément aux dispositions de l’article L 2223-27 du Code Général des Collectivités Territoriales.

L’opérateur funéraire, dès lors qu’il est astreint à l’organisation des obsèques, ce qui est le cas pour le délégataire du service des pompes funèbres de la commune, le cahier des charges devant obligatoirement le prescrire, voire les régies municipales, se doivent de tenter, dans toute la mesure du possible, de connaître le niveau général des revenus du défunt et ses origines afin de rechercher une possibilité de recouvrer tout ou partie des frais d’obsèques, quitte, en cas d’insuffisance de ces revenus, à les compléter.

Cette recommandation vaut également pour les communes qui, lorsque le service des pompes funèbres n’est pas organisé par elles, ont l’obligation de faire appel à un opérateur habilité après mise en concurrence, et de faire supporter la dépense au budget général .

Un financement, même partiel, provenant des revenus du défunt constituerait une atténuation  parfois significative de ces charges.

Le recouvrement des frais d’obsèques selon les dispositions de l’article 2101 du Code Civil s’opère en fonction de la position sociale et de la fortune du défunt, donc sur les éléments de son patrimoine mobilier et constituent une dette de la succession, car ce n’est que sur les biens provenant de celle-ci que peut s’exercer le privilège .

La limite de ce texte est donc l’absence d’un "ACTIF" dans la succession qui entraînerait de la part des héritiers une renonciation à celle-ci et aurait pour conséquence d’accroître les charges imposées aux communes.
                       
C’est donc dans un tel contexte que la Cour de Cassation est intervenue par son arrêt du 14 mai 1992, 1ère chambre civile, D.1993, 247 note Eschylle, pour élargir les obligations alimentaires de l’article 205 du Code Civil en disposant que "l’enfant tenu par l’obligation alimentaire à l’égard de ses ascendants doit, même s’il a renoncé à leur succession, assumer la charge des frais d’obsèques dans la mesure de ses ressources, lorsque l’actif successoral est insuffisant".

Cette obligation alimentaire porte limitativement sur les descendants directs (enfants et petits-enfants, ainsi que leurs conjoints, dans les conditions prévues aux articles 203, 205 et 206, mais aussi l’article 371 du Code Civil qui fait obligation aux enfants d’honorer et de respecter leurs père et mère.

Il existe néanmoins une cause d’exonération de cette obligation pour les enfants à l’égard desquels le père ou la mère, voire les deux parents "auraient manqué gravement à leurs obligations envers le débiteur, car dans ce cas le juge pourra décharger ceux-ci de tout ou partie de la dette alimentaire".

Il s’agit dans ce cas précis, en quelque sorte d’une exception d’indignité consacrée légalement par le Code Civil qui résulte d’une modification législative du 3 janvier 1972 permettant au juge d’apprécier au cas par cas chaque situation : Voir en ce sens la réponse ministérielle N° 23336 J.O.A.N du 22 septembre 2003, page 7300.

Cette situation donne lieu actuellement, à Marseille, à une contestation "précontentieuse" émanant d’une personne ayant été abandonnée par ses parents légitimes et confiée aux services sociaux, après avoir bénéficié du statut de "pupille de l’Etat".

Il ressort de l’analyse de la jurisprudence que cette exception a reçu jusqu’à présent une application particulière en matière d’aide sociale, notamment pour les frais d’hébergement en maison de retraite ou les frais médicaux et d’hospitalisation.

A ce jour, il semblerait toutefois qu’il n’existe pas de décision ayant acquis la force jurisprudentielle pour le règlement des frais d’obsèques, bien que ceux-ci fassent partie intégrante du dispositif législatif.

Le rôle du juge est donc prépondérant : On a vu qu’il statue au cas par cas. Au plan de la compétence et en se référant à une réponse à question écrite, depuis la Loi du 8 janvier 1993, ces litiges relèvent du juge aux affaires familiales qui doit être saisi par voie d’assignation, la constitution d’avocat n’étant pas obligatoire. Le demandeur peut bénéficier de l’aide juridictionnelle s’il remplit les conditions de ressources.

Tant que le juge n’aura pas statué en faveur du débiteur, celui-ci demeure lié par la dette contractée auprès de l’opérateur funéraire en raison de son appartenance à la famille du défunt.

Jean Pierre Tricon

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations