Lorsqu'il y a un décès sur la voie publique : Qui gère l’opération ? quelle est la destination de la dépouille mortelle ? qui assume les frais des opérations ? Pour répondre à ces questions, le plus simple est de suivre la procédure chronologique habituelle, telle que prévue par les textes, depuis la découverte du corps, l’établissement du certificat médical de décès, le transport du corps et le dépôt dans une chambre funéraire jusqu’au paiement, en insistant sur les points sources de difficultés.

Il est nécessaire de rappeler que cette procédure de décès sur la voie publique, cas le plus fréquent, est également valable pour un décès dans un lieu public, un parc ou un centre commercial par exemple.

Cette procédure s’applique à un ou plusieurs corps, une famille par exemple. On terminera par les décès massifs, accidents d’autocar ou ferroviaire, qui entraînent une procédure de secours spécifique (plan ORSEC) et pour la partie funéraire des spécificités liées à l’afflux massif de corps.

Découverte du corps

Toute personne découvrant le corps inanimé d’une personne doit prévenir les secours sous peine des sanctions prévues par l’article 223-6 du code pénal pour non assistance à personne en danger (cinq ans d’emprisonnement et 75 000 euros d’amende). Il en découle un appel au SAMU, aux pompiers ou à un médecin.

Ce n’est que dans le cas d’une personne manifestement décédée (corps incinéré, en décomposition, tête séparée du corps, squelette, etc.) que l’appel s’adressera à la police, la gendarmerie ou le maire d’une petite commune.

Ces personnes sont généralement au courant de la procédure à suivre et prennent en charge la suite des opérations, c’est-à-dire le transfert du corps aux urgences d’un hôpital ou la procédure funéraire. La présence d’une personne décédée entraîne obligatoirement la venue de la police, appelée par les sapeurs pompiers le cas échéant, pour enquêter sur les causes du décès.

A ce stade, le policier ayant une formation de secouriste ou l’expérience de ce type d’accident, peut décider de mettre en œuvre la procédure funéraire. Il prend alors la responsabilité de l’article 223-6 du code pénal vis-à-vis du premier témoin ayant alerté les secours.

En cas de doute sur la vie de la personne inanimée, la police peut faire appel à un médecin pour statuer sur l’envoi de la personne au service des urgences ou établir un certificat médical de décès.

Etablissement du certificat médical de décès

Le certificat médical de décès, de couleur bleue pour les personnes âgées de 28 jours ou plus et de couleur verte pour les bébés de moins de 28 jours, est rempli par un médecin sans compétence particulière : ce médecin doit seulement être diplômé ; il n’est pas nécessairement en activité, ni inscrit au conseil de l’Ordre, inscription qui est nécessaire pour délivrer des ordonnances.

Ce certificat médical de décès est en général la première étape des funérailles. Mais encore faut-il disposer d’un tel document sur le bord de la route, lors d’un décès sur la voie publique. Aussi le code civil prévoit la possibilité de débuter les opérations funéraires sans certificat médical de décès : L’article 424 de l’instruction générale relative à l’état civil, en date du 29 mars 2003, prévoit que la déclaration du décès peut être réalisée à l’état civil par la personne (quelle qu’elle soit, sans qualité médicale) qui dispose du plus de renseignements sur le défunt.

Dans ce cas, les opérations funéraires peuvent débuter, sans certificat médical de décès, jusqu’à la mise en bière. En effet, l’autorisation de fermeture du cercueil ne peut être délivrée, par le maire, qu’au vu du certificat médical de décès (art. R. 2223-42 du code général des collectivités territoriales CGCT) et c’est la seule opération funéraire nécessitant absolument le certificat médical de décès, de même que les opérations funéraires consécutives à la fermeture du cercueil (inhumation ou crémation par exemple).

Généralement, le dégagement de la voie publique s’effectue sur ordre de la police, sans autorisation du maire. Puis la famille du défunt est retrouvée et informée. Toutes les autres opérations funéraires ont donc lieu avec autorisation du maire, sur demande de la famille.

L’article R. 2223-77 du CGCT prévoit le transport du corps de la personne décédée sur la voie publique dans une chambre funéraire après avis d’un médecin, compte tenu des sanctions prévues par l’article 223-6 du code pénal pour non assistance à personne en danger. Toutefois, la certitude du décès par la police ou le maire permet d’appliquer l’article 424 de l’instruction générale relative à l’état civil, en date du 29 mars 2003 précédemment cité. La police peut donc débuter les opérations funéraires (art. R. 2223-78 du CGCT), sous réserve d’en référer au maire du lieu de décès, qui est aussi l’officier d’état civil, afin que le service d’état civil enclenche la procédure de déclaration de décès décrite ci-dessus, une fois son ouverture effective.

Si un médecin remplit le certificat médical de décès, il le fait après un simple examen clinique du corps, c'est-à-dire la recherche d’un arrêt cardiaque. Aucune analyse chimique ou bactériologique n’est réalisée : la présence d’une contagiosité peut ainsi échapper au constat médical. Par exemple, une personne atteinte du SIDA qui décède d’un accident de la route ne sera pas détectée contagieuse, sauf si elle présente sur la peau les symptômes du syndrome de Kaposi.

Soustraction du corps de la voie publique

Avec ou sans certificat médical de décès, la police doit assurer le bon ordre et dégager la voie publique. Elle applique alors l’article R. 2223-77 du CGCT qui impose le dépôt du corps dans une chambre funéraire. C’est généralement à ce stade que la police fait appel à un opérateur funéraire pour dégager la voie publique.
Ce dégagement de la voie publique est plus ou moins facile selon les conditions climatiques. Si la circulation est facile, la police fera appel à une entreprise habilitée pour le transport de corps avant mise en bière. En cas de difficultés de circulation, la police peut réquisitionner n’importe quel véhicule, cette réquisition nécessitant toutefois un document écrit pour que le conducteur soit couvert par une assurance en cas d’accident au cours de ce transport.

La circulaire n° 76-310 du 10 juin 1976 relative à l’enlèvement et au transport des personnes décédées sur la voie publique rappelle que les sapeurs pompiers ont une activité de secours aux personnes et qu’il ne leur appartient pas de collecter les corps des personnes décédées sur la voie publique, cette activité pouvant porter préjudice à d’autres victimes en attente des secours. Toutefois, si le véhicule des sapeurs pompiers est le seul véhicule à quatre roues motrices sur une route verglacée, il est certain qu’il sera réquisitionné, la réquisition ayant pour objet  de pallier l’absence des moyens ordinaires.

Un lieutenant de sapeurs pompiers a déjà répondu, par télécopie, à un ordre de réquisition de moyens qu’il ne disposait pas du matériel adapté (véhicule de transport de corps avant mise en bière).

Le code général des collectivités territoriales soulève des interrogations dans la mesure où les articles R. 2223-77 et R. 2223-78 relatifs aux décès sur la voie publique, qui sont des activités strictement de police du maire (dégager le corps d’une personne décédée sur la voie publique dont on ignore s’il existe une autre personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles) sont dans la sous-section 4 (Equipements funéraires) de la section 2 (Opérations funéraires) du titre 2 (Services communaux), alors que l’autorisation de transport de corps avant mise en bière est à sa place, dans la sous-section 2 (Opérations consécutives au décès) du chapitre III (Pouvoirs de police portant sur des objets particuliers) du titre 1er (Police) du livre II (Administration et services communaux).

Les activités de police des articles R. 2223-77 et 78 du CGCT devraient donc logiquement figurer à côté des articles R. 2213-8 et 9 du CGCT relatifs au transport de corps avant mise en bière. Mais ce rapprochement fait aussitôt apparaître une incohérence :
  • à l’article R. 2223 - 78, le médecin doit s’assurer, avant le transport, de la réalité et de la cause du décès, afin de sauver éventuellement la personne en état de mort apparente et de vérifier l’absence de problème médico-légal (on n’évoque pas ici le mauvais état du corps) ;
  • à l’article R. 2213 - 9, le maire peut interdire un transport avant mise en bière en présence d’un certificat de médecin s’y opposant en raison d’un mauvais état du corps, d’autant plus que l’article R. 2223-78 rappelle que l’autorisation du maire n’est pas exigée (elle est donc possible).

Certaines communes font donc venir un médecin pour certifier tout décès sur la voie publique, et ce médecin interdit le transport avant mise en bière lorsque le corps est en mauvais état. Dans ce cas, conformément à l’article R. 2213-12, le transport ne peut s’effectuer qu’après mise en bière, en cercueil fermé, conformément à l’article R. 2213-21 visé par l’article R. 2213-12.

Il est assurément illégal d’appliquer les conditions du mauvais état du corps de l’article R. 2213-12 à l’article R. 2223-77 relatif à un décès sur la voie publique qui ne prévoit pas cette disposition, puisque cet article précise que le médecin est requis pour vérifier la réalité du décès et l’absence de problème médico-légal. Par ailleurs, cette obligation de transport en cercueil fermé restera valable si un nouveau transport avant mise en bière est demandé, par la famille, au départ de la chambre funéraire de dépôt du corps : elle est donc prématurée.

L’enlèvement du corps de la personne décédée par la police, même s’il peut être soumis à autorisation du maire, est complètement différent du transport avant mise en bière demandé par la famille : Dans le 1er cas, c’est une opération de police destinée à dégager la voie publique alors que la famille demande, dans le 2ième cas, une opération de funérailles.

Cette illégalité est confirmée, d’autre part et beaucoup plus grave, par l’empêchement de fonctionnement correct des enquêtes judiciaires généré par cette procédure de transport en cercueil fermé. En effet, la fermeture du cercueil empêche la reconnaissance du corps de la personne décédée par la famille, ce qui, par ailleurs, entraîne un grand traumatisme de cette famille car elle n’est jamais certaine de la réalité du décès.

Supposons que le disparu de la famille ait été assassiné, et que l’assassin du disparu, de même sexe et corpulence, décède dans un accident de la route avec les papiers du disparu. Le mauvais état du corps entraîne alors, avec la mise en bière immédiate, que l’assassin est inhumé sous le nom du disparu puisqu’un cercueil ne peut pas être ouvert avant 5 ans (art. R. 2213-42 du CGCT).

Par la suite, le corps du disparu peut être retrouvé, mais les analyses ADN effectuées sur le corps retrouvé ne permettront jamais d’élucider l’affaire puisqu’elles ne correspondront pas à celles de l’assassin qui aura été porté disparu. Plus il s’est écoulé du temps avant la découverte du corps et plus la date du décès est incertaine, ce qui empêche tout rapprochement avec l’accident de la route dans le cas où cet accident a eu lieu à proximité du lieu de dépôt du corps assassiné.

Tout décès sur la voie publique doit donc donner lieu à la reconnaissance du corps de la personne décédée par une personne de la famille, la plus solide psychologiquement si le corps est en mauvais état, ce qui impose obligatoirement un transport avant mise en bière depuis la voie publique jusqu’à la chambre funéraire.

Par ailleurs, cette mise en bière sur la voie publique nécessite le choix d’un cercueil courant pour répondre aux demandes de la majorité des familles, car la famille de la personne décédée n’est pas encore informée du décès et ne pourrait pas, non plus, choisir un cercueil en urgence alors qu’elle est encore sous le choc de l’information du décès. 

Le choix de ce cercueil, qui a interdiction d’être ouvert avant 5 ans, peut s’avérer en contradiction avec les volontés du défunt. La famille pourrait alors, à juste raison, porter plainte contre le maire de la commune pour non respect des volontés du défunt, conformément à l’article 433-21-1 du code pénal, qui punit cette infraction de six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende, sans compter l’interdiction des droits civiques et l’interdiction d’exercer pendant cinq ans l’activité publique ayant donné lieu à l’infraction (art. 433-22 du code pénal).

Ces deux raisons majeures, poursuite des enquêtes judiciaires et respect de la volonté du défunt, conduisent à empêcher le transport en cercueil pour un décès sur la voie publique, lequel transport en cercueil pourra s’effectuer au départ de la chambre funéraire, et confirment l’illégalité des conditions de l’article R. 2223-9 dans le cadre d’un décès sur la voie publique. 

Si la famille est présente sur le lieu du décès sur la voie publique, elle peut en théorie demander un transport de corps avant mise en bière en application de l’article R. 2213-12 du CGCT, à condition que le Procureur de la République soit convaincu de l’absence de problème médico-légal et que le service d’état civil puisse délivrer l’autorisation. Mais l’urgence du dégagement de la voie publique fait que cette procédure n’est pratiquement jamais utilisée.
Dans le cas habituel de transport comme dans le cas de réquisition, la police doit préciser sur ce document la base juridique de l’opération (correspondant à un obstacle médico-légal ou à un décès naturel), car il découle de cette base juridique le commanditaire représenté par la police qui devra financer cette opération.

Financement du transport et du séjour en chambre funéraire

Deux cas de décès sont possibles sur la voie publique : le décès naturel et celui donnant lieu à obstacle médico-légal qui ont deux bases juridiques distinctes (article R. 2223-77 du CGCT ou 77 du code de procédure pénale) et des paiements différents. Les deux transports ont en commun de ne pas nécessiter d’autorisation du maire de la commune du lieu de décès (question écrite n° 14-491, JO Sénat, 4 juillet 1996, p 1674).

1 - Obstacle médico-légal

Si une personne meurt par balles à la terrasse d’un café, le décès n’est pas naturel et donne lieu à enquête judiciaire. Le corps est à la disposition de la Justice pour enquête, le transport en institut médico-légal (IML) ou en chambre funéraire (en l’absence d’IML) s’effectue sur la base de l’article 77 du code de procédure pénale. C’est alors le Parquet qui prend en charge le financement de l’opération.

Il est arrivé que la police se trompe et mentionne l’article 77 du code de procédure pénale sur la réquisition d’une entreprise de pompes funèbres pour un décès naturel. Du fait de cette erreur, le maire et le procureur refusaient tous deux de prendre en charge le transport. La Cour d’appel de Dijon, se basant sur les éléments matériels disponibles, a imposé au Procureur le paiement du transport dans son arrêt du 20 décembre 2000.

Sans cet ordre de réquisition portant la base juridique de la demande de transport, jamais l’opérateur funéraire n’aurait été remboursé. Cet ordre de réquisition doit toujours être écrit pour que le transporteur soit assuré en cas d’accident.

Dans la réponse à la question écrite de M. Francis Hillmeyer, parue au Journal Officiel de l’Assemblée nationale  en date du 27 juin 2006, page 6799, le ministère de la Justice reconnaît que l’obstacle médico-légal peut parfois être levé sur place par un médecin. Dans ce cas, le Parquet rémunère le travail du médecin, lequel expertise si la personne est reconnue décédée de mort naturelle ou non.

2 - Mort naturelle

Lorsque la personne est décédée de mort naturelle, c’est le maire qui demande le dégagement de la voie publique en appliquant l’article R. 2223- 77 du CGCT. La police ordonne le transport au nom du maire, en citant cet article R. 2223-77 du CGCT sur la réquisition ou l’ordre de transport. Le maire peut financer ce transport dans un premier temps ou en demander directement le paiement à la famille car ce transport est la première opération des funérailles, qui sont à la charge de la famille par les articles 205 et 206 du code civil (réponse à la question écrite n° 3590, JO Sénat, 28 décembre 1989, p 2189).

Si la famille refuse ce paiement, le maire qui a commandité ce transport doit en premier lieu payer la facture du transporteur. Ensuite, il peut demander à la Justice le remboursement par la famille des frais qu’il a engagés (question écrite n° 3590, journal Officiel du Sénat, 28 décembre 1989, page 2189) ou financer l’opération par le bureau municipal d’aide sociale s’il reconnaît la famille comme dépourvue de ressources suffisantes.

La gestion des décès sur la voie publique est une mission de police administrative, comme la gestion du cimetière, non comprise dans la définition du service extérieur des pompes funèbres (art. L. 2223-19 du CGCT).  Il appartient donc au maire de gérer ces décès sur la voie publique.

Il peut pour cela passer une convention avec un opérateur funéraire, soit pour le transport uniquement, soit pour le séjour en chambre funéraire puisqu’il devra financer le séjour des indigents, soit pour les deux simultanément.

Qui prévient la famille du décès ?

Le ministre de l’Intérieur, dans sa réponse à la question écrite n° 27501, parue au Journal Officiel de l’Assemblée nationale en date du 16 octobre 1995, page 4362, précise qu’aucune disposition n’existe. Généralement, la police se charge de prévenir la famille de la personne disparue.
Dans une petite commune sans police ni garde champêtre, ce sera donc au maire d’aller informer la famille du décès qui s’est produit en un lieu public.

La famille, une fois informée du décès et du dépôt du corps en chambre funéraire, peut récupérer le corps de la personne décédée à son domicile, le faire transférer dans une chambre funéraire proche de son domicile, le laisser dans la chambre funéraire initiale, ou le faire inhumer, tout cela à ses frais, mais avec des restrictions possibles en fonction de l’état du corps.

Cas des indigents

Il n’existe pas de définition nationale du manque de ressources suffisantes : le maire peut choisir le revenu minimum d’insertion par exemple ou se baser sur l’article L. 35-1 du code des postes et télécommunications qui introduit le service universel des télécommunications. L’article R. 20-34 du même code donne ce droit aux titulaires de minima sociaux tels que le revenu minimum d’insertion, l’allocation adulte handicapé et l’allocation spécifique de solidarité.

Le financement des funérailles d’indigent repose, conformément à la circulaire du ministre de l’Intérieur n° 97-211 du 12 décembre 1997 relative à la gestion des régies municipales de pompes funèbres, sur :
  • les taxes de convois, d’inhumation et de crémation lorsque le crématorium est situé sur la commune ;
  • le produit des concessions funéraires ;
  • le droit de séjour au caveau provisoire ou en dépositoire ;
  • la vente des monuments récupérés sur les concessions arrivées à échéance ou abandonnées.

Le conseil municipal décide du montant d’une ou plusieurs de ces taxes et redevances. C’est le maire de la commune du lieu de décès qui doit financer ces funérailles,  conformément à l’article L. 2223-3 du CGCT.

Toutefois, cette obligation de financement des obsèques ne vaut que pour les dépenses obligatoires et non pour les dépenses somptuaires. L'arrêté du 19 janvier 1994 définit quelles sont les dépenses obligatoires en fonction des circonstances du décès.

La famille ne peut financer théoriquement des éléments somptuaires des funérailles sans avoir préalablement remboursé au maire les dépenses obligatoires fixées par la circulaire du 18 février 1985 relative au modèle de contrat de concession : pas question de mettre des poignées en or (dépense non obligatoire et somptuaire) sans avoir auparavant payé le cercueil en sapin avec sa garniture (dépense obligatoire).

Mais quel est le coût normal des obsèques ? Jusqu'à quel montant le maire est-il tenu de respecter les volontés du défunt ? Aucune précision n'est apportée par le code général des collectivités territoriales (CGCT).

La circulaire du ministre de la santé en date du 31 janvier 1962 relative à la prise en charge et au remboursement des frais d'inhumation des personnes décédées dans un hôpital ou un hospice (toujours en vigueur bien qu'illégale en vertu de l'article L. 2213-7 du CGCT qui confie cette responsabilité au maire) donne le niveau des dépenses considérées comme somptuaires qui rendaient obligatoire le paiement des funérailles par les enfants, en lieu et place de l'hôpital, pour les faux indigents : c'est le 24ème du montant maximum de la rémunération annuelle retenue pour le calcul des cotisations de la sécurité sociale. Le montant annuel de rémunération retenu par la sécurité sociale étant de 32 184 euros  par an  en  2007,  il  s'ensuit  qu'au-delà  de  1 341 euros ces funérailles sont considérées comme ayant un caractère somptuaire.
Entre parenthèses, chacun sait que la sécurité sociale verse à la famille de l'assuré social qui décède un capital décès (article L. 361-1 du code de la sécurité sociale) d'un montant égal à trois mois de salaire (art. R. 361-1 du code de la sécurité sociale), mais limité au minimum de 3 218 euros et au maximum du quart de 32 184 euros (limites fixées par l'article R. 361-2 du code de la sécurité sociale), cette somme étant destinée à couvrir les funérailles et à permettre à la famille de vivre jusqu'à l'attribution de la succession du défunt.

L’article L. 311-5 du code la sécurité sociale accorde ces mêmes droits aux chômeurs de plus de cinquante ans (qui ne sont pas obligés de rechercher un emploi), aux personnes bénéficiant d’un revenu de remplacement mentionné par l’article L. 351-2 du code du travail : chômeurs bénéficiant de l’assurance chômage, demandeurs d’asile, fonctionnaires, chômeurs ayant épuisé leurs droits au revenu de remplacement mais poursuivant leur recherche d’emploi, etc., ainsi que les personnes en pré retraite suite à des accords professionnels portant sur leur âge et la pénibilité du travail effectué (art. L. 352-3 du code du travail - travailleurs de l’amiante par exemple).

Conformément à l’article L. 361-5 du code de la sécurité sociale, ce capital est  incessible et insaisissable, sauf pour le paiement des dettes alimentaires dont fait partie le montant des funérailles.

En choisissant le sixième des trois mois de salaire (c'est-à-dire le 24ème du revenu annuel) comme seuil de somptuosité, le directeur de la sécurité sociale fait, me semble-t-il, deux extrapolations : il considère d'une part que la famille consacre un sixième des trois mois de salaire aux obsèques, le reste servant à financer les frais courants (loyer, chauffage, nourriture, etc.). D'autre part, il considère que les dépenses sont somptuaires au-delà du sixième du seuil retenu par la sécurité sociale pour ses cotisations, qui est un seuil éminemment administratif. En dépit de ces imperfections, c'est cependant la seule valeur réglementaire connue.

Au-delà de 1 341 euros, les funérailles étaient donc considérées comme somptuaires dans un établissement de santé et les enfants devaient prendre en charge l'ensemble des dépenses funéraires de l'indigent. Entre le coût réel des obsèques d'indigent pris en charge et le montant de 1 341 euros, les enfants pouvaient financer librement des dépenses accessoires des funérailles.

Bien que cette circulaire ne s'impose pas au maire, elle apporte une indication : tout maire peut donc considérer cette valeur comme seuil de dépenses funéraires maximales au-delà duquel les familles doivent prendre en charge les obsèques, l'indigence ne pouvant plus s'appliquer. En dessous de cette valeur, les familles complètent à leur convenance les dispositions obligatoires prises par le maire.

A l'époque du monopole, le certificat d'indigence était remis à la famille pour faire valoir ses droits à la gratuité des obsèques auprès de l'entreprise de pompes funèbres détentrice du monopole. Désormais, cette disposition non abrogée de la circulaire du 18 février 1985 relative au modèle de contrat de concession est indispensable aux familles indigentes organisant les funérailles avec paiement par le maire, car le maire doit respecter la volonté du défunt représentée par la famille (art. 433-21-1 du code pénal).

Le certificat d'indigence sera remis à l'entreprise de pompes funèbres pour attester que le maire paiera les dépenses obligatoires des funérailles, la famille pouvant compléter ce montant par des dépenses accessoires. Il signifie à l'entreprise que le dépassement somptuaire des funérailles (plus de 1 341 euros) doit être déclaré au maire pour qu'il demande à la famille le remboursement des frais engagés par lui à tort. A la suite de cette information, le maire peut exercer un recours pour le remboursement des frais engagés par lui, soit sur la succession, soit contre la famille, dans les conditions habituelles de remboursement des prestations sociales.

Une association des amis d'un défunt indigent a le droit d'ériger un monument sur sa sépulture, sans financer préalablement les obsèques, puisque l'article 205 du code civil s'applique uniquement aux enfants du défunt et non à une association.

Quelle chambre funéraire choisit le maire et que faire en son absence ?

En 1976, le transport devait s’effectuer vers la chambre funéraire la plus proche. Cette proximité de la chambre funéraire jouait uniquement entre le lieu de décès et la chambre funéraire,  mais non entre le domicile de la personne décédée et celui de la chambre funéraire. Depuis, cette notion de proximité a disparu de l’article R. 2223-77 du CGCT.

Il revient donc au maire de choisir la chambre funéraire, soit par tour de garde s’il y a plusieurs chambres funéraires sur la commune, soit par appel d’offres avec sélection au moins disant dans le cadre d’une convention, soit au coup par coup sur réquisition.

D’ailleurs, le critère de choix de la chambre funéraire par le maire n’est pas la proximité mais le coût, en bon gestionnaire des finances publiques.

S’il est évident que l’absence de chambre funéraire empêche le dépôt du corps en application de l’article R. 2223-77 du CGCT, il reste à préciser quelle est la distance prouvant l’absence de chambre funéraire et nécessitant la mise en place de mesure alternative.

Les textes sont totalement muets sur ce point et il reviendra par conséquent au tribunal de trancher en cas de litige. On peut cependant avancer des hypothèses.

Dans le silence des textes, on peut argumenter, devant un tribunal, sur la base d’autres textes utilisant la notion de distance. Ainsi, le code des impôts reconnaît comme normale la distance de 40 km entre le domicile et le lieu de travail. C’est le seul indice codifié de distance puisque la durée de 24 h autorisée pour un transport avant mise en bière permet de traverser la France et ne limite pas le nombre de chambres funéraires utilisables.

Une autre notion pourrait être utilisée, bien que non réglementaire : il s’agit de la durée moyenne de transport des franciliens pour se rendre à leur travail qui est de 34 minutes.

En l’absence de chambre funéraire, le maire peut utiliser un dépôt mortuaire (QE n° 14-491, JO Sénat 4 juillet 1996, p 1674), lequel ne répond à aucune définition légale. Un arrêté du maire peut donc baptiser un caveau provisoire du nom de dépôt mortuaire et l’utiliser dans le cadre des réquisitions pour décès sur la voie publique (brochure "Le service extérieur des pompes funèbres" du ministère de l’Intérieur, dans la collection "Décentralisation", parue en 1997).

La circulaire 99/18 du 14 janvier 1999 relative aux chambres mortuaires des établissements de santé précise que les chambres mortuaires des hôpitaux sont conçues pour recevoir le corps des personnes décédées à l’hôpital. Cependant, en cas d’absence de chambre funéraire et de dépôt mortuaire, elles peuvent être réquisitionnées.

Devenir du corps après la chambre funéraire choisie par le maire

Conformément à l’article R. 2213-7 du CGCT, quel que soit le lieu du dépôt du corps, le corps peut faire l’objet d’un nouveau transport de corps avant mise en bière (à condition de respecter le délai de 24 h, ou 48 h si des soins ont été réalisés).

Le corps peut donc être transporté, depuis la chambre funéraire de dépôt du corps, la chambre mortuaire ou le dépôt mortuaire, vers le domicile de la famille ou la chambre funéraire choisie par la famille.

Attention, le médecin peut prescrire la mise en bière obligatoire si le corps est en mauvais état, conformément à l’article R. 2213-9 du CGCT. Mais cette mesure doit être appliquée avec réserve car la famille doit se convaincre du décès de la personne pour faire son deuil et il importe qu’une personne de la famille assume la reconnaissance du corps, par les vêtements ou les bijoux le cas échéant, préalablement à ce transport après mise en bière.

Si le visage est très défiguré et que le médecin ne s’oppose pas à un transport sans mise en bière, il revient à l’opérateur funéraire choisi par la famille de déconseiller un retour à domicile ou de faire accepter une restauration. C’est son devoir de conseil.

Catastrophe faisant de nombreuses victimes

En cas de crise faisant de nombreuses victimes, le plan ORSEC (organisation des secours) est déclenché. Le préfet du département concerné dispose de la capacité d’agir en vertu de l’article L. 2215-1 du CGCT. Si plusieurs départements sont concernés, le premier ministre nomme le préfet coordonnateur, qui sera responsable des opérations.

Chaque préfecture a établi un bilan des moyens funéraires disponibles en matériel et personnel. L’absence de place disponible en chambre funéraire permet de réquisitionner les chambres mortuaires le cas échéant. De plus, des lieux frais, facilement accessibles et adaptables au dépôt des corps ont déjà été sélectionnés.

Des conventions avec les syndicats professionnels funéraires ont été prévues. Le régime des autorisations funéraires doit être facilité, avec allongement des délais de réalisation. Les maires seront sollicités pour élargir les horaires d'ouverture des services d'état civil, des cimetières et des crématoriums.

Enfin, les articles R. 2213-43 et R. 2213-52 du CGCT couvrent toutes les situations exceptionnelles en permettant la mise en place de mesures funéraires spéciales par arrêté interministériel suite à l'avis d'une commission (ce pourrait être par exemple des inhumations communes en série dans une tranchée). Selon un avis de la Direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, cet arrêté interministériel ne permettrait pas d’éviter l’habilitation funéraire, mais la réquisition permet de lever cet obstacle.

Conformément à l’article L. 2215-1 du CGCT, en cas d'urgence, lorsque l'atteinte au bon ordre, à la salubrité, à la tranquillité et à la sécurité publiques l'exige et que les moyens dont dispose le préfet ne permettent plus de poursuivre les objectifs pour lesquels il détient des pouvoirs de police, celui-ci peut, par arrêté motivé, pour toutes les communes du département ou plusieurs ou une seule d'entre elles, réquisitionner tout bien et service, requérir toute personne nécessaire au fonctionnement de ce service ou à l'usage de ce bien et prescrire toute mesure utile jusqu'à ce que l'atteinte à l'ordre public ait pris fin.
L'arrêté motivé fixe la nature des prestations requises, la durée de la mesure de réquisition ainsi que les modalités de son application.
Le préfet peut faire exécuter d'office les mesures prescrites par l'arrêté qu'il a édicté, c’est-à-dire que la police accompagne le réquisitionné pour être certain qu’il exécute bien les prestations demandées.
La rétribution par l'Etat de la personne requise ne peut se cumuler avec une rétribution par une autre personne physique ou morale. La rétribution doit uniquement compenser les frais matériels, directs et certains résultant de l'application de l'arrêté de réquisition.
Dans le cas d'une réquisition adressée à une entreprise, lorsque la prestation requise est de même nature que celles habituellement fournies à la clientèle, le montant de la rétribution est calculée d'après le prix commercial normal et licite de la prestation.
Dans les conditions prévues par le code de justice administrative, le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il délègue peut, dans les quarante-huit heures de la publication ou de la notification de l'arrêté, à la demande de la personne requise, accorder une provision représentant tout ou partie de l'indemnité précitée, lorsque l'existence et la réalité de cette indemnité ne sont pas sérieusement contestables.
Enfin, en cas d'inexécution volontaire par la personne requise des obligations qui lui incombent en application de l'arrêté édicté par le préfet, le président du tribunal administratif ou le magistrat qu'il délègue peut, sur demande de l'autorité requérante, prononcer une astreinte dans les conditions prévues aux articles L. 911-6 à L. 911-8 du code de justice administrative.
Le refus d'exécuter les mesures prescrites par l'autorité requérante constitue un délit qui est puni de six mois d'emprisonnement et de 10 000 euros d'amende.

Conclusion
 
Les points cruciaux du décès sur la voie publique concernent donc la motivation de la réquisition pour l’opérateur funéraire, l’absence de cercueil obligatoire pour la famille et les funérailles de la personne dépourvue de ressources suffisantes pour le maire. Il importe alors que le maire et le conseil municipal aient prévu auparavant les mesures budgétaires correspondantes. Dans le cas d’une catastrophe, il est courant que le Gouvernement vienne en aide à la commune concernée.

Claude Bouriot

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations