Il est urgent de revoir les conditions d’accès à la profession de thanatopracteur en France. Harmonisation régionale, contenu des formations, méthodes d’enseignement, modalité des stages et conditions d’obtention du diplôme doivent être repensés pour que soit assurée une qualité de soins, devenue trop dépendante de l’expertise personnelle de certains intervenants. Il faut aussi songer à la mise en place d’un numerus clausus qui s’inscrirait dans une nouvelle législation européenne.
Cessons de nous voiler la face ! Aujourd’hui en France, la qualité des soins thanatopraxiques réalisés sur un défunt dépend pour une large part du savoir-faire, de l’expérience personnelle… et du sens du travail du thanatopracteur à qui sont confiés les soins. Mais attention, ce qui pourrait être perçu comme une remarque "simpliste” sur notre profession porte en réalité une réflexion profonde sur notre métier et sur l’avenir de celui-ci. Car nous, thanatopracteurs pratiquants, qui sommes confrontés au quotidien de la mort, savons bien que tout le monde n’intervient pas de la même façon. En parlant avec les chefs d’entreprises, en échangeant avec nos employés ou avec des thanatopracteurs indépendants, en intervenant dans les centres de formation, en faisant passer des tests pour les entretiens d’embauche… nous constatons que le discours varie incroyablement d’un thanatopracteur à l’autre. D’une manière plus concrète, il est de notoriété publique que je suis aujourd’hui personnellement engagé dans mon entreprise et que je suis également très présent sur le terrain. Je sais donc de quoi je parle. Pour l’observer régulièrement au hasard de mes déplacements dans toute la France, dans les hôpitaux, dans les funérariums, dans les familles : Je me dois de dire que les soins thanatopraxiques ne répondent plus assez à des critères objectifs d’évaluation et de qualité.
 
Qualité de l’enseignement

Il y a une raison majeure à cela : L’arrivée sur le marché de jeunes thanatopracteurs dont la formation n’a pas été suffisante. Que l’on me comprenne bien ! Je ne dis pas que les thanatopracteurs les plus jeunes sont moins motivés ou moins engagés que les plus anciens dans leur travail quotidien. Je ne dis pas que les "vieux” thanatopracteurs travaillent mieux que les "jeunes”. Non. Bien naïf serait celui qui raisonnerait ainsi. Nous avons en effet tous croisé de jeunes thanatopracteurs - et parmi eux de plus en plus de femmes - réellement impliqués dans leur travail, motivés par le désir de bien faire et par la volonté de mettre leur savoir-faire au service des familles. Le problème n’est pas directement lié à la motivation et à l’engagement des nouveaux venus.

Non, le problème est lié à la qualité de la formation initiale. Il y a d’abord le problème de l’enseignement. Disons que, d’une manière générale, la grande majorité des établissements qui enseignent la thanatopraxie ont fait des efforts considérables, ces dernières années, pour instaurer une formation digne de ce nom. Ces efforts ont porté sur l’élaboration de programmes adaptés, sur le recrutement d’enseignants compétents (et motivés), sur la mise en place de contrôles de connaissances sérieux et adaptés. Hélas, il y a loin de la coupe aux lèvres ! Tous les établissements de formation au métier de thanatopracteur qui existent ne sont pas à la hauteur de ce qu’ils promettent aux candidats. Il faut le dire ouvertement : Certains d’entre eux ne tiennent pas toujours leurs engagements vis-à-vis des élèves. Certes, le modèle mis en place par le centre de formation de la faculté de médecine d’Angers a inspiré beaucoup de monde… mais il y a encore un long chemin à parcourir avant que la qualité de l’enseignement qui y est dispensé ne se généralise. Très long chemin même, tant l’on constate ici et là, l’ignorance réelle de nouveaux venus dans la profession sur des questions pourtant élémentaires d’anatomie ou de droit funéraire.

Formation pratique

La qualité de l’enseignement revêt aussi une dimension cruciale dès lors que l’on aborde la question de la pratique. Bien sûr, la plupart des élèves thanatopracteurs se retrouvent le jour de l’examen avec - sur le papier du moins - une attestation certifiant qu’ils ont bien effectué le nombre de soins réglementaires exigé pour passer le diplôme. Mais qui contrôle effectivement que les soins ont été réellement pratiqués par l’élève ? Qui peut garantir que la transmission des connaissances est réellement assurée pendant la formation ? Qui garantit la qualité de l’accompagnement pendant les premiers soins réalisés par le jeune apprenti ? Qui garantit que l’analyse des soins à pratiquer – pour les cas les plus difficiles – est bien faite ? Hélas, sur cet aspect de la formation, beaucoup de questions restent sans réponses réellement satisfaisantes. C’est pourtant là un des points fondamentaux de notre métier et de l’avenir de celui-ci : La capacité technique des nouveaux venus à exercer leurs compétences encore toutes récentes selon des critères objectifs, établis et reconnus par tous. Il y a encore fort à faire sur ce point.

Aujourd’hui, je ne m’attarderai pas sur les conditions d’obtention du diplôme national de thanatopraxie ni sur le manque de transparence qui continue de caractériser son mode de fonctionnement. Toute la profession sait qu’il y a ici aussi, un long chemin à parcourir pour parvenir à une situation satisfaisante…

Des propositions concrètes

Alors que la mise en place d’un diplôme européen de thanatopraxie fait son chemin dans les consciences collectives, il m’apparaît fondamental d’exposer de nouvelles règles et de nouvelles modalités d’accès à la profession de thanatopracteur en France. À mon sens, il faut établir de nouvelles règles d’obtention du diplôme national de thanatopraxie. En voici les fondamentaux :
  • L’accès à la formation au métier de thanatopracteur requiert l’obtention du baccalauréat (sans aucune dérogation possible).
  • La formation dure deux ans.
  • Le contenu de la formation et l’organisation du diplôme sont placés sous le contrôle d’organismes représentatifs de la profession (Fédérations).
  • Chaque étudiant est placé sous la responsabilité d’un maître de stage qui valide personnellement la qualité des soins dispensés par l’élève pendant sa formation (avec une évaluation permanente de l’acquisition des connaissances et des capacités pratiques du candidat au diplôme).
  • Un minimum de deux cents soins est requis pour qu’un candidat puisse se présenter aux épreuves du diplôme national de thanatopracteur.
  • Les soins réalisés par les stagiaires doivent être pratiqués dans au moins trois régions administratives différentes afin de permettre aux candidats d’être en contact avec plusieurs thanatopracteurs de divers départements.
  • Le contrôle des connaissances pour l’obtention du diplôme national sera placé sous la responsabilité d’un "bureau des examens" composé de plusieurs professionnels véritablement reconnus.
  • L’âge minimum requis pour pouvoir passer l’examen de thanatopraxie devrait être de vingt et un ans à la date des épreuves.
  • Afin d’améliorer le niveau des candidats et de limiter l’accès à la profession aux seuls candidats compétents, il ne sera pas délivré plus de cent diplômes annuellement (le chiffre, revu chaque année, sera fixé dans un souci de développement harmonieux du nombre de thanatopracteurs réellement en exercice).

Voilà les bases de ce que devra être, demain, le nouveau diplôme national de thanatopraxie. Ceci est d’autant plus impératif qu’avance à grands pas la mise en place d’un diplôme européen de thanatopraxie dont les conditions d’obtention seront vraisemblablement drastiques.

Christian Raffault
 

Instances fédérales nationales et internationales :

FNF - Fédération Nationale du Funéraire FFPF - Fédération Française des Pompes Funèbres UPPFP - Union du Pôle Funéraire Public CSNAF - Chambre Syndicale Nationale de l'Art Funéraire UGCF - Union des Gestionnaires de Crématoriums Français FFC - Fédération Française de Crémation EFFS - European Federation or Funeral Services FIAT-IFTA - Fédération Internationale des Associations de Thanatoloques - International Federation of Thanatologists Associations